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Comment le basket français accélère sa digitalisation

La situation nette cumulée des clubs de l’élite (ProA/ProB) a passé la barre des 5 millions d’euros (au 30 juin 2017).

La situation nette cumulée des clubs de l’élite (ProA/ProB) a passé la barre des 5 millions d’euros (au 30 juin 2017). - Frederick Florin-AFP

Alors que les recettes des équipes de Pro A stagnent, la ligue nationale de basket a équipé tous les clubs professionnels de caméras "intelligentes". L'objectif: resserrer les liens avec les fans pour reconquérir le terrain cédé à la concurrence.

La ligue nationale de basket (LNB) a présenté mercredi le bilan financier des clubs de Pro A et de Pro B. Si la situation nette cumulée des clubs de l’élite passe la barre des 5 millions d’euros (au 30 juin 2017), et si les redistributions aux clubs poursuivent leur hausse (+166% depuis 2011 selon le président de la LNB Alain Béral), le résultat d’exploitation global est légèrement négatif (-34.000 euros) en raison notamment de la baisse des recettes liées au sponsoring privé et de la diminution des subventions des collectivités, alors qu’il s’établissait à +316.000 euros une saison plus tôt.

Et si la LNB se félicite de la "solidité financière de la Pro A", sans oublier la Pro B "où tous les clubs sont désormais en situation nette positive", le rapport financier de la Direction nationale du conseil et du contrôle de gestion des clubs professionnels (DNCCGCP) note de grandes disparités entre les performances économiques des différents clubs de l’élite.

Regagner du terrain

Globalement, les recettes des clubs stagnent: en 2016/2017, un club de Pro A générait en moyenne 4,983 millions d’euros de produits d’exploitation, un montant quasiment identique à la saison précédente. Une stagnation qui confirme ce que disait un rapport rédigé en février 2017 sous l'égide du CDES (Centre de droit et d’économie du sport). Celui-ci dressait un constat mitigé quant à la situation du basket français qui, s’il a doublé ses revenus en cinq ans, a perdu du terrain par rapport à ses concurrents, le rugby et le handball notamment. Dès lors, les auteurs du rapport (anciens joueurs, consultants, dirigeants du basket et d’ailleurs) ont élaboré des pistes pour accroître l’attractivité des clubs et regagner le terrain cédé à la concurrence.

Parmi elles, mettre l’accent sur la digitalisation des clubs pour faire du basket "le sport leader" en France dans ce domaine. Une problématique dont la ligue s'est déjà saisie, en fournissant à tous les clubs de Pro A et Pro B des caméras "intelligentes" pour filmer les matchs.

Interrogé à ce sujet au mois de décembre 2017, le président de la LNB Alain Béral confirmait alors que "tous les clubs professionnels [avaient été] équipés de ces caméras qui suivent le ballon". L'objectif, c'est de fournir aux clubs toute la matière nécessaire pour que ceux-ci "découpent, commentent et diffusent" les images des matchs sur le web et les mobiles de leurs supporters. L’ADN du jeu le permet: "Le basket est le sport qui se prête le mieux à la digitalisation, il y a des actions spectaculaires toutes les 24 secondes" selon le président de la ligue.

L'objectif: attirer plus de monde aux matchs

Charge ensuite pour les clubs de faire fructifier ces contenus. Alain Béral: "On informe, on pousse et on forme [les clubs] pour que leur public à eux, sur leur site, puisse profiter de ces images". L’intérêt est tout trouvé: en attirant à l'aide de ces vidéos les fans sur leurs sites et leurs réseaux sociaux, les clubs nourrissent leur communauté et renforcent les liens. Le grand objectif étant toujours d’attirer plus de spectateurs aux matchs. Pour Alain Béral, le numérique y participe, mais il ne fait pas tout. "Cela vient en plus, mais la digitalisation [des clubs] ne remplace pas les politiques que nous mettons en place pour attirer les gens à la salle". Il faut dire que la concurrence est vive, entre les autres sports et les manifestations culturelles. Par ailleurs vice-président de KFC France, le président de la LNB illustre en usant de la métaphore: "Quand on mange 14 fois par semaine, on ne mange pas 18. Pour le soir, c’est pareil. Il faut occuper le terrain, et prouver que le meilleur spectacle qu’on pourra proposer aux familles, c’est celui du basket". Les sites des clubs et leurs réseaux sociaux sont évidemment une arme redoutable pour cela, surtout à destination d’une clientèle jeune. En accélérant leur digitalisation, les clubs de Pro A se donnent la possibilité de recruter leurs supporters de demain.

Frédéric Forte, le précurseur

Le CSP Limoges a compris il y a longtemps les enjeux de la digitalisation, sous l’impulsion de celui qui fut son président de 2004 jusqu’à son décès brutal le 31 décembre dernier, Frédéric Forte. Nous avions eu l’occasion d’échanger avec lui sur le sujet il y a quelques semaines. Une discussion qui nous avait permis de mesurer le chemin parcouru par le CSP sous l’égide de son président visionnaire qui avait su, avec ses partenaires, faire de ce club historique un pionnier de l’innovation numérique. Au moment où il cherche à se réinventer, le basket français a perdu l'un de ses plus illustres acteurs.

Thomas Oliveau