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Face à ses dettes, Vivarte s’en remet à ses créanciers

Le groupe Vivarte possède encore La Halle, Caroll, Minelli, Cosmoparis et San Marina.

Le groupe Vivarte possède encore La Halle, Caroll, Minelli, Cosmoparis et San Marina. - Damien Meyer - AFP

Faute de pouvoir rembourser ses prochaines échéances, l’enseigne d’habillement devrait passer sous le contrôle de ses créanciers. Le dirigeant du groupe pointe du doigt la crise des « gilets jaunes ».

Une ambiance morose dans les boutiques de prêt-à-porter ? Après Camaïeu en janvier dernier, et Ikks un mois plus tôt, c’est au tour du groupe Vivarte d’être racheté par ses créanciers. Le distributeur tricolore, qui possède notamment Caroll et La Halle, a annoncé vendredi qu’il ne serait pas capable de rembourser ses prochaines échéances de dette, en octobre prochain, et qu’il voulait activer le mécanisme de transfert de propriété à ses créanciers. Cette procédure dite « de fiducie », si elle est acceptée, mettrait à zéro les compteurs de la dette du groupe.

Malgré les cessions d’une partie de ses marques, qui lui ont permis de rembourser 200 millions d’euros, 100 millions manquent encore à l’appel pour cet automne. Pour Vivarte, un responsable : les « gilets jaunes ». Le mouvement social a eu un « impact dramatique » sur le commerce de détail, a assuré son dirigeant Patrick Puy dans un entretien aux Echos, constatant une désertion des centres-villes. Les troubles causés par les manifestations auraient fait perdre « 30 millions d'euros de chiffre d'affaires et 15 millions d'euros de marges », a avancé ce dernier, à la tête du groupe depuis trois ans.

Une annonce à contre-courant d’une très récente étude de l’institut Altares : en dépit de la crise sociale qui aura marqué l’hiver, les défaillances d’entreprises atteignent leur plus bas niveau depuis 2008 au deuxième trimestre, et reculent même d’un peu plus de 3%, assure le cabinet d’études dans son compte-rendu publié mercredi. Au plus fort du mouvement, certains week-ends s’étaient traduits par une quasi interruption de l’activité de nombreuses entreprises françaises. Mais ces dernières, grâce aux aides publiques et à l’autofinancement, semblaient avoir tenu le choc des « gilets jaunes ».

Pour Vivarte, aussi rude que fut ce choc, il n’a été qu’un poids supplémentaire sur le dos du groupe. En grande difficulté depuis plusieurs années, il s’est séparé d’une grande partie des marques de son portefeuille au cours d’un important plan de restructuration, en accord avec ses créanciers. Chevignon, André, Kookaï ou Naf Naf ont été vendus les unes après les autres, le distributeur ne gardant qu’une demi-douzaine d’entre elles – il devrait encore en céder trois autres.

Pas de vente de Minelli

Une situation d’autant plus difficile que Vivarte, faute de repreneur satisfaisant, n’est pas parvenu à vendre l'enseigne de chaussures Minelli mise en vente depuis plusieurs mois. Or, le groupe comptait sur cette cession pour rembourser une partie de la dette. Le chausseur a donc été retiré de la vente. Mais, concernant Cosmoparis et San Marina, « la probabilité de céder [ces enseignes] dans de bonnes conditions est très élevée. Nous pourrions signer en septembre, pour une clôture des opérations en décembre », s’est réjoui Patrick Puy.

« Bien sûr que les faits générateurs [de cette situation] ne sont pas brillants puisqu'on n'a pas réussi à vendre Minelli et que les résultats ne se sont pas améliorés autant qu'on aurait dû, mais la conséquence sera très positive : on se retrouvera en septembre avec zéro dette et plein de cash », a affirmé le dirigeant à l'AFP. Cette situation n'aura pas de conséquences sur le plan social, « au contraire même, n'ayant plus de dette, [nous pourrons] investir davantage dans [notre] développement », a-t-il précisé.

Un enthousiasme que ne partagent pas les syndicats du groupe, loin de là. « C'est une vraie catastrophe pour les salariés", a réagi auprès de l'AFP Karim Cheboub, représentant CGT au comité de groupe, pour qui désormais « l'avenir est très sombre ». 

« Une fiducie n'est pas annonciatrice de bonnes nouvelles: le transfert est généralement soumis à des conditions de cession », estime le syndicaliste.

Dans le prêt-à-porter tricolore, Vivarte n’est pas le seul à pâtir d’un environnement maussade. Un mois auparavant, l’enseigne Ikks était elle aussi passée sur le contrôle de ses créanciers, lui permettant d’effacer une dette obligataire de plus de 300 millions d’euros.

De même pour Camaïeu, première chaîne d’habillement féminin, en décembre dernier. Faute de repreneur, la filiale française de New Look avait été placée en liquidation judiciaire à la fin du mois de juin, tandis que la chaîne C&A pourrait fermer une quinzaine de magasins sur les 150 qu’elle possède dans l’Hexagone.

Jérémy BRUNO