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John Elkann : l'héritier Agnelli, futur géant de l'automobile mondiale ?

Cornaqué par son mentor Sergio Marchione, John Elkann était devenu un homme fort de l'automobile. Un deal réussi avec Renault ferait de lui un géant incontournable.

Cornaqué par son mentor Sergio Marchione, John Elkann était devenu un homme fort de l'automobile. Un deal réussi avec Renault ferait de lui un géant incontournable. - ALBERTO PIZZOLI / AFP

Héritier de la dynastie Agnelli et de Fiat, John Elkann peut, en scellant une alliance avec Renault, devenir potentiellement le dirigeant le plus puissant du monde automobile.

C'est le visage jeune d'une des plus vieilles familles de l'industrie Européenne. John Elkann, à 43 ans seulement, est sans doute le personnage-clé qui pourrait ressortir grand vainqueur du feuilleton Fiat-Chrysler-Renault.

Petit-fils de Gianni Agnelli, l'artisan de l'essor de Fiat pendant 30 ans, homme d'affaires réputé intraitable et gestionnaire brillant, il a activement participé au redressement de Fiat depuis qu'il y est entré, en 1998, alors qu'il n'avait que... 22 ans.

Un mentor nommé Sergio Marchione

Il s'est trouvé un mentor de rêve en la personne de Sergio Marchionne, qui a repris en main le groupe à partir de 2004, restructuré la galaxie Fiat, accéléré sur le marché américain. Et rapidement, John Elkann a montré un énorme potentiel, et des qualités de leadership indiscutables au sein des instances dirigeantes.

Le décès soudain de Sergio Marchionne l'année dernière a bouleversé la donne. John Elkann perdait son mentor... Mais se retrouvait propulsé à la présidence de Fiat-Chrysler en toute légitimité, avec à ses côtés un nouvel administrateur-gérant très représentatif de ce que le constructeur était en train de devenir : Mike Manley, l'ancien patron de Jeep.

Besoin vital d'alliances

Car c'est bel et bien Jeep qui a pris le relais de la croissance de la galaxie Fiat-Chrysler, qui en plus connaît une passe difficile en ce moment, avec de grosses disparités de marché. Si les activités américaines progressent encore significativement, FIAT accuse beaucoup de revers commerciaux notamment en Europe, avec une gamme vieillissante, trop centrée autour d'un seul modèle (la Fiat 500) et un tournant mal négocié en ce qui concerne les nouvelles réglementations en matière de CO2, ainsi que l'électrification.

John Elkann en a conscience depuis bien longtemps, et depuis quelques mois, il a multiplié les signaux en directions d'autres constructeurs, dont PSA il y a encore quelque temps, afin de trouver un partenaire.

Coup de poker

L'objectif : partager un outil industriel et des technologies pour réduire les coûts de production, et créer de la valeur via de fortes synergies. Le tout en apportant dans la corbeille de mariage des actifs américains en croissance sur des marchés porteurs. Et Renault était finalement le meilleur des candidats.

Mais c'est sans doute là que les talents d'homme d'affaires de John Elkann vont s'exprimer le mieux. Car l'opération autour de Renault constitue, en soi, un véritable coup de poker. Il s'agit de proposer un mariage à un concurrent très profitable, certes, mais 2 fois plus petit que lui en termes de chiffre d'affaires, et empêtré stratégiquement dans une guerre de pouvoir sans fin au sein de sa propre alliance avec Nissan.

Redéfinir l'alliance

Le projet de fusion entre égaux, tel qu'il a été présenté est sans ambiguïté : s'il est accepté et adopté, la holding des Agnelli, Exor, en deviendra premier actionnaire à hauteur de plus de 15%. Loin devant l'Etat Français à 7,5% et Nissan, qui sera dilué à 7,5% également. 

Dans ce cas, il est évident que ce sont tous les mécanismes de gouvernance de l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi qui seront à revoir de A à Z pour établir des rapports de forces aussi sains et fonctionnels que possible. Et au milieu de ce chantier, John Elkann émergera comme homme fort indiscutable, représentant légitime du premier actionnaire de Renault.

Pari gagnant dans tous les cas

La décision de Renault d'accepter l'examen de l'offre est déjà en soi une victoire éclatante de John Elkann. En cas de succès, et si le camp Nissan ne s'y oppose pas, il sera dirigeant de référence du numéro 1 indiscutable de l'automobile mondiale, qui rayonnera absolument partout dans le monde.

En cas de désaccord, et d'opposition frontale avec Nissan, il se sera assuré d'un partenariat d'intérêt vital avec Renault, qui garantira un avenir bien plus radieux pour Fiat, notamment, au sein du 3ème ensemble automobile mondial. Réponse le 4 juin prochain, avec le rendu de décision de Renault.