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Dieselgate: pourquoi Volkswagen n'indemnisera pas ses clients français... pour l'instant

Le 28 juin, les propositions d'indemnisation et de rappel seront déposées par VW devant la justice américaine, avant une audience prévue le 26 juillet pour acter le dispositif.

Le 28 juin, les propositions d'indemnisation et de rappel seront déposées par VW devant la justice américaine, avant une audience prévue le 26 juillet pour acter le dispositif. - JOHN MACDOUGALL / AFP

Les propositions d’indemnisation de propriétaires des voitures diesel doivent être déposées par le constructeur allemand auprès des autorités américaines le 28 juin avant minuit. Qu'ils soient français ou allemands, les clients européens ne toucheront, eux, pas un centime. Explications.

Neuf mois après avoir éclaté, le dieselgate est plus présent que jamais chez Volkswagen. Après une assemblée générale des actionnaires houleuse ce mercredi 21 juin, et alors que plusieurs dirigeants et anciens dirigeants sont sous le coup d’une enquête, c’est une nouvelle journée délicate qui s’annonce le 28 juin pour le groupe allemand.

Mardi prochain, à minuit, Volkswagen devra avoir transmis à la cour de San Francisco son plan pour indemniser les propriétaires américains de voitures dont le moteur est équipé d’un logiciel truqué. Le coût réel du scandale pour VW aux Etats-Unis pourra alors être plus précisément évalué. Dès le 28 avril, des "compensations importantes" avaient en effet été promises aux 480.000 clients américains. Et américains seulement. Les clients européens ne devraient, eux, pas toucher un centime.

Un rachat de véhicule possible

Aux États-Unis, le respect des seuils d’émissions d'oxyde d'azote (entre autres) est contractuel. Comme Volkswagen n’a pas respecté la norme concernant ces émissions et a utilisé un logiciel truqueur, l’homologation a été retirée à tous les véhicules concernés, qui ne respectent donc plus le contrat signé à l’achat par le client et le concessionnaire. "Le produit n’est plus conforme, il est donc logique qu’il y ait indemnisation, voire rachat", résume un spécialiste du secteur automobile. Aux États-Unis, les clients recevront tous une indemnisation, et Volkswagen devrait proposer le 28 juin de remettre aux normes les voitures, via un rappel, ou alors de racheter purement et simplement les voitures.

Ni indemnisation, ni rachat en Europe

La situation en Europe est toute autre. Aucune indemnisation, ni aucun rachat de voitures ne sont prévus. "Il n’y a pas de préjudice pour les clients", explique-t-on chez VW. Pour le constructeur, les émissions d’oxyde d’azote ne sont pas contractuelles, l'homologation n'a pas été retirée, les véhicules sont donc toujours conformes. "Nous nous engageons bien entendu sur la procédure de rappel, entièrement prises en charge dans notre réseau", poursuit un porte-parole du groupe. Sur les 11 millions de voitures concernées au total, 3,7 millions ont déjà reçu l’aval du Kraftfahrt-Bundesamt (KBA, les autorités allemandes des transports) pour repasser par la case garage.

Combat judiciaire à venir en Europe?

Le protocole officialisé le 28 juin pourrait cependant faire bouger quelques lignes. C’est en tout cas ce qu’espèrent les tenants des futures différentes class action européennes. Une quarantaine d’action en justice ont été lancées en France, et différents avocats tentent de rassembler les plaignants. "Volkswagen joue sa marque dans ce dossier, explique Frédéric Pelouze, ex-avocat qui a co-fondé Weclaim, une plateforme de litiges en ligne qui regroupe des propriétaires en Europe pour monter une class action. Chez Volkswagen, ce qui a de la valeur, c'est la marque. Cette marque est aujourd’hui associée au plus grand mensonge planétaire, ce qui est insupportable pour Volkswagen et les conduira à indemniser leurs clients pour ne pas les perdre".

Des pressions viendraient aussi de la commission européenne pour favoriser une indemnisation des clients de ce côté de l'Atlantique. Frédéric Pelouze compte lui sur l’accord américain pour rassembler plus de plaignants. En avril, la somme de 5000 dollars versée à chaque propriétaire avait été évoquée aux Etats-Unis. "C'est une fraude globale qui appelle une réponse globale: Volkswagen ne peut pas refuser d’indemniser les européens et dans le même temps offrir plusieurs milliers de dollars à chaque américain", poursuit Frédéric Pélouze. Le groupe allemand a déjà provisionné 16,2 milliards d’euros, pour couvrir la campagne de rappel, mais aussi d’éventuelles pénalités judiciaires.

P. Ducamp