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M6 veut faire passer Paris Première sur la TNT gratuite

Nicolas de Tavernost (M6) veut une nouvelle chaîne TNT comme son rival Nonce Paolini (TF1)

Nicolas de Tavernost (M6) veut une nouvelle chaîne TNT comme son rival Nonce Paolini (TF1) - -

Paris Première est actuellement diffusée sur la TNT payante. Son propriétaire M6 veut profiter de la récente loi permettant de passer sur la TNT gratuite. Une demande en ce sens pourrait être déposée en janvier.

Mise à jour: le 3 janvier, M6 a confirmé officiellement son projet de faire passer Paris Première sur la TNT gratuite

[Article publié initialement le 18 décembre] Depuis peu, Nicolas de Tavernost le répète ici et là, notamment auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel. Le président du directoire de M6 affirme avoir pris sa décision: il veut que Paris Première devienne une chaîne gratuite de la TNT.

La chaîne du groupe M6 est d'ores et déjà diffusée sur la TNT, mais en payant. Le patron de M6 confie donc en privé qu'il va prochainement déposer une demande de passage en gratuit auprès du CSA. A cette heure, une telle demande n'a pas été déposée, mais Nicolas de Tavernost laisse entendre que cela pourrait être fait en janvier.

Choix cornélien

Aujourd'hui, les revenus de Paris Première proviennent à la fois de la publicité (43% du chiffre d'affaires en 2012) et des redevances de ses distributeurs comme CanalSat ou Numericable (54%). Si la chaîne passe en gratuit, alors elle perdra du jour au lendemain les redevances de ses distributeurs.

Le choix entre les deux modèles n'est donc pas évident. "Une chaîne comme Paris Première a des contenus de valeur, et peut très bien continuer à vivre en payant", dit un concurrent.

Mais passer en gratuit permettrait à M6 de se renforcer sur la TNT gratuite, où le groupe ne détient que trois chaînes (M6, W9, 6ter), contre quatre pour TF1 -et peut être bientôt cinq avec LCI. En effet, TF1 a annoncé il y a un mois sa volonté de faire passer en gratuit sa chaîne d'information.

Du bluff vis-à-vis de CanalSat?

Mi-septembre, Nicolas de Tavernost avait publiquement déclaré à la presse avoir deux fers au feu: en parallèle, il voulait renégocier par anticipation le contrat de distribution de Paris Première sur CanalSat, qui arrive à échéance fin 2014. Et si ces négociations "ne se passent pas bien, nous demanderons le passage au gratuit", disait-il.

Trois mois après, les négociations avec CanalSat n'ont toujours pas abouti. "C'est au point mort", dit-on du côté du bouquet. Il est donc possible que les confidences répétées de Nicolas de Tavernost ne soient que du bluff destiné à faire pression sur CanalSat...

Lourdes pertes

Rappelons qu'en 2011, quand Paris Première avait demandé une première fois à passer en gratuit, le CSA avait refusé, notamment en raison de doutes sur un modèle gratuit.

"Le modèle payant semble le mieux à même de garantir la viabilité économique. Il ressort du plan d'affaires établi [par Paris Première] que le déficit de la chaîne serait beaucoup moins important dans une diffusion en payant qu'en clair", avait estimé le CSA. Précisément, la chaîne elle-même chiffrait ses pertes opérationnelles à 19,5 millions d'euros sur trois ans (2012 à 2014) en gratuit, contre seulement 7,1 millions en payant. Bien sûr, le plan d'affaires prévoyait qu'à terme, la diffusion en gratuit devenait rentable...

En outre, le CSA estimait qu'un tel passage "n'apparaît pas susceptible de favoriser dans une mesure suffisante le pluralisme, ni de présenter un intérêt certain pour le public". En effet, la programmation de Paris Première "bien qu'originale à certains égards, n'est pas inédite sur la TNT gratuite".

Conditions légères

Mais le gendarme de l'audiovisuel avait surtout refusé pour des raisons juridiques. En effet, à l'époque, il estimait ne pas avoir le pouvoir d'autoriser un tel passage en gratuit. Selon lui, c'était "une modification substantielle" par rapport aux conditions initiales d'autorisation d'émettre, ce que la jurisprudence interdisait.

Mais la situation a totalement changé aujourd'hui. En effet, la loi audiovisuelle qui vient d'entrer en vigueur permet désormais au CSA d'autoriser un tel passage en gratuit. Les conditions sont assez légères: le CSA doit juste "prendre en compte les équilibres du marché publicitaire" de la TNT, mener une étude d'impact, et consulter le secteur.

Interrogé, M6 et Canal Plus se sont refusés à tout commentaire.

Jamal Henni