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Exclusif: Bercy enquête sur Apple

La firme à la pomme est dans le collimateur des autorités françaises et européennes

La firme à la pomme est dans le collimateur des autorités françaises et européennes - -

La Direction de la concurrence et de la répression des fraudes de Bercy enquête sur les conditions imposées par l'Américain aux opérateurs mobiles qui revendent l'iPhone.

Apple est dans le collimateur de Bercy. La DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a lancé récemment une enquête sur le constructeur californien.

Selon des sources concordantes, cette enquête a été commanditée par Pierre Moscovici, Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin, apparemment soucieux de rééquilibrer le rapport de force entre les opérateurs et le californien.

Précisément, l'enquête porte sur les conditions de commercialisation de l'iPhone imposées aux opérateurs mobiles. Les limiers de Bercy s'intéresseraient à peu près toutes les clauses dictées par la firme à la pomme: obligation de favoriser l'iPhone par rapport aux autres appareils, promesse d'acheter certains volumes, etc.

Conditions léonines

En effet, il faut savoir qu'Apple, en position de force, en profite pour imposer des conditions léonines aux opérateurs. Ces conditions sont secrètes, et les opérateurs ont interdiction d'en parler. Mais en 2008, elles avaient été révélées lors d'une enquête de l'Autorité de la concurrence, et la plupart sont toujours d'actualité.

Ainsi, Apple impose un prix de vente maximal, ce qui plafonne la marge que l'opérateur réalise sur la revente d'un iPhone. Cette marge, qui était de 8,5% en 2008, aurait encore diminué depuis.

En outre, le californien oblige les opérateurs à financer des campagnes de publicité à la gloire de l'iPhone -ces spots de pub où le nom de l'opérateur apparaît brièvement à la fin. En 2008, Orange avait indiqué avoir dépensé 7,8 millions d'euros en ce sens.

Surtout, l'opérateur doit s'engager à favoriser l'iPhone par rapport aux autres terminaux. Dans les boutiques, "les conditions, les dispositions et les commissions" versées aux vendeurs doivent être "identique ou plus favorables" pour l'iPhone. Et la subvention accordée sur un iPhone par l'opérateur devait être "au moins 20% supérieure" à celle proposée sur les autres téléphones.

Multiples enquêtes

Paris n'est pas le seul à enquêter sur le sujet. En mars, le New York Times avait indiqué que des opérateurs -apparemment français- avaient saisi la Commission européenne. Et fin mai, le Financial Times avait ajouté que Bruxelles avait envoyé un questionnaire aux opérateurs européens, soupçonnant des violations du droit de la concurrence.

Dans le collimateur de Bruxelles: les même clauses que précédemment, mais aussi l'interdiction d'utiliser l'iPhone 5 pour recevoir la 4G, ou encore l'obligation d'acheter un certain volume d'appareils fixé par Apple.

Parallèlement, l'Autorité de la concurrence française mène des enquêtes sur deux autres aspects: l'App Store (où elle s'est auto-saisie) et les relations avec les grossistes et détaillants (suite à une plainte d'eBizcuss qui porte sur tous les produits Apple).

Le volume d'iPhone vendus en France est aussi secret. Mais, selon des sources industrielles, il s'en serait écoulé près de 3,3 millions d'unités en 2011. Sachant qu'un iPhone rapporte en moyenne 643,6 dollars à Apple, cela représenterait donc un chiffre d'affaires d'environ 2 milliards de dollars.

Interrogés, la DGCCRF s'est refusée à tout commentaire, et Apple n'a pas répondu.

Jamal Henni