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Les hypothèses pleuvent après le chamboule-tout à Vivendi

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PARIS (Reuters) - Le départ de Jean-Bernard Lévy de la présidence du directoire de Vivendi ouvre la voie à un redécoupage du premier groupe européen de divertissement et de télécoms dont les modalités et l'ampleur restent encore à préciser.

L'éditeur de jeux vidéo Activision Blizzard et l'opérateur Maroc Telecom apparaissent en haut de la liste des candidats possibles à une cession, disent banquiers et analystes, mais le scénario d'une scission du conglomérat, sur le modèle de News Corp, n'est pas à exclure.

"Regardez ce que vient d'annoncer Murdoch, regardez tous les précédents de scission dont l'exécution a été bien menée, cela lève la décote de conglomérat et crée énormément de valeur pour tous les actionnaires", a dit une source proche du dossier, ajoutant que Jean-Bernard Lévy était opposé à une telle opération alors que le président du conseil de surveillance, Jean-René Fourtou est "bien plus pragmatique".

Face aux mauvaises performances de son cours en Bourse, Vivendi s'interroge depuis plusieurs mois sur sa stratégie et sur la pertinence de son périmètre d'activité, une réflexion ouvertement exprimée dans une lettre aux actionnaires du 27 mars cosignée par Jean-Bernard Lévy et Jean-René Fourtou.

Le coup de théâtre de jeudi a cependant fait apparaître les divergences entre les deux dirigeants sur les solutions à apporter pour redresser un titre qui a touché au printemps un plus bas de neuf ans, plombé par les difficultés de l'opérateur SFR.

Pour les analystes, c'est le signal d'un virage stratégique au sein du groupe.

"Avec ce qui est en train de se passer, on peut penser qu'il va y avoir un important changement de périmètre, une modification assez forte de ce conglomérat", estime Yohan Salleron, gérant de fonds à Mandarine Gestion à Paris.

"En revanche, cela semble trop tôt pour acheter dans la mesure où nous n'avons aucune idée de ce qui va se passer. On ne sait pas ce qu'on achète aujourd'hui", ajoute-t-il.

UNE SCISSION À LA NEWS CORP ?

L'annonce du départ de Jean-Bernard Lévy a toutefois été saluée par un bond de plus de 5% du titre en Bourse jeudi, et l'action a encore clôturé en hausse de 3,06% vendredi.

Nomura a relevé sa recommandation sur l'action Vivendi, tout comme JPMorgan dont les analystes anticipent désormais une politique plus favorable aux actionnaires, dans la perspective notamment de la montée au capital de Vincent Bolloré qui pourrait intégrer le conseil de surveillance à l'automne.

"Compte tenu de son passé, nous verrions son arrivée comme positive, l'homme étant réputé pour accélérer la création de valeur via des ventes d'actifs ou des réductions de coûts", estime Will Smith, analyste à Jefferies, qui évoque les scénarios d'une cession d'Activision ou de Maroc Telecom.

D'autres analystes font valoir qu'une scission du groupe entre ses activités médias d'une part et télécoms de l'autre pourrait libérer de la valeur, sur le modèle de ce que vient d'annoncer News Corp, le groupe dirigé par le magnat de la presse Rupert Murdoch.

"Il est assez probable que cela ait lieu", a déclaré la source proche du dossier. "Mon sentiment est qu'une fois que l'agitation sera retombée, dans cinq ou dix jours, ils vont commencer à inviter les banques à venir leur parler.

Dans une note datée de mai, les analystes d'Exane BNP Paribas soulignaient toutefois qu'une telle opération "risquerait d'aggraver et non de résoudre la question de la dette, à moins d'un montage financier complexe", rappelant que la dette est logée au sein du groupe.

Les CDS à cinq ans sur Vivendi évoluent aux environs de 215 points de base, contre environ 170 pdb au début de l'année.

L'AVENIR DE SFR EN SUSPENS

Liberum Capital évoque quant à lui l'hypothèse d'une vente de SFR, tout en reconnaissant qu'un tel scénario peut apparaître surprenant, l'opérateur contribuant à plus de 40% au résultat opérationnel du groupe.

Selon une source proche du dossier, Michel Combes, actuel dirigeant Europe de Vodafone, a renoncé à prendre la tête de la filiale de Vivendi début août, une décision qui a surpris nombre d'observateurs et d'analystes alors qu'un vaste plan de réorganisation de l'opérateur est attendu prochainement.

Un comité central d'entreprise est prévu mardi et mercredi prochains à SFR, dont l'ordre du jour mentionne "Information du CCE sur l'adaptation des orientations stratégiques de SFR", a dit à Reuters Damien Bornerand, délégué central de la CGT.

L'intérim à SFR est assuré par le directeur des ressources humaines de Vivendi, tandis que le secrétaire général du conglomérat remplace temporairement Jean-Bernard Lévy.

Mais c'est le président du conseil de surveillance Jean-René Fourtou qui supervisera l'élaboration d'une nouvelle stratégie pour le groupe, se retrouvant ainsi dans une situation identique à celle de 2002 lorsqu'il avait été appelé à la rescousse après les déconvenues de l'ère Messier.

Avec Alexandre Boksenbaum-Granier, Kate Holton et Georgina Prodhan, édité par Benoît Van Overstraeten

Reuters