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Le Crédit Agricole paie au prix fort sa sortie du bourbier grec

Le Crédit Agricole va encore devoir injecter 550 millions d'euros dans Emporiki avant de céder cette filiale grecque

Le Crédit Agricole va encore devoir injecter 550 millions d'euros dans Emporiki avant de céder cette filiale grecque - -

La banque française a annoncé, ce lundi 1er octobre, être entrée en négociations exclusives avec la banque grecque Alpha Bank, pour lui céder sa filiale hellénique Emporiki, qui lui a coûté jusqu' ici 10 milliards d’euros. Mais ce retrait de Grèce ne se fera pas à n’importe quel prix.

Cela pourrait être la fin du long feuilleton grec du Crédit Agricole. Ce lundi 1er octobre, la banque mutualiste française a annoncé être entrée en négociation exclusive avec l’établissement grec Alpha Bank, pour lui céder Emporiki, sa filiale grecque maudite. Les deux autres banques candidates au rachat étaient Eurobank et la Banque nationale de Grèce.

Il s’agit pour la banque dirigée par Jean-Paul Chifflet de tirer un trait sur une acquisition qui lui a fait perdre plus de 10 milliards d’euros, depuis son achat en 2006. Selon le communiqué du groupe, les deux parties espèrent une cession avant le 31 décembre, sous réserve du feu vert des autorités compétentes.

Mais le Crédit Agricole va encore devoir mettre la main à la poche pour se défausser de son épine hellénique. D’abord le prix de la transaction n’est que d’un euro symbolique. Ensuite, la banque française va renflouer une énième fois le capital de sa filiale grecque, à raison de 550 millions d’euros, avant de la céder. Ce qui porte à 2,85 milliards d’euros ses injections de capitaux dans Emporiki depuis le début de l’année.

Enfin le Crédit Agricole va garder un pied en Grèce via deux engagements. Il va souscrire, pour 150 millions d’euros, à des obligations convertibles en actions émises par Alpha Bank et "remboursables sous conditions et à l’initiative" de Crédit Agricole. Autrement dit, la banque française conserverait une infime possible participation dans Emporiki. De plus, la banque verte va maintenir sa ligne de crédit accordée à Emporiki, qu’elle réduit toutefois de 1,9 milliard d’euros à 700 millions d’euros.

La Bourse salue l'annonce

Ces conditions étaient le prix à payer pour tourner presque définitivement la page d’un des plus grands ratés du Crédit Agricole. En mai, lors de la dernière assemblée générale, les actionnaires avaient montré des signes d’impatience sur ce dossier. L’un d’entre eux parlait ainsi d’un "puits sans fond", un autre avait même pris à partie la direction du groupe pour évoquer ce sujet.

Dans le communiqué, le Crédit Agricole se veut toutefois rassurant et indique que la cession d’Emporiki va lui permettre de se rapprocher des règles de fonds propres exigées par Bâle III (voir encadré), le nouveau cadre de régulation des banques. Mais il est sûr qu’Emporiki restera à jamais une plaie dans le bilan de la banque verte. Une plaie qui n’a même pas encore commencé à cicatriser.

En Bourse, les investisseurs ont salué l’annonce. A l’ouverture, le titre Crédit Agricole gagnait plus de 2%. Pour Thibault François, de Fastea Capital, interviewé dans l'émission Integrale Placements de BFM Business cette hausse s'explique car elle rassure les marchés en "enlevant les incertitudes" sur ce dossier grec.

Le titre de l'encadré ici

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Pourquoi la vente d’Emporiki rapproche le Crédit Agricole de Bâle III

Le cadre défini par Bâle III demande aux banques d’avoir un ratio de fonds propre suffisant pour faire face aux risques détenus, à raison de 9%. Pour atteindre ce seuil, il y a deux possibilités : augmenter ses capitaux en mettant de côté les bénéfices et les provisions non utilisés (le numérateur), ou tout simplement diminuer les engagements risqués, c’est-à-dire le dénominateur.

Les banques françaises, ont depuis quelques temps choisi cette dernière solution. C’est le cas notamment de la Société Générale qui a vendu sa filiale américaine de gestion d’actifs TCW en août dernier, qui lui a permis de se défausser d’actifs risqués gourmands en capitaux. Le Crédit Agricole va pouvoir faire de même en se débarrassant d’Emporiki, à raison, selon Le Figaro, de 18 milliards d’euros d’actifs risqués en moins.

Le Crédit agricole avait indiqué visé les 10% de ratio de fonds propres/risques, à fin 2013. La cession d’Emporiki va donc l’aider à atteindre cet objectif.

Julien Marion