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Le marché unique du numérique crée des tensions entre l’Europe et les US

L’Europe veut renégocier certains accords, parmi lesquels le safe-harbor qui permet aux entreprises américaines de transférer les données commerciales des Européens aux Etats-Unis.

L’Europe veut renégocier certains accords, parmi lesquels le safe-harbor qui permet aux entreprises américaines de transférer les données commerciales des Européens aux Etats-Unis. - John Thys (AFP)

La commission européenne présentera en mai un projet de marché unique européen pour le numérique. Axelle Lemaire soutient ce plan qui remet en cause les accords commerciaux signés avec les Etats-Unis.

Bonne nouvelle pour Andrus Ansip, vice-président du Parlement européen en charge du numérique, qui présentera début mai une proposition de projet pour créer en Europe un marché unique du numérique. Pour lui, l’enjeu est indispensable pour affronter la puissance américaine ou chinoise. Mais, il est conscient qu’il ne sera pas facile de trouver un compromis qui donnera satisfaction aux 28 états membres.

L’une des premières à le soutenir a été Axelle Lemaire, secrétaire d’État au numérique. Lors d’un conseil informel des ministres de l'Union européenne chargés de ces questions qui s’est tenu à Riga (Lettonie), elle a défendu la position de la France sur la stratégie numérique de l'Union qui sera présentée par la Commission européenne le 6 mai prochain.

Pour la secrétaire d’État, ce chantier est l’un des moyens les plus efficaces pour soutenir le financement des startups avec un renforcement du capital-risque. "Le gouvernement français aimerait que le plan Juncker comprenne des instruments d'investissement (...) pour que nous puissions investir au niveau européen", a-t-elle dit, faisant allusion au plan du chef de la Commission européenne pour relancer l'économie de l'UE.

En effet, si ce marché unique a des objectifs divers qui vont de la protection des données personnelles, au développement des réseaux de télécommunications en passant par la fiscalité, l’éducation ou l’établissement de règles pour le commerce en ligne, l’enjeu central reste le développement économique et la création d’emplois.

Aux Etats-Unis, Barack Obama est conscient des conséquences que peuvent avoir ces décisions. Il a récemment lancé une attaque contre l'Europe en affirmant que derrière ces "positions nobles", se cachent la défense d'intérêts commerciaux.

Safe-Arbor : ses jours sont-ils comptés ?

Selon la commission européenne, la création d’un marché unique permettra de générer "jusqu'à 340 milliards d'euros de croissance supplémentaire, créer des centaines de milliers de nouveaux emplois et fonder une société de la connaissance dynamique."

Pour parvenir à cet objectif, l’Europe ne cache pas son intention de revenir sur certains accords qui lient l’Europe et les États-Unis, parmi lesquels le safe-harbor, un élément de la "sphère de sécurité" qui permet aux entreprises américaines de transférer les données commerciales des Européens aux Etats-Unis. De fait, la rupture de cet accord, qui touche la vie privée des citoyens européens, porterait un coup dur pour les géants de l’Internet.

À Riga, Axelle Lemaire a souligné l’importance de régler ce dossier en rédigeant une "magna data" européenne afin d’assurer "la confiance, la responsabilité et l'intégrité des données comme des principes fondateurs de l'économie et de la société de la donnée." Cette "magna data" fait référence à la "magna carta" établit au 13ème siècle en Grande-Bretagne pour des libertés face au roi.

Début mars lors de la conférence Big Data qui s’est tenue à Paris, la Secrétaire d’État avait déjà insisté sur l’importance d’établir de nouvelles règles plus respectueuses des individus en créant une "charte des droits individuels en matière de données". Elle avait même affirmé que ce projet était bien avancé, mais qu’il repose sur une alliance de chaque pays de l’Union européenne. Et, c’est bien ce point que se fondent les doutes d’Andrus Ansip.

Pascal Samama