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Confinement: la justice ordonne à Axa de prendre en charge les pertes d'exploitation d'un restaurateur

Saisi courant avril, le tribunal de commerce de Paris a finalement rendu sa décision ce vendredi: l'assureur devra indemniser le restaurateur à hauteur de deux mois de chiffre d'affaires. Une décision qui pourrait ouvrir une boîte de Pandore...

C'est un petit coup de tonnerre que vient de lâcher le tribunal de commerce de Paris. Saisi en référé courant avril par un restaurateur mécontent, il a finalement ordonné à l'assureur Axa, ce vendredi, d'indemniser le requérant à hauteur de deux mois de chiffre d'affaires. 

Stéphane Manigold, à la tête du groupe Eclore, estimait que l'assureur se soustrayait à ses obligations contractuelles concernant son établissement Le Bistrot d'à côté Flaubert, situé dans le 17e arrondissement de Paris, un des quatre restaurants qu'il dirige avec La Maison Rostang, Substance et Contraste.

Alors que tout le secteur de l'assurance a refusé d'indemniser les pertes d'exploitation causées par la fermeture de ses établissements imposée par la crise sanitaire, la justice vient donc de tordre le cou à ce principe ouvrant, en théorie, la voie de nombreux recours de restaurateurs insatisfaits. 

"Le désaccord sur l’interprétation de la clause perte d’exploitation du contrat de Monsieur Manigold persiste, et fera l’objet d’un débat sur le fond qui n’a pas pu avoir lieu devant le juge des référés" a commenté Axa, qui va donc faire appel de cette décision.

En réalité, le contrat en question était "un contrat spécifique souscrit par quelques centaines de professionnels de la restauration auprès d’un cabinet de courtage" indique l'assureur qui précise que "la très grande majorité des contrats d’Axa France pour les professionnels de la restauration prévoit qu’un événement généralisé comme celui que nous vivons aujourd’hui ne peut entraîner la mise en jeu des garanties contractuelles." 

La prochaine question est donc de savoir si cette décision peut faire tâche d'huile.

Pas d'aléa, pour Axa

Interrogé par l'AFP lors de la saisine, Axa se défendait : "L'assurabilité d'un risque repose sur la mutualisation et l'aléa", insistait l'assureur. Or une fermeture "d'entreprises, de restaurants, de commerces" imposée par un gouvernement n'est pas un "aléa", tandis qu'une pandémie, de "par son caractère systémique et global, empêche toute mutualisation puisque l'ensemble de la population est touchée en même temps". Le secteur travaillait justement avec le gouvernement sur un nouveau régime spécifique pour palier ce "vide" assurantiel.

Les attentes du secteur

Restaurants et cafetiers sauront sauront fin mai s'ils peuvent rouvrir à compter du 2 juin dans les départements classés en "vert". Quelque 55.000 établissements du secteur, cafés, hôtels, restaurants, discothèques - sur un total de 94.000 entreprises touristiques - ont déjà obtenu un prêt garanti par l'État.

"Ma première pensée va à tous les chefs d'entreprises qui avaient perdu espoir" a indiqué Stéphane Manigold sur BFM Business. "Il y a une opacité assez terrible sur ces contrats (…) Nous sommes nombreux et je suis convaincu que les avocats de ce pays se feront une joie d'aider les restaurateurs."

Vendredi, une soixantaine de chefs, dont plusieurs étoilés comme Gérald Passédat, Marc Veyrat, Michel Saran et Gilles Goujon, mettent en avant plusieurs revendications, dont une demandant que les assurances prennent "impérativement en charge la perte d'exploitation pour tous à hauteur de 15 à 25%", et lancent "un fonds de garantie +catastrophe sanitaire+", dans un courrier transmis à l'AFP.

Thomas Leroy avec l'AFP