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La France doit-elle craindre la multiplication des entreprises zombies en Europe?

Pier 1 imports

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Dans une récente analyse, France Stratégie se félicite de l'efficacité des procédures de défaillances en place, dans un contexte européen où nombre d'entreprises en difficulté survivent artificiellement grâce aux taux bas.

Alerte aux entreprises zombies ! Les inquiétudes autour de ces sociétés fragiles se multiplient en Europe, alors que la Banque centrale européenne s'est engagée dans une politique très accommodante, sur le temps long. "On arrive à la limite des taux bas. Il faut faire très attention, il y a plein d’inconvénients majeurs qui surviennent quand les taux d’intérêts sont bas. (...) Un débat qu’on devrait avoir en Europe", c'est la multiplication "des zombies companies", assurait en juillet dernier sur BFM Business Patrick Artus, économiste et directeur de recherche chez Natixis.

Les entreprises zombies sont "des entreprises ayant au moins dix ans d’âge et dont le revenu opérationnel est insuffisant pour couvrir leur charge d’intérêts pendant trois années consécutives" détaille l'OCDE. Or, les taux bas de la BCE permettent à ces structures en difficulté de vivoter malgré le manque de débouchés économiques. Cela évite, certes, les plans sociaux mais cela touche aussi l'activité général du pays.

"La création de richesses passe par la capacité d’une économie à faire émerger puis grandir de nouvelles entreprises mais tout autant par sa capacité à faire disparaître les entreprises les moins efficaces" explique France Stratégie dans une récente analyse. "Les entreprises zombies freinent cette dynamique de renouvellement du tissu productif et empêchent la bonne allocation des ressources, notamment en piégeant des ressources productives qui seraient plus utiles au développement des entreprises performantes".

Explosion des entreprises zombies dans l'OCDE

Selon une étude publiée en 2018 par la Banque des règlements internationaux, la proportion d’entreprises zombies dans les pays de OCDE est passée de 1% en 1990 à 12% en 2015. "L’explication la plus probable de cette hausse est la forte baisse des intérêts payés par les entreprises sur leur dette, passés de l’équivalent de 4,3% du produit intérieur brut (PIB) de l’OCDE en 2008 à 1,5% aujourd’hui" poursuit Patrick Artus, cette fois dans Le Monde.

Mais tous les pays européens ne sont pas logés à la même enseigne. En ce sens, la France fait clairement partie des meilleurs élèves, assure France Stratégie, qui souligne l'efficacité des procédures de défaillance dans l'Hexagone. Entre 2013 et 2016, la part des entreprises zombies apparaît franchement limitée en France, oscillant entre 3,9% et 4,6% de la totalité des entreprises, tandis que la moyenne de l'OCDE se situe autour de 5%.

La France, championne des procédures de défaillance

Parmi les européens, l'Allemagne fait légèrement mieux : entre 2,9% et 3,8% sur la même période. En revanche, les pays d'Europe du sud affichent des parts de zombies bien plus inquiétantes: entre 5,3% et 6,6% pour l'Italie et entre 6,2% et 10,3% pour l'Espagne. Evidemment, ces chiffres sont à mettre en perspectives avec les difficultés économiques qu'ont connu et que continuent de connaitre ces pays. Mais France Stratégie souligne aussi la corrélation entre ce taux et l'efficacité des procédures de défaillances. Ces dernières sont bien plus nombreuses en France et en Allemagne qu'en Italie ou en Espagne.

Au final, France Stratégie estime que l'anticipation est la clé. "La détection en amont d’entreprises qui entrent dans une trajectoire de zombification peut aider à améliorer l'efficacité des procédures collectives et ainsi contribuer à une meilleure allocation des ressources dans l’économie" affirme l'étude. Résultat: les entreprises zombies en France n'ont probablement pas contribué significativement au ralentissement de la productivité constaté en France. Surtout, certains pays seraient bien inspirés de suivre le modèle français pour en finir avec ces entreprises peu efficaces.

Plus de défaillances en 2019

Les défaillances d’entreprises cumulées sur 12 mois ont progressé de 1% à fin juillet selon les dernières données publiées par la Banque de France. Le nombre d'entreprises défaillantes s'élevait alors à 53.508, avec une nette hausse dans le secteur du conseil et service aux entreprises (+11,4%), des transports (+7,2%) et des activités financières et d'assurance (+5,5%).

Thomas Leroy