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La participation de Nissan dans Renault "n'est pas la priorité", juge le président de l'alliance

Interrogé sur BFM Business, le patron de Renault répète que la question d'une modification des participations "n'est pas à l'ordre du jour", alors que ce point est notamment à l'origine des tensions entre le groupe français et le constructeur japonais.

Pour l'ex-patron de l'alliance Carlos Ghosn, l'explication est claire. Ce qui a crispé les Japonais de Nissan (et donc précipité le départ forcé de Carlos Ghosn), c'est le poids du constructeur japonais dans l'alliance avec Renault.

La loi dite Florange permet en effet d'attribuer aux actionnaires de long terme des droits de vote double et donc un pouvoir largement accru par rapport aux autres investisseurs. "Ils pensaient que c'était injuste" avait lancé Carlos Ghosn lors de sa conférence de presse le 8 janvier dernier. Les Japonais se seraient sentis lésés puisqu'ils détiennent 15% du capital de Renault mais ne disposent d’aucun droit de vote, contrairement à l'Etat français (15,01% du capital mais pour 28,6% des droits de vote au 31 décembre 2018, selon le document de référence du constructeur). Inversement, Renault détient 43% de Nissan et contrôle de fait le constructeur nippon. 

Cette situation, source de tensions et de crispations, n'est pas prête de changer. Interrogé ce mercredi depuis Davos dans "12h, l'heure H" sur BFM Business, Jean-Dominique Senard, président de Renault et de l'alliance, réaffirme qu'il n'y aura pas de fusion entre Renault et Nissan, ni de modification dans la participation de Nissan au sein de l'alliance.

"La priorité est industrielle"

"Ces questions de participations qui ont beaucoup agité les esprits ces derniers temps, pour moi, ce n'était pas la priorité, je le dis, je le redis. (...) Ce n'est pas à l'ordre du jour aujourd'hui tout simplement parce que la priorité est industrielle. Toutes les actions communes que nous allons mener à l'avenir vont être d'organiser beaucoup plus fortement notre convergence industrielle, nos travaux sur nos usines, nos travaux sur nos programmes de véhicules et nos travaux sur l'ingénierie. Ca c'est la clé. Après, on peut toujours évoquer les questions de participations croisées ou autres, rien n'est figé dans l'avenir. Mais ce n'est pas la priorité du moment, (...) je n'ai aucune notion de temps sur cette affaire là, la priorité n'est pas là", détaille Jean-Dominique Senard. Pas sûr que les nippons apprécient. 

Comment alors solidifier l'alliance sans passer par la case fusion? "Je crois que le meilleur moyen de le faire, compte tenu de la circonstance, c'est (...) revenir à l'esprit d'origine lorsque Louis Schweitzer a créé cette alliance, (il) l'a fait sur un angle de compréhension culturelle extrêmement raffiné. Ce que nous sommes en train de vivre en ce moment, je vous le dis, c'est non seulement le partage de l'urgence mais la meilleure compréhension entre nos différentes approches en gouvernance et en culture. Et ça, c'est absolument précieux. Le monde a changé, aujourd'hui, les réunions du conseil de l'alliance (...) n'ont strictement rien à voir avec celles qu'on avait il y a encore quelques semaines. Et vous verrez, il y aura une traduction concrète de cela". 

"Pas assez de Renault chez Nissan"

Mais concrètement, comment va s'illustrer cette "traduction" mise en avant par Jean-Dominique Senard? Le patron se contente de répéter ce qui est déjà en cours: "ça sera des réflexions sur comment mener effectivement les travaux sur les futures technologies, comment converger dans l'avenir, comment travailler en commun, comment échanger des équipes. Chose qui a été perdue récemment. Il n'y pas suffisamment d'équipes de Nissan chez Renault, tout le monde reconnaît qu'il n'y pas assez de Renault chez Nissan".

Et d'ajouter: "faire tenir une alliance dans la durée, c'est ça aussi, c'est les personnes. Et si on s'occupe de cette question des personnes en s'assurant une bonne transversalité des performances surtout des compétences, eh bien croyez moi, on maintient l'alliance beaucoup plus sûrement que par une fusion".

Olivier Chicheportiche