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Le Foll veut réduire l'usage des pesticides en France

L'utilisation des pesticides a progressé de 5% entre 2009 et 2013

L'utilisation des pesticides a progressé de 5% entre 2009 et 2013 - Philippe Huguen - AFP

Le ministre de l'Agriculture veut réduire de 50% l'usage des pesticides d'ici à 2025. Un objectif particulièrement ambitieux puisque l'usage des produits chimiques a augmenté de 5% entre 2009 et 2013.

L'objectif semble ambitieux. Les agriculteurs vont-ils vraiment réussir à réduire de moitié l'usage des pesticides d'ici à 2025? C'est en tout cas ce que souhaite Stéphane Le Foll, qui présente un nouveau plan de lutte vendredi 30 janvier après l'échec du précédent.

"On va fixer l'objectif d'une baisse de 50% en 2025, avec un palier intermédiaire de 25% en 2020", annonce le ministre de l'Agriculture dans un entretien à Libération daté de vendredi. Le ministre refixe donc un objectif de réduction chiffré, alors qu'il avait pris ses distances avec l'objectif fixé par la précédente majorité arguant qu'il fallait changer les modèles de production, plutôt que de poser des buts inatteignables.

Le premier plan Ecophyto, lancé après le Grenelle de l'environnement en 2008, avait l'ambition de réduire "si possible" de 50% l'usage des pesticides d'ici à 2018. Mais il n'était pas sur les bons rails pour y parvenir puisque l'utilisation de produits chimiques en agriculture a au contraire progressé de 5% entre 2009 et 2013. Un sujet qui divisent bien sûr les défenseurs de l'environnement et les agriculteurs.

S'appuyer sur les fermes pionnières du réseau Dephy

Dès mercredi, l'ONG Génération Futures interpellait le ministre lui demandant de "fixer des objectifs de réduction progressifs obligatoires". Et elle l'appelait à passer "enfin à la vitesse supérieure en mettant en place des mesures fiscales réellement dissuasives pour les plus rétifs aux changements". Dans les premières lignes du nouveau plan dessinées dans Libération vendredi, il n'est point question de pénalité fiscale pour les agriculteurs mais de pénalités financières pour les distributeurs de produits phytosanitaires.

Ainsi seront mis en place de façon expérimentale des "certificats d'économie de produits phytosanitaires [CEPP]" qui les obligeront à "baisser de 20% le nombre de doses utilisées sur cinq ans" sous peine d'une pénalité financière sur leurs marges. Ce qui fait qu'"au lieu de vendre un produit, ceux-ci seront incités à vendre plus de services, c'est-à-dire apprendre aux agriculteurs à utiliser la juste quantité ou des techniques alternatives", poursuit le ministre.

Par ailleurs, le ministre compte s'appuyer sur les fermes pionnières du réseau Dephy. D'environ 2.000 aujourd'hui, "on va porter le nombre de ces fermes à 3 .000. Chacune entraînant dix exploitations autour d'elle, on parie sur l'effet tâche d'huile", explique Stéphane Le Foll. Ces fermes ont en effet des résultats concluants puisqu'elle ont "vu l'utilisation des pesticides baisser en moyenne de 12% en 2013", une performance notable quand on sait qu'en moyenne l'usage des pesticides a au contraire bondit de 9% sur l'année.

"Objectifs de réduction aveugle"

Le plan, qui doit être détaillé par le ministre vendredi après-midi, devrait également comporter des mesures pour favoriser le biocontrôle (protection des végétaux par des mécanismes naturels), les agro-équipements (utilisation de services cartographiques, pulvérisateurs performants pour optimiser l'utilisation de pesticides). Le monde agricole et les défenseurs de l'environnement ne manqueront pas de commenter abondamment ce plan, ce qui permettra de savoir s'il apporte une réelle nouveauté sur l'ancien. Et surtout s'il a réussi à faire la synthèse entre les demandes des uns et des autres ou s'il penche plus vers celles des pro-environnement ou des pro-agrobusiness.

Une chose est certaine, les céréaliers ne seront probablement pas satisfaits puisque dès jeudi, ils s'offusquaient de tous "objectifs de réduction aveugle". "L'objectif doit être avant tout de mettre en oeuvre des mesures pour parer les impacts indésirables que peut avoir l'indispensable utilisation des produits phytosanitaires", soulignait Orama - l'Union qui fédère les producteurs de blé, maïs et oléagineux - dans un communiqué. La Fondation Hulot a également tenté de faire entendre sa voix mardi en réclamant des mesures d'interdiction des insecticides néonicotinoïdes, directement mis en cause dans la surmortalité des abeilles.

En 2013, trois substances néonicotinoïdes (clothianidine, imidaclopride et thiaméthoxame) ont été provisoirement interdites au niveau européen pour deux ans pour certaines cultures (maïs, colza, tournesol et coton). Mais d'autres molécules néonicotinoïdes restent autorisées et l'interdiction ne concerne pas les céréales d'hiver. Ce moratoire avait été décidé à la suite d'un avis de l'agence européenne sanitaire (Efsa) en janvier 2013 qui avait reconnu que certains néonicotinoïdes étaient dangereux pour les abeilles, dont les taux de mortalité sont en forte hausse (30%).

D. L. avec AFP