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Le rachat de Bouygues Telecom par Orange serait examiné à Paris

C'est le gendarme français Bruno Lasserre qui devrait hériter du dossier

C'est le gendarme français Bruno Lasserre qui devrait hériter du dossier - Eric Piermont AFP

C'est finalement l'Autorité de la concurrence française qui devrait très probablement donner son feu vert au rapprochement, et non Bruxelles comme envisagé initialement.

Mardi 5 janvier, Orange a confirmé des "discussions préliminaires" en vue du rachat de Bouygues Telecom. Toutefois, de nombreux obstacles restent à surmonter avant de finaliser un tel rachat. Le principal d'entre eux sera d'obtenir le feu vert du gendarme de la concurrence. Mais lequel? En théorie, deux options sont possibles: ce sera soit la direction de la concurrence de la Commission européenne, soit l'Autorité de la concurrence française.

Initialement, les deux opérateurs télécoms pensaient que l'affaire serait traitée à Bruxelles. Mais finalement, c'est le gendarme de la concurrence hexagonal qui devrait très probablement hériter de ce dossier délicat, selon plusieurs sources industrielles (interrogé sur ce point, Orange n'a pas souhaité faire de commentaires).

Une Danoise inflexible 

Le choix du gendarme est loin d'être anodin, et peut même avoir une influence importante sur le feu vert final. En effet, la nouvelle commissaire européenne à la concurrence, la danoise Margrethe Vestagerse se montre très réticente vis-à-vis des fusions entre opérateurs mobiles, bien plus que son prédécesseur Joaquin Almunia (2010-2014).

Autant l'Espagnol a autorisé les trois cas qui lui ont été soumis (Autriche, Irlande et Allemagne), autant sa successeure danoise a fait capoter la fusion au Danemark, y jugeant nécessaire la renaissance d'un quatrième opérateur, condition refusée par les futurs mariés. L'inflexible Danoise doit maintenant se prononcer sur le passage de quatre à trois opérateurs mobiles en Italie et en Grande-Bretagne. Mais elle a d'ores et déjà déclaré que son premier critère sera le bénéfice pour le consommateur...

Face à cette situation, Orange comme Bouygues préféreraient donc un examen à Paris plutôt qu'à par Bruxelles, qui promettrait d'être très difficile.

Règles complexes

Rappelons que le choix du gendarme qui approuve la fusion obéit à des règles complexes. Ces dernières se basent sur le chiffre d'affaires du groupe qui contrôle la cible (ici le groupe Bouygues) et du groupe qui contrôle l'acquéreur (Orange). Ensuite, ces règles comparent le chiffre d'affaires réalisé en France à celui réalisé dans l'Union européenne. Si la France représente plus des deux tiers du chiffre d'affaires réalisé en Europe, alors le rachat est considéré comme une affaire nationale, et est traité par l'Autorité de la concurrence locale. Sinon, le dossier remonte à Bruxelles.

Dans le cas présent, Bouygues réalise en France plus des deux tiers de son chiffre d'affaires européen. Mais la situation chez Orange est très tangeante, notamment car l'ex-France Télécom vient de racheter un opérateur en Espagne (Jazztel), mais est en train d'en vendre un en Grande-Bretagne (Everything Everywhere). 

Avis consultatif

Interrogé, le porte-parole de l'opérateur historique répond: "c'est la situation du chiffre d'affaires au jour de la notification du rachat qui permet de déterminer la compétence de l'autorité de concurrence qui examine le rachat. Les choses évoluent vite dans un sens ou dans l'autre au sein d'Orange: acquisition, cession, etc. dans des marchés européens en forte évolution. Si nous devions envisager un rachat, cela dépendra de la date à laquelle l'opération de cession à BT de notre participation dans Everything Everywhere sera finalisée après autorisation par l'autorité anglaise de concurrence (CMA). Le calendrier de cette dernière procédure n'est pas définitivement fixé".

A noter que le CMA a annoncé qu'il publierait sa décision définitive d'ici le 18 janvier. De son côté, BT a déclaré qu'il espérait finaliser ce rachat d'ici fin mars.

Rappelons que l'Autorité de la concurrence devra consulter pour avis l'Arcep, mais pas la Commission européenne. Bercy aura aussi la possibilité de donner un avis consultatif à la fin de la procédure. Sa décision pourra ensuite être contestée devant le Conseil d'Etat.

Jamal Henni