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Les éleveurs exclus par Lactalis vont pouvoir écouler leur lait

À l'été 2016, les éléveurs en contrat avec Lactalis avait entamé un bras de fer avec l'industriel pour obtenir un prix du lait plus équitable.

À l'été 2016, les éléveurs en contrat avec Lactalis avait entamé un bras de fer avec l'industriel pour obtenir un prix du lait plus équitable. - Jean-Sebastien Evrard - AFP

Les agriculteurs éconduits par l'industriel après avoir témoigné dans un reportage qui mettait en cause Lactalis ont finalement retrouvé une laiterie à qui vendre leur production.

La mésaventure des cinq producteurs de lait éconduits par le groupe Lactalis qu'ils avaient critiqué publiquement va prendre fin. Ils ont retrouvé une laiterie, l'entreprise LSDH, grâce à la marque élaborée par des consommateurs "C'est qui le patron".

Les cinq éleveurs de vaches avaient vu leur contrat de fourniture de lait dénoncé en début d'année par Lactalis, après avoir témoigné dans un reportage diffusé en octobre dans "Envoyé Spécial" sur France 2, et qui mettait en cause le puissant groupe et son discret PDG, Emmanuel Besnier.

"Dans les jours qui ont suivi l'annonce de la rupture de contrat, la laiterie LSDH avait dit être prête à nous tendre la main, mais elle n'avait pas de marque en propre. C'est par l'intermédiaire de Nicolas Chabanne (à l'origine de l'initiative +C'est qui le patron+) que nous avons trouvé un accord", raconte leur porte-parole Régis Mainguy, éleveur dans le Maine-et-Loire.

Une rémunération des éleveurs supérieure

"Ce lait riche et fort en symboles va se retrouver dans les briques C'est qui le patron", a confirmé Nicolas Chabanne, qui a lancé en septembre cette marque dont le cahier des charges, y compris une rémunération des éleveurs supérieure à celle pratiquée par Lactalis, a été définie par des consommateurs. Car depuis que la presse avait parlé des déboires de ces 5 éleveurs, "les consommateurs nous ont envoyé des dizaines de messages nous demandant de leur proposer un contrat", explique-t-il. "J'espère avoir l'occasion de remercier tous ces gens pour les tonnes de messages de soutien reçus", dit aujourd'hui Régis Mainguy, "heureux de voir comment ça a pu toucher autant de personnes".

Pour son lancement, la marque avait noué un partenariat avec LSDH, laiterie installée à Saint-Denis-de-l'Hôtel dans le Loiret, qui collecte le lait des 51 éleveurs du projet initial, des petites exploitations familiales en grande difficulté, rassemblées en coopérative dans le département de l'Ain. LSDH collectera dès l'été prochain le lait des 5 ex-éleveurs de Lactalis par l'intermédiaire d'un sous-traitant.

"C'est qui la patron" chez Carrefour, Inter, Auchan et Cora

Les 51 éleveurs de l'Ain ont accepté de tendre la main à leurs collègues car on leur avait eux même tendu la main, raconte Nicolas Chabanne. De plus, l'initiative "C'est qui le patron" rencontre un net succès, et accueillir les nouveaux éleveurs ne va donc pas créer de problème de débouché.

La marque, distribuée dans les magasins Carrefour, a déjà vendu en 4 mois cinq millions de briques de lait et d'autres enseignes de la grande distribution vont bientôt vendre ces briques bleues dans leurs rayons: Intermarché dès le 15 mars, puis Auchan et Cora. Avec leur production de 2,5 millions de litres de lait par an, "les nouveaux éleveurs vont entrer dans la démarche sans priver les autres. Tout ça se fait en bonne intelligence", assure Nicolas Chabanne.

Passer à une alimentation sans OGM

Le nouveau contrat prendra effet durant l'été, car si Lactalis a accepté de libérer les éleveurs avant la fin officielle de leur contrat, pour répondre au cahier des charges des consommateurs les exploitations doivent passer à une alimentation du bétail sans OGM, or il faut six mois de délais pour pouvoir garantir un lait qui en soit exempt.

Le porte-parole de Lactalis, Michel Nalet, avait confirmé en début d'année l'envoi d'un courrier aux cinq producteurs annonçant la rupture de leur contrat, avec un préavis de 12 mois, expliquant qu'il n'était "pas possible de poursuivre une relation avec des producteurs qui dénigrent" le groupe. "Personnellement, j'ai passé trois semaines très stressantes, mais je ne regrette rien", affirme aujourd'hui Régis Mainguy, pour qui l'annonce de cet accord "redonne du baume au coeur".

N.G. avec AFP