BFM Business
Culture loisirs

Charlie Hebdo a mis les imprimeurs de presse à rude épreuve 

"Charlie Hebdo" a d'abord annoncé un tirage d'un million d'exemplaires, puis de trois, et enfin de cinq

"Charlie Hebdo" a d'abord annoncé un tirage d'un million d'exemplaires, puis de trois, et enfin de cinq - Pascal Gutyot AFP

L'hebdomadaire victime des frères Kouachi n'est pas le seul à avoir fait tourner les rotatives à flux tendu. Les grandes imprimeries assurant la production des journaux français ont eu du mal à satisfaire les besoins.

Les attentats de la semaine dernières ont redonné aux Français le goût à la presse écrite. Ainsi, jeudi 8 janvier, les ventes en kiosques des quotidiens nationaux ont grimpé à un million d'exemplaires, contre 600.000 normalement, selon le Syndicat de la presse quotidienne nationale (SPQN).

Libération a quintuplé ses ventes, tandis que les Échos et le Figaro ont vendu deux fois plus que d'habitude. Le Parisien/Aujourd'hui en France affiche une hausse de +50%, Ouest-France de +36%, et l'Équipe de +34%, selon le SPQN.

Obstacles logistiques

Toutefois, cet engouement bute sur des obstacles logistiques, car les imprimeurs ont dû mal à suivre la demande. Ceci explique la pénurie de titres comme Charlie Hebdo, qui a promis un tirage de 5 millions d'exemplaires, mais dont, en pratique, les exemplaires arrivent au compte goutte dans les kiosques.

Chez Maury, un des principaux imprimeurs de magazines français (le Point, Marianne...), on explique que plusieurs problèmes se posent dans de telles circonstances. "D'abord, il faut dégager des capacités d'impressions supplémentaires sur les rotatives. Or celle-ci sont a priori déjà pleines lors du tirage des hebdomadaires.

La solution est donc de repousser à plus tard les impressions les moins urgentes, comme celles des mensuels ou des catalogues. Et aussi de faire tourner les rotatives 24 heures sur 24, y compris le week end", explique Jean-Michel Thibaut, directeur de l'imprimerie de Manchcourt.

Pénurie de papier

Autre problème: l'approvisionnement en papier. "C'est aux journaux de fournir le papier à l'avance à l'imprimeur, qui le stocke ensuite dans l'imprimerie. Certains journaux sont prévoyants, comme Paris Match qui nous fournit toujours à l'avance de quoi imprimer trois numéros ", explique Jean-Michel Thibaut. En revanche, Charlie Hebdo (dont l'imprimeur est tenu secret pour des raisons de sécurité) n'avait évidemment pas prévu d'avoir besoin d'autant de papier (il est tiré habituellement à 60.000 exemplaires), ce qui expliquerait en partie sa difficulté à servir la demande.

Une analyse confirmée en bout de chaîne par Jacques Rousset, patron du dépôt de presse Secodip: "nous recevons des Charlie Hebdo au compte goutte: 3.600 mercredi, 2.400 jeudi et 8.400 vendredi. Les imprimeurs sont incapables de satisfaire immédiatement de tels pics, d'autant que tous les journaux augmentent leur tirage en même temps".

Enfin, un dernier problème se pose quand un quotidien est vendu couplé avec un supplément magazine. Ce dernier est en général imprimé longtemps à l'avance, ce qui empêche le quotidien de doper son tirage ce jour-là. C'est par exemple ce qui est arrivé pour le Monde paru vendredi 9 janvier midi, avec son supplément M le Magazine, dont le tirage avait été fixé quatre jours avant. 

Jamal Henni