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Le propriétaire de Challenges rentre pleinement dans l'Histoire

L'ancien propriétaire de "l'Obs" tire un bilan mitigé de sa cession

L'ancien propriétaire de "l'Obs" tire un bilan mitigé de sa cession - Joel Saget AFP

Claude Perdiel rachète 100% de Sophia Publications, qui édite L'Histoire mais aussi Historia, la Recherche et le Magazine littéraire. Il entend ainsi conforter son groupe de presse dont le navire amiral est le magazine Challenges.

Claude Perdriel avait juré qu'il ne rachèterait plus de journaux. Mais, à 89 ans, le propriétaire de Challenges et Sciences et avenir, a craqué. Il a annoncé jeudi 23 juin le rachat de Sophia Publications, qui édite l'Histoire, Historia, la Recherche et le Magazine littéraire.

Sophia Publications emploie 60 salariés, et réalisait un chiffre d'affaires de 20 millions d'euros en 2013. Début 2014, l'éditeur avait déjà été racheté à François Pinault par le trio Thierry Verret, Maurice Szafran et Gilles Gramat, pour moins d'un million d'euros, selon Libération. Puis, en novembre 2014, Claude Perdiel avait acquis 50% pour 750.000 euros. Mais peu après, en janvier 2015, Sophia Publications s'était placé en redressement judiciaire, et a dû mener un plan social supprimant 24 postes. Il vient d'en sortir avec l'adoption d'un plan de redressement. "Sophia Publications va gagner 300.000 euros en 2016, mais supporte encore une dette de 1,5 million d'euros", a expliqué Claude Perdriel.

Pas de vente de Challenges

L'homme d'affaires et patron de presse en a profité pour faire un point sur son hebdomadaire économique: "je n'ai jamais envisagé de vendre Challenges, et je ne cèderai jamais la majorité. J'ai envisagé de céder une minorité, plusieurs groupes m'ont écrit, mais cette piste est abandonnée pour l'instant". Selon Presse News, des discussions ont notamment eu lieu avec les Echos ( LVMH).

Claude Perdriel a expliqué vouloir redresser le magazine économique avant toute opération capitalistique. En effet, les pertes se sont élevés à 2,6 millions d'euros en 2015 comme en 2016. Face à cela, a été annoncé mercredi un plan de départs volontaires "très en dessous de 10 postes", concernant uniquement le personnel technique. Cela permettra de réduire le déficit à 1 million d'euros en 2017. "Mais il n'est pas question de toucher aux journalistes, donc ensuite, je ne sais pas comment faire...", a admis Claude Perdriel. 

"Ma femme n'est pas contente"

Enfin, l'octogénaire a expliqué comment il voyait sa succession. "Ma femme héritera des journaux. Elle les gardera et ne cèdera pas la majorité, si elle le peut. Je me suis débrouillé pour qu'elle ait la majorité sans léser mes enfants. C'est pour cela que je m'accroche et que j'essaie d'équilibrer les comptes". Globalement, le groupe (60 millions d'euros de chiffre d'affaires au total) "sera vraiment proche de l'équilibre en 2017", promet-il. 

Au passage, il a confié que son épouse Bénédicte n'était "pas contente" de lire dans la presse qu'elle ne souhaitait pas reprendre le groupe: "elle dit qu'elle continuera si elle peut".

Le propriétaire des sanibroyeurs SFA exclut de vendre ses journaux: "il faudrait trouver quelqu'un qui fasse ça par passion, et soit prêt à perdre suffisamment d'argent comme moi pour que ça continue. Mais j'ai l'impression d'être une espèce en voie de disparition. Je n'envisage donc pas de céder le groupe".

"Un attelage un peu bizarre"

Avant d'ajouter: "dans ma vie, j'ai dû céder deux fois des journaux pour des raisons financières: le Matin de Paris puis le Nouvel observateur. Instruit par ces expériences, je ne souhaite pas vendre ou prendre d'actionnaires". Ainsi, une vente à Xavier Niel n'est "absolument pas" envisagée. "Jamais!" insiste Claude Perdriel. Certes, dit-il, le patron de Free est "un ami que j'aime beaucoup". Mais il a formé "un attelage un peu bizarre" avec Pierre Bergé et Matthieu Pigasse, et "ne fait rien sans eux". "L'un est très riche, l'autre moyennement riche, et le troisième pas riche du tout". Surtout, Matthieu Pigasse "n'est pas un ami du tout": "on n'a pas du tout les mêmes opinions". 

L'ancien propriétaire du Nouvel Obs a tiré un bilan mitigé de sa vente au trio Bergé-Niel-Pigasse: "C'est un très bon journal, plus d'entertainment que de réflexion. C'est toujours un excellent journal, mais pas celui que j'ai fait pendant 50 ans, et pas celui que j'aurai fait si j'étais resté. Déjà, ils ont changé le titre, c'est dommage. [Le directeur de la rédaction] Matthieu Croissandeau m'a dit qu'ils allaient changer de formule, j'ai répondu que c'était une bonne idée. Matthieu Croissandeau m'a dit qu'ils allaient faire de la politique, c'est très bien. Si j'avais la moindre influence, le journal serait différent. Mais on ne me demande pas trop mon avis. Je ne suis pas opérationnel. Je ne suis rien. Je suis juste au conseil de surveillance, je donne mon avis. J'ai proposé 2-3 embauches, mais je n'ai pas été suivi. Mais beaucoup de gens sont venus à Challenges car ils ont quitté l'Observateur..."

Jamal Henni