BFM Business
Energie

Engie prépare sa scission en douceur

Le groupe dévoile sa stratégie aux investisseurs.

Le groupe dévoile sa stratégie aux investisseurs. - ERIC PIERMONT / AFP

Le groupe présente ce jeudi sa stratégie aux investisseurs. Des inflexions nettes pour se désengager des activités régulées et accélérer sur les métiers de services en croissance. L’Etat prépare sa sortie du capital.

Doucement mais sûrement, Engie trace sa feuille de route. Le groupe énergétique présente ce jeudi sa stratégie aux investisseurs. Après trois années marquées par 15 milliards d’euros de cessions d’actifs, il est temps de clarifier le chemin vers lequel s’oriente le groupe. Sa stratégie s’inscrit à l’aune d’une étape clé pour le groupe : la sortie progressive de l’Etat actionnaire. Il détient encore 24% du capital mais la loi Pacte de Bruno Le Maire va lui permettre de tout vendre.

Du coup, Engie va mener deux inflexions en parallèle. D’abord sortir des infrastructures gazières dont les prix sont régulés par l’Etat. Ensuite pousser les feux sur les autres métiers en croissance : énergies renouvelables, efficacité énergétique… Pour les syndicats, c’est une « scission qui ne dit pas son nom » entre les activités régulées d’Engie et les autres. Comme ses concurrents allemands E.On et RWE l’ont fait il y a quelques années.

un « pôle public » de l’énergie

La loi Pacte du ministre de l’Economie autorise Engie à ouvrir davantage le capital de sa filiale de transport de gaz GRT Gaz. Au bout du compte, Engie n’en détiendra plus que 25% aux côtés de la Caisse des Dépôts (25%). L’autre moitié du capital devrait être ouverte à des partenaires européens dans le cadre d’un rapprochement de GRT Gaz avec ses homologues allemand ou autrichien. Une autre filiale d’Engie spécialisée dans le stockage de gaz, « Storengy, » pourrait aussi rejoindre GRT Gaz pour former un « pôle public » explique un haut dirigeant du groupe. « En tout cas, les deux entreprises sont stratégiquement très liées » ajoute un autre. Déjà, en 2017, Engie avait transféré sa filiale de gaz naturel liquéfié (GNL) Elengy à GRT Gaz comme préambule du regroupement de toutes les infrastructures gazières sous le même toit. Plusieurs bons connaisseurs de l’entreprise estiment qu’à horizon de 3 ans, la Caisse des Dépôts pourrait reprendre les parts d’Engie pour que le groupe sortent définitivement des métiers régulés.

Pour les autres métiers d’Engie, l’objectif sera de grossir. Dans les énergies renouvelables, la stratégie sera plutôt de vendre aux grandes entreprises et aux collectivités locales des projets clé en main. Un axe de métiers sur lequel le groupe réalise déjà 15 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Du réseau de chaleur ou de froid à la centrale solaire pour alimenter des sites industriels, Engie concevra, installera et fournira l’électricité. Ces projets personnalisés permettent de dégager plus de marges. L’idée est surtout d’en terminer à la course à la taille en achetant le plus de parc solaire ou éolien. Cette stratégie consomme trop de capitaux et nécessitent trop d’endettement pour être rentable.

L’Etat bientôt à 15% ?

Engie a aussi décidé de faire le tri dans ses implantations géographiques. Présent dans 70 pays, il devrait sortir d’une trentaine de pays où il ne dispose que de petites filiales. Le groupe conserverait une présence de poids dans une vingtaine de pays et une vingtaine de grandes mégapoles.

Au bout du compte, l’ancien Gaz de France entame un virage stratégique plus important qu’il n’y parait. Engie va quitter le monde régulé qui nécessitait de signer de grands contrats d’approvisionnement de gaz, comme avec le russe Gazprom, pour vendre grâce à de généreux tarifs réglementés par l’Etat. Ces tarifs vont d’ailleurs disparaître en 2023.

Du coup, l’Etat actionnaire baissera encore sa participation dans le groupe. Selon un administrateur, elle pourrait rapidement descendre à 15%, comme chez Renault ou Air France, après le vote de la loi Pacte qui l'y autorisera. Pour accompagner cette prise de recul, l’Etat va déjà réduire sa présence au conseil d’administration d’Engie. Selon nos informations, il ne disposera plus que de trois sièges après l’assemblée générale de mai prochain contre quatre aujourd’hui. Le conseil en profitera pour réduire le nombre de ses membres qui passeront de 19 à 14.