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Eiffage veut monter au capital d’Eurotunnel

Fin 2018, Eiffage a pris 5% de Getlink, la société qui exploite le tunnel sous la Manche.

Fin 2018, Eiffage a pris 5% de Getlink, la société qui exploite le tunnel sous la Manche. - Philippe HUGUEN / AFP

Le groupe est prêt à racheter des participations d’autres actionnaires de Getlink pour en devenir le premier d’entre eux. Avant d’en prendre le contrôle ?

Eiffage est sur tous les fronts. Le groupe de BTP saura dans quelques semaines s’il a été retenu pour racheter l’aéroport de Toulouse à un groupe chinois. Il est le grand favori de cet investissement de plus de 500 millions d’euros. Mais en parallèle, il pourrait aussi bientôt monter au capital de Getlink, la société qui exploite le tunnel sous la Manche. La concession est exceptionnellement longue puisqu’elle dure jusqu’en 2086 !

Quelques jours avant Noël, Eiffage en a racheté 5% du capital. Depuis, silence radio. Mais pour les connaisseurs des deux sociétés, il n’y aucun doute : le groupe de BTP lorgne l’ancien Eurotunnel. « Eiffage n’est pas là pour regarder passer les trains, ironise un proche du groupe. Ils veulent encore monter au capital ».

L’entreprise a d’ailleurs souligné qu’elle se voyait comme un « investisseur de long terme ». Et n’a pas l’habitude de prendre des participations minoritaires dans des sociétés sans en prendre le contrôle. Même si Getlink vaut 6 milliards d’euros - autant qu’Eiffage -, le groupe de BTP est peu endetté et dispose de 3 milliards d'euros de liquidités.

Un crédit d’impôt de 2,7 milliards d’euros

De son côté, Getlink dispose dans ses comptes d’un crédit d’impôt de 2,7 milliards d’euros, utilisable en France. Un avantage fiscal hérité des nombreuses années de pertes quand Eurotunnel était au plus mal. Une manne qui renforce l’intérêt d’Eiffage. S’il rachetait 100% de Getlink, il pourrait ainsi en bénéficier pour réduire l’imposition des profits élevés de ses autoroutes APRR.

Le marché s’attend à une montée d’Eiffage, dont le PDG ne semble pas cacher ses ambitions en privé. Selon nos informations, Benoit de Ruffray a récemment souligné lors d’une réunion devant des investisseurs qu’il « était prêt à racheter un bloc d’actions Getlink à un actionnaire », assure un proche. Contactés, les deux groupes n’ont pas souhaité commenter.

Le fonds activiste TCI prêt à sortir ?

Tous les yeux se tournent alors vers le fonds d’investissement TCI, qui détient 11% de Getlink depuis un peu plus d’un an. Entré au capital autour de 9 euros l’action, elle en vaut aujourd’hui 13,5 euros. « Dès qu’elle sera à 15 euros, ils sortiront » assure un bon connaisseur du dossier.

Le rachat de la part de TCI permettrait à Eiffage de détenir 16% de Getlink et de se hisser au rang de premier actionnaire de l’ex-Eurotunnel. Il dépasserait en tout cas l’italien Atlantia, qui est entré il y a un an à hauteur de 15,5% du capital.

Personne ne connaît ses réelles intentions. Au départ, le groupe italien semblait viser un rapprochement entre Getlink et les autoroutes Sanef qu’il vient de racheter à l’espagnol Abertis. Mais l’effondrement du pont de Gênes, dont il est concessionnaire, rend illisible ses intentions.

Pour la direction de Getlink, le choix semble en tout cas fait. Le PDG privilégie un partenariat avec Eiffage dans les activités ferroviaires. Jacques Gounon se verrait bien gérer la maintenance des lignes de TGV d’Eiffage comme celle entre Le Mans et Rennes. Mais, selon nos informations, il ne souhaite pas voir Eiffage racheter la totalité du groupe qu’il dirige.

On n’en est pas là. Pour le groupe de BTP, l’objectif est de préparer l’avenir de long terme. Comme son rival Vinci, il souhaite accélérer dans les concessions. Celle des autoroutes APRR arriveront à leur terme en 2035. D’ici là, il va se développer dans les aéroports et le ferroviaire.