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Le studio de Luc Besson perd son procès contre le Parisien

Le procureur avait requis la relaxe du quotidien

Le procureur avait requis la relaxe du quotidien - BFM Business

Le tribunal de grande instance a débouté EuropaCorp de sa plainte en diffamation contre le quotidien au sujet d'une enquête sur la cité du cinéma de Saint Denis.

Le tribunal de grande instance de Paris a débouté mardi 17 mars EuropaCorp de sa plainte contre le Parisien.

Le studio de Luc Besson avait porté plainte pour "diffamation" suite à la publication d'une double page le 16 novembre 2013 concernant la cité du cinéma de Saint Denis. 

Pour le tribunal, "le caractère diffamatoire des propos n'est pas établi. Certes, les journalistes portent un jugement de valeur très négatif sur le financement de la cité du cinéma. Cependant, pour forts que soient les termes employés, ils ne font qu'exprimer une appréciation critique et subjective, et n'excèdent donc pas les limites admissibles de la liberté d'expression reconnue aux organes de presse".

Relaxe requise

Les juges ont suivi l'avis du procureur Céline Viguier, qui avait requis la relaxe le 27 janvier. "Je ne vois pas en quoi les propos du Parisien sont diffamatoires. EuropaCorp s'est trompé de fondement. EuropaCorp est dans le jugement de valeur, n'est pas d'accord avec le Parisien. C'est la manifestation d'une opinion, c'est un droit de réponse", avait elle-déclaré à l'audience.

De son côté, l'avocat d'EuropaCorp, Arnaud de Senilhes, avait accusé le quotidien d'avoir confondu deux sociétés: EuropaCorp (détenu à 44% par Luc Besson) et EuropaCorp Studios (détenu à 99% par Luc Besson), la holding qui a porté le projet de cité du cinéma: "EuropaCorp Studios n'a jamais eu de lien financier avec EuropaCorp. Il n'y a aucun lien capitalistique entre les deux".

Mais pour le juge, ces erreurs "ne peuvent être prises en considération pour caractériser le délit de diffamation publique, relevant du droit de réponse".

Doutes sur la véracité

Les avocats d'EuropaCorp avaient aussi douté de la véracité du rapport de la Cour des comptes sur lequel se basait le Parisien. Pour Arnaud de Senilhes, "on ne peut absolument pas savoir si la note provient effectivement de la Cour des comptes". Son confrère Jean-Marc Fedida avait abondé: "aucun élément ne prouve que ce n'est pas un document de caniveau. Cela fait plus penser aux notes blanches des services de renseignements utilisés pour répandre des renseignements".

La "très bonne affaire" de la Caisse des dépôts

Enfin, le rapport de la Cour des comptes cité par le Parisien reprochait à la Caisse des dépôts d'avoir investi dans la cité du cinéma. Mais, pour l'avocat d'EuropaCorp Arnaud de Senilhes, ce projet constitue au contraire "une très bonne affaire" pour la banque publique: en effet, elle bénéficie "d'une rentabilité de 7% par an, très supérieure à celle du marché". En outre, la banque publique va "toucher 72 millions d'euros de loyers pour les bureaux loués par EuropaCorp". Enfin, "la Caisse des dépôts a fait une très bonne affaire en achetant pour pas cher la parcelle de terrain située à côté de la cité du cinéma". Vu l'augmentation de la valeur du terrain, la Caisse pourrait donc engranger "au minimum un profit direct de 40 millions d'euros de plus-value. La Caisse des dépôts a détourné le terrain d'à côté, l'a soutiré à Luc Besson, qui l'a revendu à perte". En outre, "Luc Besson n'a jamais récupéré le montant des études qui se monte à plusieurs millions d'euros". Bref, au final, le réalisateur "a perdu de l'argent dans cette histoire." 

Mais, pour le tribunal, "décrire les modalités de financement de la cité du cinéma ne peut être intrinsèquement considéré comme une atteinte à l'honneur et à la considération d'EuropaCorp. En effet, il n'est pas moralement blâmable ou pénalement répréhensible de recevoir un financement public. A supposer même que le financement public ait été dans le présent cas massif, inhabituel, et sans réel risque pour le partenaire privé, EuropaCorp a simplement été bénéficiaire de ces modalités, sans que ne soit atteint son honneur ou sa considération".

A noter qu'EuropaCorp avait aussi attaqué le Parisien pour "diffusion d'information fausses ou trompeuses", mais a abandonné cette seconde plainte en cours de route. De son côté, Luc Besson n'a pas porté plainte à titre personnel contre le quotidien. 

Rappelons qu'EuropaCorp a annoncé à l'automne dernier une nouvelle série de plaintes contre son commissaire aux comptes Deloitte, contre son ancien dirigeant Pierre-Ange Le Pogam, et contre "un organe de presse" non précisé.

Mise à jour à 16h: contactés, ni EuropaCorp ni Arnaud de Senilhes n'ont répondu.

Jamal Henni