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Il faut sauver le « NEXT 40 »

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Le successeur de Mounir Mahjoubi doit garder son projet d’un indice phare des entreprises de croissance.

La France aurait pu hier célébrer une victoire formidable pour son avenir, ce fut au contraire un jour de défaite. Mercredi, le Français Yann Le Cun a reçu le prix Turing, ce que l’on présente comme le « Nobel de l’informatique », avec deux co-lauréats, Yoshua Bengio et Geoffrey Hinton. Les trois hommes sont des pionniers de ce que l’on appelle le deep learning en intelligence artificielle. Je me penche sur la page Wikipedia de notre ingénieur français, parcours académique impeccable « diplômé de l'École supérieure d'ingénieurs en électrotechnique et électronique en 1983, il part ensuite à l'Université Pierre et Marie Curie effectuer un DEA puis un doctorat qu'il obtient en 1987. Il s'oriente rapidement vers la recherche sur l'apprentissage automatique et il propose pendant sa thèse une variante de l'algorithme de rétropropagation du gradient qui permet depuis le début des années 80 l'apprentissage des réseaux de neurones ».

La défaite c’est que cet ingénieur d’exception travaille pour Facebook. Le seul sujet de notre continent doit être le suivant : comment faire pour le prochain Yann Le Cun travaille pour un géant européen, travaille à la croissance et à la souveraineté de l’Europe (car ils sont bien là, les enjeux de l’intelligence artificielle)

Mounir Mahjoubi avait apporté un premier élément de réponse : l’indice « NEXT 40 », mettre en lumière 40 entreprises à très forte croissance, avec un potentiel de marché mondial, de fortes barrières à l’entrée et des entrepreneurs d’exception à leur tête, représenter le monde de demain en miroir du CAC 40 qui représente le monde d’aujourd’hui.

Emmanuel Macron avait d’ailleurs parfaitement résumé l’enjeu, lui-même en 2016: « l'âge moyen des entreprises du CAC 40 est de 105 ans, tandis que celui des entreprises du Nasdaq, aux États-Unis, est de 15 ans ». L’enjeu est fondamental: nos entreprises en croissance ont besoin de cette lumière pour que le pays se les approprie. On ne parle pas ici d’une place de marché (l’idée d’un « Nasdaq européen » est portée par ailleurs) mais bien d’une place médiatique, d’une place publique.

Un « NEXT 40 », ce sont 40 entrepreneurs qui serviront de référence, qui seront invités sur les plateaux télé pour porter des valeurs de conquête et de croissance, qui seront identifiés par les investisseurs pour qu’ils aient les moyens d’accélérer encore, bref, qui porteront les germes d’un futur géant tech Européen, à même d'attirer les meilleurs ingénieurs

« Tech for growth »

Soyons francs, le projet de Mounir Mahjoubi portait déjà la marque de ses ambitions politiques, et il semblait davantage privilégier le « tech for good », plutôt que le « tech for growth » ou le « tech for money », on allait y installer plus de bienfaiteurs de l'humanité que d'entrepreneurs acharnés à croître. Or ce NEXT 40 ne doit évidemment pas être le dernier salon où l’on cause entre gens de bonne compagnie, mais bien un indice exigeant de boites déjà fortes dans tous les secteurs où s’impose la tech.

Le successeur de Mounir Mahjoubi (s’il y en a un) doit garder ce projet, le porter de toutes ses forces. Dans le parcours exceptionnel de la tech US des 20 dernières années vous trouvez un dénominateur commun : l’obsession de croissance, obsession absolue de prendre tous les risques, brûler tout le cash pour croître, croître, encore croître, jusqu’à devenir invincible. En portant ces valeurs, le NEXT 40 et ses héros des temps modernes vont illustrer ce message indispensable sur notre vieux continent, et nous donner à tous de nouvelles ambitions.