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Jean-Bernard Lévy quitte Vivendi au bout de sept ans

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PARIS (Reuters) - Jean-Bernard Lévy a quitté ce jeudi la présidence du directoire de Vivendi, qu'il occupait depuis sept ans, un départ interprété comme annonciateur de changements à venir pour le groupe de télécoms et de divertissement, dont le titre est à la peine en Bourse.

Vivendi a confirmé dans la soirée dans un communiqué le départ du dirigeant de 57 ans, évoquant une divergence sur "l'évolution stratégique" du groupe. Le titre Vivendi avait auparavant clôturé en hausse de plus de 5% après des fuites dans la presse.

Cette annonce intervient quatre jours seulement après le séminaire stratégique annuel du conglomérat lors duquel sont apparus des désaccords entre Jean-Bernard Lévy, à la tête de Vivendi depuis 2005, et le conseil de surveillance, a précisé une source proche du dossier.

Les dirigeants de Vivendi sont à la recherche de solutions pour enrayer la baisse du titre en Bourse, qui a touché un plus bas de neuf ans au printemps, plombé notamment par les difficultés de la filiale SFR.

"Lors de ce séminaire, le conseil a vraisemblablement décidé un certain nombre d'orientations stratégiques, donc de prendre une certaine direction que, manifestement, Jean-Bernard Lévy ne partage pas", a précisé cette source.

"Ce n'est pas le bilan de Jean-Bernard, ce n'est pas la situation de Vivendi, ce n'est même pas la situation de SFR qui pose problème, c'est le futur du groupe", a-t-elle poursuivi, ajoutant que le dirigeant avait choisi de "tirer les conséquences" de ce désaccord.

UN DÉPART FORCÉ, 10 ANS APRÈS CELUI DE MESSIER

Nommé à la présidence du directoire en 2005 après un parcours qui l'avait mené des cabinets ministériels à la finance, Jean-Bernard Lévy, ingénieur télécoms de formation, a été critiqué pour avoir doublé l'exposition de Vivendi au marché français des télécoms en rachetant les parts du britannique Vodafone dans SFR, une opération réalisée moins d'un an avant l'arrivée de Free sur le marché du mobile.

Certains actionnaires ont également été irrités par l'annonce en mars d'une baisse du dividende.

"Avec le départ de Jean-Bernard Lévy, une phase de restructuration un peu plus importante va pouvoir avoir lieu", commente Jean-Michel Salavador, analyste chez AlphaValue.

Le titre Vivendi, malgré un rebond depuis les plus bas d'avril, affiche un recul de près de 18% depuis le début de l'année. Sa chute a ramené à 17,3 milliards d'euros la capitalisation du groupe, qui possède entre autres, outre SFR, le groupe de télévision Canal+, le numéro un mondial de la musique Universal Music Group et l'éditeur de jeux vidéo américain Activision Blizzard.

Face à la bronca des actionnaires, le président du conseil de surveillance Jean-René Fourtou avait promis en avril que le conglomérat ne resterait pas les bras croisés et que tous les sujets seraient mis sur la table, sans "tabou".

Aucune annonce concrète n'a cependant suivi le séminaire stratégique du week-end dernier, ce qui a provoqué la déception des investisseurs.

"Beaucoup de gens pariaient sur un départ de Lévy. A partir du moment où vous faisiez l'hypothèse que Vivendi va vendre ne serait-ce qu'un actif, vous deviez pensez qu'il allait partir. Il s'est battu pour maintenir le groupe dans son ensemble", souligne une source, selon laquelle une cession de la participation de 61% dans Activision Blizzard apparaît aujourd'hui comme l'option la plus simple.

Le départ de Jean-Bernard Lévy vient ajouter un nouvel épisode au parcours mouvementé de Vivendi. L'ex-Générale des eaux avait échappé de peu à la cessation de paiements en 2002 après plusieurs années d'une stratégie d'investissements dans les réseaux et les contenus menée tambour battant par Jean-Marie Messier, son président de l'époque.

Ce dernier avait lui-même été contraint au départ à l'été 2002 et Jean-René Fourtou, l'actuel président du conseil de surveillance, avait été appelé à la rescousse pour réorienter la stratégie et piloter notamment la cession des activités d'édition après la scission de la branche historique d'eau et d'environnement, devenue Veolia.

SFR, URGENCE NUMÉRO UN

La présidence de Jean-Bernard Lévy a été marquée entre autres ces dernières années par la prise de contrôle de l'opérateur Maroc Telecom, de la pépite brésilienne GVT et d'Activision.

"Jean-Bernard Lévy a eu une tâche qui n'était pas facile et pas forcément comprise par les marchés ,qui était de repositionner le groupe, et il a dû avant tout gérer l'héritage du passé", souligne Gilles Guibout, gestionnaire de portefeuille à AXA Investment Management.

"Son départ fait très clairement apparaître le scénario du démantèlement avec une probabilité plus élevée".

Conséquence du départ de Jean-Bernard Lévy, Michel Combes, le numéro deux de Vodafone qui devait prendre la tête de SFR à l'été, ne quittera finalement pas le groupe britannique.

Jean-Bernard Lévy avait engagé l'élaboration d'un plan de réorganisation en profondeur de l'opérateur, qu'il devait présenter prochainement aux organisations syndicales. Un comité de groupe de SFR doit avoir lieu mardi prochain.

A Vivendi, l'intérim sera assuré par Jean-François Dubos, actuel secrétaire général de Vivendi. Stéphane Roussel, actuel directeur des ressources humaines de Vivendi et ancien DRH de SFR, prend quant à lui la tête de SFR à titre provisoire.

"Je suis surpris du fait que le titre ait aussi bien réagi à la nouvelle que le groupe n'avait plus ni PDG, ni dirigeant pour SFR", a commenté une source.

Avec Christian Plumb, Kate Holton, Blaise Robinson et Alexandre Boksenbaum-Granier, édité par Marc Angrand

Reuters