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La Suisse va creuser son deuxième tunnel routier sous les Alpes

Aujourd'hui, les véhicules ne roulent que sur deux fois une voie.

Aujourd'hui, les véhicules ne roulent que sur deux fois une voie. - Raimond Spekking / CC BY-SA 4.0 (via Wikimedia Commons)

Les Suisses ont voté à la majorité pour la construction d'un second axe routier sous le massif du Saint-Gothard. Pourtant, le projet a bon nombre de détracteurs.

Les Alpes suisses vont ressembler à un emmental. Dimanche, les Helvètes ont dit oui, à 57%, à la construction d'un second tunnel routier sous le massif alpin du Saint-Gothard. Après le tunnel ferroviaire qui date de 1881, le tunnel routier qui a été ouvert en 1980 et le tunnel ferroviaire de base qui devrait être inauguré en juin 2016, il s'agira donc de la quatrième voie.

Un tunnel des plus nécessaires, et ce pour deux raisons. Tout d'abord, la construction de ce tunnel permettra d'éviter l'isolement du Tessin. En effet, le premier tunnel routier, construit en 1980, nécessite maintenant des travaux de rénovation et d'assainissement. De lourdes œuvres qui obligent à fermer cet axe capital du transit entre le nord, Göschenen (canton d’Uri), et le sud, Airolo (canton du Tessin). Une fermeture qui nuira à ce canton italophone si une autre voie de passage n'est pas disponible.

De plus, un tel ouvrage rendra le tunnel routier du Saint-Gothard plus sécurisé. La présence d'une seule galerie bidirectionnelle classe ce tunnel parmi les plus dangereux d'Europe. De 16,9 kilomètres, il est le deuxième tunnel routier le plus long d'Europe et le troisième du monde. Mais il est particulièrement étroit puisqu'il n'est que de 2 fois une voie, avec une galerie de sécurité parallèle. Il n'a pas de bandes d'arrêt d'urgence. En 2001, un camion a dévié de sa voie et est rentré dans un autre, causant ainsi la mort de 11 personnes. Une a été carbonisée et 10 intoxiquées par les fumées.

Doris Leuthard, chef du Département fédéral de l'économie, explique: "Après la construction d’un second tube, seule une voie devra être ouverte au trafic dans chacune des galeries, permettant d’éviter aux véhicules de se croiser".

Vers une hausse du trafic?

Sur le papier, ce deuxième tunnel paraît donc primordial. Pourtant, le projet a eu bon nombre de détracteurs. Deux cantons ont refusé ces travaux, celui de Vaud (à 54%) et celui de Genève (à 55%). Pas de réelle surprise toutefois puisqu'ils sont les plus éloignés géographiquement du Saint-Gothard et qu'ils craignent que d'autres projets d'infrastructures routières soient mis à mal par ce projet d'au moins 2,8 milliards de francs suisses (2,5 milliards d'euros).

Ensuite, les écologistes et certaines associations environnementales craignent une hausse du trafic routier, notamment celui des poids lourds. Ils pensent que sous la pression de l'Union européenne, les deux voies de circulation de chaque tunnel seront utilisées, violant l'engagement de l'Initiative des Alpes. Cette association suisse a fait inscrire dans la Constitution un article sur la protection des Alpes qui prévoit notamment que "la capacité des routes de transit des régions alpines ne peut être augmentée".

7 ans de travaux minimum

Malgré les réticences, les travaux devraient donc débuter en 2020. Ils dureront 7 ans, mais certains experts tablent d'ores et déjà sur une fin de travaux en 2030. Une marge de manœuvre étroite puisque l'Office fédéral des routes estime que le tunnel ne peut tenir que jusqu'en 2035 sans subir de grosses interventions. Entre-temps, l'ancienne galerie subira des travaux d'urgence durant les fermetures nocturnes ordinaires.

Une fois la nouvelle voie ouverte, l'ancienne sera donc fermée pour 3 ans. Sa hauteur sera portée de 4,5 à 4,8 mètres, la ventilation sera refaite, ainsi que l'évacuation des eaux, les accotements et l'électricité. Il faudra également réduire les espacements entre les niches d'arrêts d'urgence.

Diane Lacaze