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Pour la moto, le virage électrique attendra

Si vous cherchez une moto électrique sur le Salon de la moto, rendez-vous sur le stand Harley Davidson qui présente le seul modèle de l'événement.

Si vous cherchez une moto électrique sur le Salon de la moto, rendez-vous sur le stand Harley Davidson qui présente le seul modèle de l'événement. - Harley Davidson

La voiture électrique est une révolution en marche, mais dans le monde de la moto, c’est une autre histoire. Sur le salon de la moto, la seule grosse cylindrée électrique est la Livewire, un prototype Harley-Davidson qui sera commercialisé d’ici 2020.

La révolution électrique a déjà envahi le monde des deux-roues, mais pas tous, loin de là. Alors que les constructeurs d’engins légers (vélos ou scooters) sont entrés dans cette nouvelle ère, les spécialistes des grosses cylindrées sont perplexes face à cette évolution.

Sur l’édition 2015 du salon de la moto, qui se tient jusqu’au 6 décembre à Paris, il faut vraiment chercher pour trouver une moto électrique. Et pour cause, il n’y en a qu’une. Elle se trouve sur le stand d’une marque appréciée par les fans de vintage: Harley Davidson. La marque centenaire est en effet la seule, chez les grands constructeurs, à s’être lancée dans l’électrique avec la Livewire. Ce modèle qui trône sur le stand du constructeur est encore un prototype et la firme américaine espère le commercialiser d’ici 2020, comme nous l’a confirmé Gérard Staedelin, directeur général de Harley-Davidson France.

Pour les bikers présents sur le salon, l'électrique n'est pas vraiment l'innovation qu'ils attendent, même s'ils pensent que c'est une bonne évolution.
Pour les bikers présents sur le salon, l'électrique n'est pas vraiment l'innovation qu'ils attendent, même s'ils pensent que c'est une bonne évolution. © PS - BFM Business

"On ne lance pas ce type d’engin comme une moto traditionnelle, nous indique-t-il. Avant de passer à la phase commerciale, nous voulons être certains que le marché existe, mais pas seulement. Il faut aussi une infrastructure pour charger les batteries, et nous n’en sommes pas là". Pour Harley, il s’agit d’abord de montrer son potentiel d’innovation dans un marché sans concurrence. C’est aussi un moyen pour la marque de tenter de sortir de son image "old school" et de montrer sa capacité à innover.

Pas de place pour les batteries sur les néo-rétro

Les autres marques vont-elles suivre ce précurseur? Pas sûr, même si beaucoup reconnaissent que cette évolution reste nécessaire. Mais actuellement, le doute subsiste. "Est-ce que l’avenir de la moto passera par l’électrique?" s’interroge Jean-Luc Mars, directeur général de Triumph qui lance cette année une réédition de la Bonneville, un modèle emblématique lancé dans les années 50. "Il y a encore beaucoup de problèmes sans solution. Et le principal, c’est l’autonomie des batteries. On ne peut pas en mettre autant que sur une voiture. Mais surtout, il n’y a aucune demande".

En attendant que le marché se crée, Triumph, comme les autres constructeurs, améliore les moteurs et les équipements. "Nos machines sont des néo-rétros, elles ont l’air anciennes, mais sont dotées de technologies qui les rendent moins polluantes et moins fragiles". Cette marque se lancera-t-elle comme Harley dans l’électrique? "Il ne faut jamais dire jamais, mais pour l’instant, nous n’avons pas de projet", indique Jean-Luc Mars.

En fait, l’autre deux-roues électrique exposé dans le hall consacré aux motos est… un scooter. Et il se trouve sur le stand de l’allemand BMW qui commercialise le C Evolution depuis déjà quatre ans. Équivalent à un 600 cm3, cet engin bridé pour ne pas dépasser les 120 km/h se conduit avec un permis voiture. Il est équipé des technologies développées par BMWi, qui développe les voitures électriques de la marque.

Le marché existe bien... mais pour les scooters

Et cette fois, le marché existe. BMW a déjà vendu 650 exemplaires du C Evolution qui coûte pourtant plus de 15.000 euros, soit le prix d’une belle moto. "Lors de son lancement, nous pensions en vendre environ 200. Ce score montre que le marché est prêt."

Mais pour le moment, la marque allemande ne souhaite pas équiper les motos de moteurs électriques. "Nous n’avons aucun recul sur un marché qui, en fait, n’existe pas", nous indique Sébastien Lorentz, responsable des relations presse de BMW Motorrad. Pour ce spécialiste, les batteries ne sont pas encore adaptées aux motos, mais conviennent parfaitement aux scooters qui restent un engin de locomotion urbain.

De leur côté, les motards ne semblent pas pressés de piloter une moto électrique. "Nous aimons le look, les vibrations et le bruit du moteur", nous indique Patrice Bongiovanni, directeur du club Harley de Marseille. Mais ce fan de grosses cylindrées ne se montre pas hostile à cette innovation. "C’est une belle avancée et les essais nous ont montré que la LimeWire offre des sensations proches d’une moto traditionnelle, mais ce n’est pas vraiment le genre d’innovation qu’on attend." L’industrie n’a plus qu’à attendre que le marché soit prêt, mais malgré son amour de la vitesse, il semble vouloir prendre tout son temps.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco