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Les annonces de PSA sèment le doute à Sochaux

A Sochaux, berceau de la marque Peugeot et principale usine du groupe automobile, l'annonce par PSA de la fermeture de l'usine d'Aulnay-sous-Bois et de la suppression de 8.000 emplois en France, suscite l'inquiétude. /Photo d'archives/REUTERS/Vincent Kess

A Sochaux, berceau de la marque Peugeot et principale usine du groupe automobile, l'annonce par PSA de la fermeture de l'usine d'Aulnay-sous-Bois et de la suppression de 8.000 emplois en France, suscite l'inquiétude. /Photo d'archives/REUTERS/Vincent Kess - -

par Gilbert Reilhac SOCHAUX, Doubs (Reuters) - L'annonce par PSA de la fermeture de son usine d'Aulnay-sous-Bois et de la suppression de 8.000...

par Gilbert Reilhac

SOCHAUX, Doubs (Reuters) - L'annonce par PSA de la fermeture de son usine d'Aulnay-sous-Bois et de la suppression de 8.000 emplois en France suscite l'inquiétude à Sochaux (Doubs), berceau de la marque Peugeot et principale usine du groupe automobile.

Le fait que plus de la moitié des postes condamnés sur le site franc-comtois concernent la recherche et développement - 369 sur 579 - est un phénomène nouveau qui augure mal de l'avenir aux yeux du personnel d'encadrement.

"Des projets sont abandonnés, d'autres décalés, en particulier sur l'hybride. Si on ne travaille pas dessus maintenant, qu'est-ce qu'on produira demain ?", s'interroge Anne-Laure Turk, chargée de projet "vie-série" et élue de la CFE-CGC, le syndicat de l'encadrement, au comité d'entreprise.

Le précédent plan de suppression d'emploi, annoncé en novembre, avait surtout concerné la sous-traitance.

Du coup, certains services de R&D se sont retrouvés "chargés, voire surchargés", note la syndicaliste qui doute de leur capacité à affronter de nouveaux départs.

Quelque 4.000 personnes y travaillent sur les 12.000 salariés de l'usine de Sochaux et du centre d'essai de Belchamp.

Le site, 260 hectares enchâssés entre Sochaux et Montbéliard, célèbre son centenaire cette année. Il a employé jusqu'à 43.000 personnes dans les années 1970, avant la robotisation, à une époque aussi où la majorité des composants étaient produits sur place.

Derrière la perte de matière grise, c'est la crainte d'une banalisation de la marque, synonyme d'innovation et de qualité, que disent craindre les cadres.

PLUS DE CONFIANCE

"Aujourd'hui, dans la majorité des ateliers, la question c'est 'comment réduire les coûts ?', on n'est plus du tout dans l'amélioration, l'innovation, ce n'est pas du tout gratifiant", témoigne Laurent Hazenfratz, cadre à la direction industrielle et délégué du personnel CFE-CGC.

La fermeture, cette année, de l'atelier mécanique, qui fabriquait avec 600 personnes des amortisseurs "garantis à vie", a selon lui valeur de symbole. "Les gens n'ont plus la même confiance dans le groupe", dit-il.

Autant que le contenu des annonces, la manière et la stratégie erratique de la marque sont critiquées.

"La direction voulait faire son coup en douce", rappelle Pascal Meyer, de la CGT.

Le syndicat avait révélé en juin 2011 une note interne évoquant la fermeture d'Aulnay-sous-Bois, document aussitôt qualifié de "caduc" par la direction.

Pourtant, souligne le syndicaliste, "la feuille de route a été suivie à la lettre".

Au premier semestre 2012, un jeu de chaises musicales était ainsi annoncé entre les usines de Poissy, Mulhouse et Sochaux. Mulhouse transférait à Sochaux sa production de 308 et se voyait confier la future 208 en lieu et place de Poissy qui pouvait dès lors accueillir les Citroën C3 d'Aulnay.

L'annonce en 2011 d'un partenariat dans les véhicules hybrides avec BMW suivi un an plus tard d'une alliance avec General Motors qui semble condamner le premier achève de déconcerter les salariés.

"On nous avait dit le plus grand bien de ce partenariat (avec BMW)", rappelle Jacques Mazzolini, délégué central de la CFE-CGC.

CONSÉQUENCE DE L'ACCORD AVEC GM ?

Dans ce contexte, les suppressions d'emploi sont perçues comme les premières conséquences de l'accord avec le constructeur américain dont les implications pour le groupe ne seront divulguées que le 31 octobre.

"On paye aujourd'hui les erreurs commises ces 15-20 dernières années par des dirigeants qui étaient d'abord des financiers", estime Jacques Hélias, maire socialiste de Montbéliard et président de la communauté d'agglomération, où il vient de succéder à Pierre Moscovici, nommé ministre de l'Economie et des Finances.

Ce médecin de 63 ans s'empresse toutefois de réitérer sa "grande confiance dans PSA".

Au-delà du plan d'aide à la filière automobile que le gouvernement présentera le 25 juillet, la collectivité continuera d'aider "Peugeot" en soutenant l'ouverture l'an prochain d'un centre de formation PSA ou en favorisant l'implantation à proximité des sous-traitants.

Si la chose n'est plus inimaginable, peu de gens croient ici que puisse disparaisse une entreprise qui procure un emploi, direct ou indirect, à 23.000 personnes, selon des chiffres de l'Insee en 2007, soit 20% des salariés de la zone d'emploi.

"Sochaux bénéficie de la protection familiale. La nouvelle génération en place ne baissera pas les bras", assure Christian Monnier, membre du bureau de l'association des commerçants du Pays de Montbéliard.

Ce gérant d'un magasin de vêtements âgé de 58 ans dit savoir de quoi il parle. Il a été durant trente ans documentaliste-historien chez Peugeot.

Edité par Yves Clarisse