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Fusion EADS/BAE: les marchés n'adhèrent pas

La nouvelle structure serait bien plus dépendante du secteur de la défense que ne l'est actuellement EADS

La nouvelle structure serait bien plus dépendante du secteur de la défense que ne l'est actuellement EADS - -

Les deux sociétés de défense et d’aéronautique étaient toutes les deux en très forte chute sur les marchés, ce jeudi 13 septembre. Les investisseurs sont échaudés par les risques que poserait un possible mariage entre les deux entreprises.

Le projet de méga-fusion dans l’aéronautique a fait un flop en Bourse, ce jeudi 13 novembre. A Paris, l’européen EADS, maison mère d’Airbus, a connu une chute impressionnante sur le Cac 40, de plus de 10%. A Londres, BAE Systems a connu un destin similaire, avec une dégringolade de 7,3%.

Les deux titres ont souffert des abaissements de recommandations d’analystes. Ce matin, Citigroup est ainsi passé "d’acheter" à "neutre", et Oddo Securities l’a imité quelques minutes plus tard. Les investisseurs comme les experts se focalisent sur les inquiétudes que pourrait faire naître la future structure réunissant les deux sociétés. Celles-ci sont de trois ordres.

> La dilution des revenus tirés de l'aéronautique civil

"Si un investisseur était jusque-là actionnaire d’EADS, c’était grâce à la visibilité des revenus générés par la division civile du groupe. Mais une fusion avec BAE Systems diluerait la part de ce secteur", créant ainsi des doutes sur la stabilité des revenus du groupe, explique Jérémy Gaudichon, gérant chez KBL Richelieu, dans l’émission Intégrale Bourse de BFM Business.

Selon les calculs de la Deutsche Bank cités par Reuters, la nouvelle entité BAE Systems-EADS tirerait en effet 41% de son chiffre d’affaires de ses activités civiles contre 43% du secteur défense et sécurité, alors que l’aéronautique civil est en pleine expansion. A titre d'indication, environ 80% du chiffre d'affaires d'EADS est actuellement généré par ce secteur. Et Oddo Securities estime que les futures synergies dégagées par cette fusion font face à d'importantes barrières.

> Le risque américain

"Les Etats-Unis surveillent les décisions prises par leurs fournisseurs et pourraient avoir un droit de véto", souligne Jérémy Gaudichon. BAE Systems est effectivement le sixième fournisseur des Etats-Unis, client qui constitue plus de 14,4 milliards de dollars de revenus, soit environ 40% du chiffre d’affaires total du groupe. Et les Américains risquent de considérer désormais BAE Systems comme le cheval de troie d'EADS, grand rival du champion national Boeing dans le civil.

De plus, Jérémy Gaudichon rappelle que cette possible fusion survient dans un contexte de fortes incertitudes pour le secteur de la Défense. Le Pentagone risque de couper massivement ses dépenses, et en Europe, les dépenses militaires ne représentaient en 2010 qu’entre 1 et 2,4% des PIB des pays de l’Union européenne, selon les données de la Banque mondiale. Loin des 4,8% des Etats-Unis.

> La complexité de la future structure

Yan Derocles, analyste du secteur aéronautique chez Oddo Securities, parle "de risques d’exécution forts" et d’"une véritable usine à gaz". Un problème de gouvernance va ainsi se poser, avec trois nationalités présentes dans la structure et deux Etats actionnaires, la France et l’Allemagne. Un nouveau pacte d’actionnaire devra ainsi être entièrement révisé.

Et selon l’agence de presse allemande DPA, Berlin aurait déjà exprimé d’importantes réserves sur cette future fusion.

Julien Marion