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Les banques américaines vont pouvoir à nouveau spéculer (un peu) 

La refonte de ce volet de la loi Dodd-Frank, contesté par les banques et l'administration Trump, s'inscrit dans un contexte général de déréglementation.

La refonte de ce volet de la loi Dodd-Frank, contesté par les banques et l'administration Trump, s'inscrit dans un contexte général de déréglementation. - Bryan R. Smith / AFP

Aux États-Unis, les régulateurs ont modifié la "règle Volcker", cette mesure mise en place après la crise pour limiter la spéculation bancaire.

Les régulateurs bancaires américains ont présenté mercredi une refonte de la règle Volcker, un volet de la loi Dodd-Frank qui limite la spéculation bancaire, particulièrement contestée par les banques et l'administration Trump.

La refonte de ce volet de la loi Dodd-Frank, contesté par les banques et l'administration Trump, s'inscrit dans un contexte général de déréglementation, marqué la semaine dernière par l'allègement de restrictions pour les banques régionales et de taille moyenne.

Adoptée en 2013 après la crise financière de 2008, cette règle, qui porte le nom de l'ancien banquier central et conseiller du président Obama, Paul Volcker, vise à empêcher les banques de prendre des positions risquées alors que leurs dépôts sont assurés par l'État. 

L'assouplissement envisagé donnera plus de marges de manœuvre aux banques pour spéculer pour leur propre compte.

Un coût pour les banques

La règle Volcker interdit normalement de faire du négoce à court terme de titres, de produits dérivés et de contrats sur les matières premières pour leur propre compte, ainsi que de participer à des fonds spéculatifs. Des exceptions ont permis toutefois aux institutions de faire des opérations de couverture justifiées et d'investir au nom de clients.

Les grandes institutions financières, notamment les banques d'affaires comme Goldman Sachs et Morgan Stanley, dont les activités spéculatives représentent souvent près de la moitié des revenus, sont les plus affectées par cette règle. 

Mais par sa complexité et le coût qu'elle impose notamment aux banques de taille modeste, la règle Volcker qui compte plus de 900 pages, a semblé faire l'unanimité contre elle.

"Simplifier et adapter la règle Volcker"

Sous la houlette de la Réserve fédérale (Fed), les cinq régulateurs américains des marchés entendent par cette modification "simplifier et adapter la règle Volcker à la lumière de notre expérience depuis sa mise en pratique", a affirmé dans une intervention devant le conseil d'administration de la banque centrale mercredi, Randal Quarles, gouverneur de la Fed en charge de la régulation.

La nouvelle proposition va apporter une solution "aux incertitudes et à la complexité qui rendent difficiles aux groupes bancaires de savoir comment se plier" à la règle Volcker, a affirmé Jerome Powell le président de la banque centrale.

Globalement, les régulateurs ont dressé trois niveaux de régulation suivant que les banques ont des opérations de négoce supérieures à 10 milliards de dollars (18 banques dont la moitié sont des banques internationales) ou un milliard de dollars (80 établissements) ou en dessous de ce seuil. La nouvelle règle est soumise aux commentaires de la profession pour une période de 60 jours.

"J'accueille favorablement les efforts pour simplifier l'application de la règle Volcker", a réagi mercredi Paul Volcker, âgé aujourd'hui de 90 ans.

Permettre "à davantage de banques de parier contre leurs propres clients"

"Ce qui est primordial est que la simplification ne minimise pas le principe qui est au cœur de la règle, c'est-à-dire que les groupes bancaires soutenus par les contribuables ne participent pas à des opérations de trading contraires à l'intérêt du public et à celui des clients", a ajouté l'économiste.

Pour le Center for American Progress, organisme proche des démocrates, cet assouplissement va permettre "à davantage de banques de parier contre leurs propres clients".

"Cela va concentrer la puissance des plus grandes banques sur les marchés aux dépens des autres investisseurs et cela va mettre l'économie et les contribuables devant de plus grands risques de faillites (bancaires)", dit cet organisme.

J.-C.C. avec AFP