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Les mythiques guitares Gibson sur la corde raide

La guitare du "King" Elvis Presley, Gibson EJ-200E édition limitée.

La guitare du "King" Elvis Presley, Gibson EJ-200E édition limitée. - Tommaso Boddi / AFP

Ces dernières années, le groupe a voulu s'attaquer au marché du son et de l'électronique grand public, mais les ventes n'ont pas suivi. Fortement endettée, la célèbre marque de guitare pourrait faire faillite.

"J’ai trop saigné sur les Gibson", chantait Jean-Jacques Goldman en 1981 dans Quand la musique est bonne. Une référence à cette mythique marque de guitare utilisée par la plupart des grands noms du rock international, d’AC/DC à Guns N’Roses et, avant eux, Les Beatles, sans oublier bien sûr le "King" Elvis Presley. L’âge d’or est aujourd’hui révolu et le luthier américain, en activité depuis 1894, fait face à de sérieuses difficultés financières.

Après moins d’un an passé dans l’entreprise, sises à Nashville (Tennessee), le directeur financier a quitté le navire en janvier, remplacé par son prédécesseur, qui lui même n’avait pas fait long feu. Le poste est très sensible car le groupe croule sous les dettes. D’ici le mois d’août, il doit trouver 375 millions de dollars pour rembourser une partie de ses créanciers, selon le Nashville Post. Si la marque n’y parvient pas, elle devra également s’acquitter immédiatement de 145 millions de dollars pour rembourser un prêt bancaire.

Des investissements qui n'ont pas porté leurs fruits

Après le rock, de nouveaux genres musicaux ont émergé, en particulier le rap et les musiques électroniques. Gibson a voulu prendre la vague en investissant tous azimuts dans ce qu’on appelle “l'électronique grand public”, comme les fabricants d’enceintes par exemple. Le groupe a notamment racheté la branche divertissement du néerlandais Philips pour 135 millions de dollars en 2014.

Ces acquisitions ont boosté le chiffre d’affaires de l’ensemble du groupe, passant de 300 millions de dollars à 2,1 milliards de dollars en 2014, selon l’agence de notation Moody’s. Cette dernière a révélé en mai dernier que les trois quart du chiffre d’affaires du groupe relèvent désormais des produits électroniques, rapporte le Tennessean. Gibson a également boosté ses investissements en recherche et développement, le but affiché est de devenir un leader sur le marché de la musique et du son. Pour être à la hauteur de ses ambitions, la marque a dû beaucoup s’endetter.

Problème, dans le même laps de temps, les marges ont fondu et les ventes n'ont pas atteint le niveau minimal escompté. Le chiffre d’affaires a chuté, passant à 1,7 milliard de dollars, d'après les données compilées de Music Trades Magazine. Gibson ne s’y retrouve plus entre ses recettes et ses remboursements. Pour se donner un peu d’air, le groupe a coupé dans ces actifs et cédé récemment un entrepôt de la marque de piano Baldwin -acquise dans les années 2000- pour 6,4 millions de dollars, rappelle le Nashville Post.

Les ventes de guitare ont fondu d'un tiers

Le salut du groupe se trouve-t-il dans son activité historique : la vente de guitares? Le marché est moins florissant qu’auparavant, en dix ans les ventes mondiales, toutes marques confondues, on fondu d'un tiers, passant à un million d’unités, selon le Washington Post, qui a publié en juin une longue enquête sur le marché. La baisse n’est pas catastrophique, le marché connaît même des périodes de résurgences, comme en 2014 où les ventes ont progressé.

"Même si les segments ‘instruments de musique’ et ‘audio professionnel’ sont rentables et en croissance, ils sont toujours sous le niveau connu il y a quelques années", a souligné dans le communiqué le PDG du groupe Henry Juszkiewicz, qui tente parallèlement de relancer l’entreprise via un examen complet du budget et de la stratégie.

Gibson prévoit de recentrer la "marque audio grand public Philips sur les produits qui ont le plus gros potentiel de croissance" tout en "éliminant les segments qui ne sont pas à la hauteur [des] attentes". Le groupe "espère que cette stratégie mènera aux meilleurs résultats financiers de son histoire au cours de l'année qui vient et [lui] permettra de rembourser ses dettes en intégralité dans les années qui viennent". Il faut l'espère, car Gibson n'a d'autre choix que de réussir s’il veut survivre.

J.-C.C. avec AFP