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Etats-Unis: un marchand de vins condamné pour une fraude monumentale

Dans sa cave, Rudy Kurniawan reproduisait des étiquettes de grands crus pour les coller sur des bouteilles de moindre qualité.

Dans sa cave, Rudy Kurniawan reproduisait des étiquettes de grands crus pour les coller sur des bouteilles de moindre qualité. - -

Rudy Kurniawan, un Indonésien de 37 ans, avait amassé plusieurs dizaines de millions de dollars en revendant des vins contrefaits. Mais il a été rattrapé par la justice américaine, qui l'a condamné à 10 ans de prison.

Il avait beaucoup de talent, de mémoire, et d'appétit pour l'argent. Les deux premiers l'ont conduit à amasser plusieurs dizaines de millions de dollars, le troisième directement à la case prison.

Un temps porté aux nues comme l'un des cinq plus grands experts en vins au monde, Rudy Kurniawan, un Indonésien de 37 ans, a en effet été condamné à 10 ans de réclusion par la justice américaine, jeudi 7 août.

Grâce à un excellent palais, une mémoire prodigieuse des vins et un atelier de contrefaçon de haute volée, l'homme s'était construit une réputation mondiale. Il revendait en fait comme des grands crus authentiques des mélanges de vins de moindre qualité.

Une "manipulation des marchés américain et internationaux"

"C'était une fraude économique très sérieuse, une manipulation des marchés américain et internationaux", a relevé le juge Richard Berman. Ce dernier a identifié sept victimes, à qui Rudy Kurniawan devra en outre payer près de 28,5 millions de dollars pour réparer les pertes occasionnées.

Lors du procès fin 2013, l'accusation avait produit une multitude d'éléments accablants contre l'ancien marchand de vins, accusé d'avoir monté chez lui, à Arcadia en Californie, un véritable laboratoire de contrefaçon, avec fausses bouteilles, fausses étiquettes par milliers, cire, tampons, capsules, bouchons, cahiers de notes, et formules de mélange écrites à même des bouteilles.

A partir d'une étiquette authentique, il changeait l'année, parfois d'un seul chiffre, ajoutait un tampon, un numéro de série... et imprimait le tout en haute résolution pour les recoller sur ses fausses bouteilles.

Une ascension fulgurante

Rudy Kurniawan "voulait faire partie du club" des collectionneurs et experts en vins rares, avait plaidé son avocat Jerome Mooney, affirmant que dans ce monde des grands crus anciens, qui se vendent parfois des milliers de dollars la bouteille, la contrefaçon était "endémique".

Apparu sur le devant de la scène en 2002 et surnommé "Dr Conti", en raison de sa passion pour le Romanée-Conti, il avait réussi en quelques années une ascension fulgurante. D'une générosité sans limites, il régalait les collectionneurs et experts de ses meilleures bouteilles.

Ce faussaire prolifique avait réussi à contrefaire des grands Bourgogne de la Romanée-Conti, du Domaine Ponsot, du domaine Roumier, et certains grands vins de Bordeaux comme les Château Petrus, vendus à des prix qui avaient de quoi faire tourner la tête des jurés: six bouteilles de Bourgogne Bonnes Mares 1962 pour 35.000 dollars. Un magnum de Romanée-Conti 1979 pour 7.000 dollars. Un jéroboam (bouteille de 3 litres) de La Tache, Domaine de la Romanée-Conti pour 48.000 dollars...

10 millions de dollars de dettes en une année

Grâce à ses gains, Rudy Kurniawan menait la grande vie, dépensant des millions de dollars par an, collectionnant les montres, les voitures et les oeuvres d'art. Mais il avait aussi contracté pour plus de 10 millions de dollars de dettes pour la seule année 2007.

Dans son réquisitoire, l'accusation avait décrit un menteur poussé par l'appât du gain, qui "avait toujours besoin de plus d'argent".

Rudy Kurniawan avait commencé à éveiller des soupçons en avril 2008, quand il avait proposé aux enchères à New York un lot de 97 bouteilles de Bourgogne du Domaine Ponsot, estimé entre 440.000 et 602.000 dollars. Seul problème, l'une des bouteilles était datée de 1929, alors que le domaine n'a commencé la mise en bouteille qu'en...1934.

L'Indonésien avait malgré tout réussi à noyer le poisson et à poursuivre ses activités jusqu'à 2012, quand il a été définitivement confondu et arrêté.

Y. D .avec AFP