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Comment Red Bull a transformé le petit club de Leipzig en panneau publicitaire géant

Leipzig

Leipzig - Iconsport

Le RB Leipzig s'est qualifié pour les demi-finales de la Ligue des champions où il affrontera le PSG. Un succès fulgurant pour ce club crée de toute pièce il y a 10 ans, et propulsé au sommet par le milliardaire Dietrich Mateschitz, fondateur de la marque Red Bull.

Qu'on ne s'y méprenne pas : "RB Leipzig", ne signifie pas "Red Bull Leipzig". Non, le RB, acronyme de "RasenballSport", se traduit en allemand par "sport de ballon sur gazon." Ce n'est pas faute d'avoir essayé mais la loi allemande interdit le naming des clubs de football. Malin, Dietrich Mateschitz, patron de la célèbre boisson énergisante, a donc quand même réussi à laisser une trace de la marque sur le nom du club par ce subterfuge un peu limite.

Et c'est loin d'être la seule opération de communication du fondateur de Red Bull qui a vu son club se qualifier en demi-finales de la Ligue des Champions, jeudi dernier. En réalité, le club de Leipzig, en Allemagne de l'est, est intimement lié à Red Bull, voire même indissociable, au point que, dans un pays de tradition footballistique, le club a plus de détracteurs que d'admirateurs. En 2016, le club du Dynamo Dresde avait accueilli froidement les rivaux de Leipzig: des slogans critiques et surtout, une véritable tête de taureau (emblème de Red Bull) tranchée et balancée devant leur tribune…

Il faut dire que Dietrich Mateschitz n'est pas adepte des "Traditionsverein", ces clubs emblématiques allemands portés par le Bayern Munich ou le Borussia Dortmund. Le milliardaire a toujours pris le contre-pied en choisissant avant tout de sponsoriser les sports extrêmes et en prenant soin d'inscrire sa marque et son logo partout où il le pouvait. Il suffit de jeter un oeil à la combinaison de Felix Baumgartner, lorsqu'il réussit le plus haut saut en chute libre de l'histoire. 

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- © AFP

Sur le plan marketing, c'est aussi une réussite. Chaque année, Red Bull bat des records de ventes. En 2019, la marque a vendu 7,5 milliards de canettes, soit une hausse de 10,4% par rapport à 2018.

Alors en 2004, Mateschitz finit par s'intéresser aux sports plus "conventionnels". Il rachète ainsi le SV Austria Salzburg, en Autriche, rebaptisé FC Red Bull Salzburg. Le stade sera renommé en Red Bull Arena en 2008 tandis que l'emblème du club reprend tout simplement le logo de la marque. Deux ans après, Mateschitz acquiert le club des MetroStars de New York. Rebelote… "Ce que je veux quand j'investis quelque part, dans une discipline ou un événement sportif, c'est être responsable de A à Z" racontera Mateschitz à L'Equipe.

Indubitablement, le succès est là. Salzburg comme New York affichent d'excellents résultats. Red Bull passe donc à la vitesse supérieure avec le RB Leipzig. Mais la méthode est si controversée que le groupe peine à trouver un club prêt à jouer les panneaux publicitaires. Finalement Dietrich Mateschitz trouve son bonheur: le SSV Markanstädt, petit club amateur de la banlieue de Leipzig. Dix ans et des centaines de millions d'euros plus tard, les voici en demi-finales de Ligue des Champions contre le PSG.

Contourner les règles

Mais la méthode Mateschitz agace les instances européennes du foot. Le milliardaire a, par exemple, été contraint d'abandonner toute fonction dirigeante à Salzbourg pour se mettre en accord avec le règlement. En effet, le 20 septembre 2018, le RB Salzburg et le RB Leipzig finissent par se rencontrer en coupe d'Europe. Le règlement interdisant que deux clubs ayant le même gestionnaire puissent se rencontrer, Mateschitz a donc dû montrer patte blanche et s'effacer. Mais l'homme est malin. Mateschitz créé un comité indépendant qui possédera donc 51% de Salzburg. Evidemment, tous les membres de ce comité sont employés par Red Bull. Cela permet au fondateur de Red Bull de poursuivre sa formidable conquête publicitaire.

Après s'être offert une nouvelle équipe au Brésil en 2019, la marque aux taureaux vise désormais l'Angleterre. Détestée par les supporters, elle connaît déjà la méthode à suivre: un petit club modeste qu'elle fera grimper au sommet. Car sur le plan sportif, Red Bull donne vraiment des ailes.

Thomas Leroy