BFM Business
Assurance Banque

L'État italien va sauver la banque Monte dei Paschi

La Banque Monte dei Paschi devrait bien bénéficier d'un sauvetage public.

La Banque Monte dei Paschi devrait bien bénéficier d'un sauvetage public. - Petra Milosevic CC

La troisième banque d'Italie n'est pas parvenue à trouver suffisamment de capitaux privés pour empêcher sa faillite. L'État italien va devoir venir à sa rescousse.

La banque italienne Monte dei Paschi di Siena (BMPS) semblait jeudi de plus en plus proche d'un sauvetage public, son augmentation de capital sur le marché, qui doit se terminer dans l'après-midi, risquant de ne pas permettre de lever les 5 milliards d'euros escomptés.

Le troisième établissement financier italien et plus ancien de la planète, est depuis des mois au centre des inquiétudes autour du système bancaire italien, en raison notamment du poids dans son portefeuille de créances douteuses, des prêts qui ne seront probablement jamais remboursés.

Mercredi soir, elle a indiqué que la conversion volontaire d'obligations en actions, qui s'est conclue mercredi à la mi-journée, lui avait permis de récolter, virtuellement, un peu plus de deux milliards d'euros. Il lui manque donc encore trois milliards. Sur l'augmentation de capital proprement dite, débutée lundi et devant se conclure à la mi-journée, aucune donnée chiffrée n'a encore filtré.

Le Qatar pas intéressé

Mais la banque a reconnu mercredi soir que "ne s'était concrétisée aucune manifestation d'intérêt de la part d'investisseurs de référence", alors qu'elle espérait un milliard d'euros du fond du Qatar Qia ou une participation d'autres fonds, chinois ou américains par exemple. "La faible probabilité d'atteindre le montant augmente les chances d'une forme de sauvetage public", souligne Ipek Ozkardeskaya, analyste à LCG.

"Si l'écart est limité, le gouvernement pourrait intervenir et injecter probablement jusqu'à un milliard d'euros sans déclencher" de mise à contribution des détenteurs de titres, estime l'économiste Lorenzo Codogno, fondateur de LC Macro Advisors Limited et ancien directeur général au ministère des Finances italien. Mais "si l'ensemble de l'opération échoue, le gouvernement devra intervenir avec une recapitalisation préventive", ajoute-t-il.

Cette procédure, avec une injection de fonds publics, impose auparavant une mise à contribution des actionnaires et détenteurs d'obligations subordonnées, via une conversion, cette fois forcée, des obligations à un niveau inférieur à leur valeur nominale.

Des manifestations et un suicide

Mais le gouvernement étudie un mécanisme pour compenser les pertes que subiraient les petits épargnants, alors que de nombreux Italiens ont souscrit ce type d'obligations sans en connaître les risques. Un peu plus de 40.000 particuliers détiennent des obligations BMPS. Le sauvetage de quatre petites banques avait entraîné l'an dernier des pertes lourdes pour des particuliers, provoquant manifestations et au moins un suicide, et le gouvernement veut éviter la répétition d'un tel scénario.

Mercredi, les deux chambres du Parlement ont voté la demande formulée par le gouvernement d'une augmentation de 20 milliards de la dette publique, destinée à aider les banques en ayant besoin. Si le gouvernement s'est refusé à citer les établissements qui pourraient y avoir accès, il est clair que la BMPS est au premier rang des possibles bénéficiaires. Les banques Carige, Veneto Banca ou Banca Popolare di Vicenza notamment pourraient aussi demander de l'aide.

Le ministre des Finances, Pier Carlo Padoan, a affirmé mercredi que le déblocage des 20 milliards d'euros était une mesure "de précaution", jugeant la somme "suffisante" pour faire face à d'éventuelles difficultés. L'action publique vise "à maintenir la stabilité financière" et "préserver l'épargne" des Italiens, a-t-il affirmé, tout en soulignant que le système bancaire était "solide, même s'il y a quelques situations de crise".

BMPS navigue en eaux troubles depuis des années

Les banques italiennes inquiètent en raison de leur éclatement (quelque 700 établissements), de l'importance des créances douteuses (360 milliards d'euros, soit près d'un tiers du total de la zone euro) et de leur déficit de capitalisation.

D'après Ipek Ozkardeskaya, "les valeurs bancaires européennes devraient rester sous pression. La crise bancaire italienne est aggravée par les tensions croissantes sur les banques espagnoles". "Trouver une solution pour sauver la Monte dei Paschi pourrait apporter un soulagement à court terme pour le secteur, même si les banques européennes vont rester sur un sol glissant" pendant encore un moment, note-t-elle.

La Monte navigue en eaux troubles depuis des années. Fragilisée par l'acquisition désastreuse en 2007 de la banque Antonveneta, puis par un scandale lié à des malversations, elle a accumulé les pertes (14 milliards entre 2011 et 2015). Elle a déjà dû mener deux augmentations de capital, d'un total de 8 milliards d'euros, de l'argent déjà parti en fumée.

N.G. avec AFP