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La pierre de Bourgogne obtient le label tant convoité par le savon de Marseille

De la pierre de Bourgogne à l'Abbaye de Fontenay, inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco.

De la pierre de Bourgogne à l'Abbaye de Fontenay, inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco. - Abbaye de Fontenay

Les tailleurs artisanaux et industriels de pierre de Bourgogne ont obtenu l'indication géographique que le savon de Marseille quémande depuis des années. Un label qui assure son authenticité et devrait apporter plus de notoriété et de valeur à ce calcaire noble.

Le savon de Marseille le réclame depuis des années, c'est la pierre de Bourgogne qui obtient le Graal avant. Cette pierre très claire, dont les nuances peuvent s'échelonner du rose au bleu en passant par le jaune, vient d'obtenir le label "indication géographique" (IG). Le calcaire noble des pieds de la Tour Eiffel ou de l'escalier de la Pyramide du Louvre devient ainsi protégé de la contrefaçon au même titre par exemple que la porcelaine de Limoges.

Dorénavant, les certifiés pourront utiliser une sorte de "copyright pierre de Bourgogne", deux logos, l'un figurant une empreinte de doigt, l'autre un B stylisé. Des signes garantissent que la pierre a été extraite dans les carrières de la région, mais aussi découpée et travaillée dans l'un de ses quatre départements.

"Les demandes affluent"

La profession espère ainsi décourager la contrefaçon, "venue du monde entier, et de plus en plus réaliste". Comme ce fabricant italien de grès qui proposait dans son catalogue 2012 "de la pierre de Nuxe, extraite à Nuxe, petit village de Bourgogne", alors qu'aucun village bourguignon ne porte ce nom, raconte l'association "Pierre de Bourgogne". 

Les tailleurs de la région comptent aussi sur le label pour accroître la visibilité de cette pierre luxueuse, utilisée par les architectes de l'Empire State Building à New York, ou le British Museum à Londres. Ils en attendent également des retombées financières. Le marché, de 53 millions d'euros en 2017 dont un cinquième à l'export, augmente de 5 à 10%.

L'indication géographique, sorte d'AOP pour les produits manufacturés, a été mise en place en 2015. Avant cette date, seuls les produits agricoles ou viticoles pouvaient obtenir une certification géographique auprès de l'Inpi (Institut national de la propriété industrielle). Depuis que les savoir-faire peuvent en bénéficier, "les demandes affluent" assure la porte-parole de l'Office des brevets.

Mais on n'obtient pas l'indication géographique comme on achète son pain. Si les frais sont peu élevés (350 euros à verser à l'Inpi) c'est plutôt le processus qui pose problème. Il faut d'abord constituer un groupement d'artisans, puisque l'Inpi ne prend pas en compte les demandes d'homologation qui émanerait d'un seul individu ou d'une entreprise unique.

Le savon de Marseille bute à la deuxième étape

Les membres du groupe doivent ensuite se mettre d'accord sur un cahier des charges. L'étape la plus compliquée puisque, ces gens d'ordinaire concurrents doivent définir ce qui est commun à leur travail et en consacrer l'excellence. Pour la pierre de Bourgogne, ils étaient 27 autour de la table, des industriels autant que des artisans indépendants. Ils ont mis des années à décider si la transformation, le façonnage, et la finition devaient également impérativement se passer en Bourgogne. Alors que 85% de ce matériau est déjà transformé dans la région, l'association a opté pour le oui.

Ensuite seulement, l'Inpi vérifie le cahier des charges. Si l'office décide d'accorder l'indication géographique, il reviendra à l'association des artisans de l'accorder ou non à ceux qui demandent à pouvoir jouir du label. Pour le moment, seules quatre associations de manufacturiers ont acquis le Graal: celles de la pierre de Bourgogne et de la porcelaine de Limoges donc, mais aussi le granit de Bretagne et le siège de Liffol.

D'autres s'y essaient depuis 2015, comme les industriels du savon de Marseille. Mais ils butent sur l'étape où il faut se mettre d'accord entre artisans. Si bien qu'aujourd'hui, l'Inpi se retrouve avec deux demandes de certifications de deux associations distinctes. L'impasse, explique l'Office, puisque, "de fait, on ne peut pas donner deux indications géographiques différentes à un même produit".

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- © De droite à gauche et de haut en bas: l'escalier du Louvre, l'Auditorium de Dijon, les pieds de la Tour Eiffel, le British Museum.
Nina Godart