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Des actionnaires de Scor prêts à vendre à Covéa

Le PDG de Scor, Denis Kessler, fait face à l'offensive de l'assureur Covéa.

Le PDG de Scor, Denis Kessler, fait face à l'offensive de l'assureur Covéa. - FABRICE COFFRINI / AFP

Le réassureur reste la cible des mutuelles Maaf, MMA et GMF. Il martèle son indépendance pour faire monter les enchères. Plusieurs de ses actionnaires le poussent à négocier pour obtenir un prix attractif.

La course contre la montre est engagée. Il y a un mois, le réassureur Scor (qui assure les assureurs) a rejeté une offre de rachat de Covéa qui regroupe les mutuelles d’assurances Maaf, MMA et GMF. Sauf que son assaillant est aussi son premier actionnaire : il détient 8% du capital de Scor. Le loup est dans la bergerie. Jusqu’en avril 2019, l’assureur mutualiste ne peut pas racheter des actions pour renforcer sa présence au capital de Scor. Après, tout est possible…

Depuis un mois, le PDG Denis Kessler martèle qu’il souhaite rester indépendant. Mais le petit monde de l’assurance bouillonne. « Il cherche un chevalier blanc mais il n’y en a pas beaucoup » explique le dirigeant d’un assureur français. « Nous ne cherchons pas de partenaires et souhaitons rester indépendant » insiste un porte-parole de Scor. Jeudi, la famille Agnelli, actionnaire du réassureur Partner Re, a assuré « ne pas être intéressé » par Scor. Preuve que le dossier Scor a bel et bien été étudié par les italiens. Partner Re faisait pourtant figure de partenaire potentiel.

Un chevalier blanc difficile à trouver

Selon un bon connaisseur du dossier, les leaders mondiaux Munich Re et Swiss Re n’ont pas besoin de Scor. Surtout, cela conduirait le PDG Denis Kessler à renoncer à son indépendance qu’il brandit pourtant face à l’assaut de Covéa. Et les pouvoirs publics français privilégieraient une solution française plutôt que de vendre le seul réassureur tricolore à un étranger.

Reste l’option des assureurs qui se développent petit à petit dans la réassurance, notamment sur les risques industriels. Axa, qui vient de racheter XL, « n’a pas besoin d’y investir davantage, et surtout pas en France » balaie un haut dirigeant de l’assureur avant de trancher net : « les assureurs ne sont pas très enthousiaste à l'idée d'investir dans la réassurance ». La rumeur court que Scor chercherait à séduire Allianz. « Ce serait surprenant qu’on se lance dans une telle bataille », explique un proche de l’assureur allemand qui travaille beaucoup avec son compatriote et leader mondial Munich Re.

L’issue semble inévitable pour Scor. Covéa a mis la barre assez haute : 8,3 milliards d’euros en cash. L’assureur mutualiste ne cache pas qu’avec 10 milliards d’euros d’excédents de fonds propres, il a encore une marge de progression. Les actionnaires de Scor, essentiellement des fonds de pension ou d’investissement étrangers, l’ont bien compris. Le fonds activiste Amber a mis la barre encore plus haute : 9,6 milliards ! Un prix très élevé qui montre toutefois bien qu' « avec un meilleur prix, les actionnaires de Scor sont prêts à vendre » reconnaît un proche du groupe.

Le jackpot de Denis Kessler

Par l’intermédiaire de banquiers, Covéa a testé l’appétit des plus grands d’entre eux. Allianz Global Investors, Alecta et Tweedy, qui pèsent 12% du capital, seraient prêts à vendre si Covéa rajoutait 500 millions d’euros dans la balance. Ce qui leur permettrait de doubler leur mise. « Le message qu’on a envoyé à Denis Kessler est clair : si Covéa augmente son prix, nous sommes prêts à discuter avec eux » confirme un fonds actionnaire.

D’autant qu’un point non négligeable entre en ligne de compte. Patron de Scor depuis 2002, Denis Kessler a accumulé 1,3 million d’actions qui valent 56 millions d’euros au prix de l’offre de rachat de Covéa. Selon un banquier, en prenant les actions de performances et les stock-options, ses primes atteindraient 94 millions d’euros. Contacté à plusieurs reprises, le PDG de Scor n’a pas souhaité nous répondre. Mais un de ses actionnaires conclut : « ses intérêts sont alignés avec les nôtres ». Tout est une question de prix.