L'action de groupe "à la française" passe son grand oral
Avec six chapitres, représentant un peu plus de 80 pages, le projet de loi consommation, présenté ce jeudi en Conseil des ministres par Benoît Hamon, ministre délégué à la consommation, comporte toute une palette de mesures destinées à renforcer la protection des consommateurs. Parmi elles, les fameuses actions de groupe ou "class action", une procédure maintes fois promises par les gouvernements précédents, mais toujours restée lettre morte sous la pression des entreprises.
Car donner la possibilité aux consommateurs de saisir collectivement la justice pour obtenir réparation d'un préjudice n'est pas sans inquiéter les professionnels. Ceux-ci mettent en avant les dérives du système américain, où la moindre anicroche dans une prestation de service peut déclencher une procédure. Les montants des dommages et intérêts fixés par la justice attisent aussi leurs craintes. Le tout créant un climat de défiance entre client et fournisseurs, alimenté par le chantage au procès.
Un risque pour la compétitivité aux dires des entreprises
Le MEDEF tout comme l'Association française des entreprises privées (AFEP) ont brandi le spectre de la perte de compétitivité. Pas uniquement du fait du poids sur leur finance du versement d'éventuelles d'indemnités, mais aussi par la nécessité pour les sociétés les plus exposées de provisionner de tels risques, ou encore sur les retombées en terme de réputation que peut engendrer un procès.
Sous la pression des différents lobbies, le texte présenté ce jour comporte quelques garde-fous pour encadrer les actions de groupe. Sans doute trop.
Pas de class action pour le Médiator
Le premier d'entre eux est l'impossibilité aux consommateurs d'agir isolément, afin d'éviter les multiplications de requêtes infondées. Mais aussi de voir des avocats, comme aux Etats-Unis, de démarcher les victimes pour justifier la tenue d'une action.
Les clients lésés devront obligatoirement passer par des associations de consommateurs agréées qui décideront si le préjudice subi vaut la tenue d'une action de groupe. C'est aussi elles qui seront chargées, dans le cadre d'une condamnation incluant le versement d'indemnités, de répartir les sommes entre les plaignants.
Le texte est aussi restrictif sur les motifs qui justifient le recours à la justice : les préjudices doivent découler de la vente de biens ou de fournitures de services. Ce qui exclut de fait, au grand dam des associations de consommateurs, les affaires touchant au domaine de la santé, comme ceux autour du Médiateur ou des implants mammaires PIP.
Le texte doit passer doit passer en première lecture devant l'Assemblée nationale au début du mois de juin. Le gouvernement devrait alors en profiter pour réintroduire, par voie d'amendement, le texte portant sur la création du registre national des crédits, retiré du projet initial afin d'en parfaire les tenants juridiques.