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Devises: 6 banques mises à l'amende pour manipulations

Les cambistes se concertaient sur des forums pour s'entendre sur leur position

Les cambistes se concertaient sur des forums pour s'entendre sur leur position - PARK JI-HWAN - AFP

Barclays, UBS, Citigroup, JPMorgan Bank of America et Royal Bank of Scotland ont écopé nouvelles amendes de près de 6 milliards de dollars infligées par le département américain de la Justice. Il leur est reproché d'être intervenu illégalement sur le marché des changes.

Après de longs mois de négociations tendues, les autorités américaines et britanniques ont annoncé mercredi avoir infligé de nouvelles amendes de près de 6 milliards de dollars à six grandes banques internationales pour avoir notamment manipulé les taux de change entre 2007 et 2013.

Ces nouvelles pénalités financières portent à plus de 9 milliards de dollars la facture totale acquittée jusqu'ici par les grands établissements dans cet énième scandale qui ternit l'image de la finance, selon le département américain de la Justice (DoJ).

Les banques américaines Citigroup et JPMorgan Chase, les britanniques Barclays et Royal Bank of Scotland (RBS) ont également plaidé coupable, ce qui devrait les obliger à obtenir des exemptions de la part de nombre de régulateurs pour continuer par exemple à gérer les actifs de fonds de pension par exemple.

Outre la pénalité financière, la banque suisse UBS a perdu son immunité obtenue en 2012 la préservant d'éventuelles poursuites judiciaires. En conséquence, l'établissement helvète a dû plaider coupable pour avoir manipulé le taux d'intérêt interbancaire Libor.

Bank of America ne s'acquittera, elle, que de la somme réclamée par les autorités pour dédommager les clients lésés. L'amende totale liée au seul volet des manipulations de l'énorme marché des changes sur lequel transitent chaque jour quelque 5.300 milliards de dollars, dont 40% via la City de Londres, s'élève à 5,65 milliards de dollars. Barclays (60 millions de dollars) et UBS (203 millions) ont écopé des amendes supplémentaires concernant le Libor.

"Pile ou face"

Les régulateurs reprochent aux cambistes de ces grands établissements d'avoir utilisé des forums de discussion sur internet et des messageries instantanées pour se concerter de façon indue afin d'infléchir un taux de référence du marché des changes.

En l'espèce, c'est le taux entre l'euro et le dollar qui a été faussé, selon les autorités, qui parlent d'un salon de discussion baptisé "cartel" réunissant des traders de Citigroup, JPMorgan, UBS, Barclays et Royal Bank of Scotland (RBS).

"Ils ont joué à face je gagne, pile tu perds", dénonce le régulateur des services financiers de New York, Benjamin Lawsky dans un communiqué. Dans un échange entre un employé et un trader de Barclays on peut lire: - "Si tu ne triches pas, c'est que tu n'as pas essayé" - "Oui, moins il y a de concurrence, mieux c'est", rétorque le trader à l'employé.

Barclays lourdement sanctionné

La banque britannique Barclays est celle qui va s'acquitter de la plus forte amende, soit un total de 2,4 milliards de dollars. Outre le DoJ et Benjamin Lawsky, les autres régulateurs concernés sont: le régulateur des matières premières américain CFTC, la banque centrale américaine (Fed) et le régulateur britannique FCA.

A l'exception de Bank of America, les cinq autres établissements ont accepté une période de mise à l'épreuve de trois ans au cours de laquelle ils devront tenir les autorités informées régulièrement de leurs activités.

Barclays va aussi licencier huit banquiers impliqués dans les malversations, a indiqué Benjamin Lawsky. Très critiqué par des élus et le grand public qui lui reprochent de ne pas avoir traduit en justice un seul grand nom de Wall Street, dont les errements sont à l'origine de la crise de 2008, le DoJ a insisté mercredi sur le fait que ce vaste accord ne l'interdisait pas d'engager des poursuites judiciaires individuelles contre des traders.

"La reconnaissance des faits ne nous empêche pas de lancer des actions au pénal contre les individus responsables des malversations", a averti la ministre de la Justice Loretta Lynch au cours d'une conférence de presse.

Des traders déjà licenciés

"Il est plus important que jamais de mettre en place une culture de la responsabilité individuelle sur le marché", a réagi Marshall Bailey, président de l'ACI, une des principales associations regroupant les intervenants sur le marché des changes.

Ces amendes ne devraient pas beaucoup peser dans les comptes de ces banques puisqu'elles ont déjà mis de côté de l'argent destiné à régler les différents litiges auxquels elles font face.

Les réserves juridiques étaient de 3,1 milliards de dollars fin avril chez Barclays, de 5,5 milliards chez JPMorgan à fin mars et de 4 milliards chez Citigroup. Le scandale des marchés des changes touche la plupart des grandes banques mondiales, dont les françaises BNP Paribas et Société Générale. Des traders ont déjà été licenciés.

J.M. avec AFP