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Culture loisirs

La culture manga, méprisée au Japon, adulée en dehors

80.000 visiteurs sont attendus pour la 17ème édition du "Paris manga & sci-fi show", qui se tient ce week end

80.000 visiteurs sont attendus pour la 17ème édition du "Paris manga & sci-fi show", qui se tient ce week end - -

A l'occasion du "Paris manga & sci-fi show", interview de Angel Nguyen Van Ho et Matthieu Leulier, dirigeants du groupe Elokami spécialisé dans la culture asiatique, qui détient une salle de concert, une agence d'organisation de tournées, et une société de production audiovisuelle, qui fournit des émissions aux chaînes Mangas et J One.

Quelles sont les origines de la culture manga en France?

Cela date des années 1970. Des pionniers comme Dominique Veret ont voulu populariser la culture asiatique en France. Le vrai décollage s'est fait en 1978 avec la diffusion de Goldorak. Les chaînes françaises -notamment le Club Dorothée de TF1- se sont ensuite mis à diffuser beaucoup d'anime, essentiellement car ils étaient vendus pas cher -ils avaient déjà été largement amortis sur le marché japonais.

Quand TF1 a arrêté le Club Dorothée, les jeunes se sont tournés vers les mangas papier, puis vers les groupes de musique qui avaient composé les génériques des anime.

Aujourd'hui, les collégiens et les lycéens connaissent les groupes de rock japonais aussi bien que les groupes américains.

Comment cette culture est considérée au Japon?

Elle est mal vue et peu médiatisée. C'est considéré comme de la sous-culture destinée aux geek introvertis qui restent enfermés chez eux. Ce n'est pas un genre noble. Les japonais pensent que cela donne une mauvaise image de leur pays, et considèrent que la musique doit rester un art.

Le paradoxe est que c'est ce qui marche le mieux à l'étranger, sans qu'aucun effort ait été fait pour cela.

La musique qui marche commercialement au Japon, c'est la J-pop, du easy listening grand public et pas très subtil, produit de manière industrielle. Les chanteurs sont appelés des idols et sont sponsorisés par des marques. Mais cela s'exporte très mal.

Quelle est l'attitude des pouvoirs publics?

Le gouvernement a créé en 2010 une agence publique, Cool Japan, destinée à promouvoir la culture japonaise.

Il voulait ainsi imiter le gouvernement sud coréen, qui investit beaucoup dans la promotion à l'étranger de la K-pop, la musique pop coréenne, et avec beaucoup plus de moyens.

La stratégie des coréens est différente: dans la K-pop, les ventes à l'export font clairement partie du modèle économique.

Les salons consacrés à la culture manga se multiplient en France. Quelle est leur origine?

A l'origine, c'était des conventions organisées dans des écoles d'ingénieur (Epita) ou de commerce (ISC).

Aujourd'hui, les deux principaux salons sont Japan Expo et le Paris Manga Show. Mais Japan Expo est devenu très commercial: les trois quarts des stands sont des boutiques. Les exposants japonais sont aussi assez déçus des faibles retombées: donner un concert à Japan Expo n'ouvre pas ensuite les portes de l'Europe, comme ils l'espéraient...

Propos recueillis par Jamal Henni