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Même pour 5 milliards d'euros, Sharp ne sera jamais taïwanais

Difficile pour le gouvernement japonais d'accepter d'accepter que Sharp passe sous pavillon taïwanais.

Difficile pour le gouvernement japonais d'accepter d'accepter que Sharp passe sous pavillon taïwanais. - Yoshizaku Tsuno - AFP

Le taïwanais Foxconn ne veut plus se contenter d'être un sous-traitant. Pour cela, il est même prêt à payer 5 milliards de dollars pour racheter le japonais Sharp. Pas question, rétorque le gouvernement nippon, prêt à donner sa bénédiction à une offre japonaise d'un montant inférieur.

Foxconn n’a pas l’intention de passer le reste de sa vie à assembler pour pas cher des appareils vendus très cher par Apple ou Sony. Et cette envie qui ne date pas d’aujourd’hui n’est toujours pas assouvie.

Selon le Wall Street Journal, Hon Hai Precision Industry Company Ltd, l’assembleur taiwanais plus connu sous le nom de Foxconn a ainsi proposé 625 milliards de yens, soit près de 5 milliards d'euros, pour s’offrir le japonais Sharp.

Le fabricant historique de l'iPhone a de la suite dans les idées. En 2012, une offre de fusion a déjà été rejetée et, en septembre dernier, une montant de 2,2 milliards d'euros n’a pas plus séduit les dirigeants du groupe nippon qui cette année a évité la faillite de peu grâce à l'intervention des banques.

Une offre moins élevée, mais plus alléchante

Pour mieux séduire ses dirigeants ainsi que le gouvernement japonais adepte du patriotisme économique, Foxconn a même promis de conserver l’équipe dirigeante, indique le Wall Street Journal. Tous se connaissent bien puisque les deux groupes ont en commun une usine d’écrans LCD.

Pourtant, bien que la situation de Sharp soit catastrophique depuis des années, le montant du chèque et les promesses ne changeront rien. Certes les dirigeants de l'entreprise japonaise se laisseraient bien tenter, mais le gouvernement japonais a son mot à dire dans l’affaire.

Et il étudie avec une infinie bienveillance une autre offre. Celle du fonds d'investissement public Innovation Network Corporation of Japan (INCJ). qui pourtant, se montre indubitablement moins généreuse que Foxconn.

Selon Reuters, ce fonds offre 300 milliards de yens (2,35 millions d'euros) et prévoit la conversion en actions de 200 milliards de yens (1,57 million de dollars) de dettes, soit un delta d’environ 642 millions d'euros par rapport à l'offre de Foxconn.

Choisir entre l'économie et le patriotisme

Pourtant cette proposition "made in Japan" a plus de chance d’aboutir qu’aucune autre. D’autant que INCJ ne veut pas seulement sauver Sharp. Son but est de renforcer l’industrie japonaise des écrans LCD en fusionnant les activités de Sharp avec celle de Japan Display dont le fonds est déjà actionnaire. Cette coentreprise de Sony, Toshiba et Hitachi dans le domaine du LCD pourrait, avec Sharp, ralentir les ambitions chinoises dans ces activités.

Dans son plan, INCJ promet aussi de conserver les emplois au Japon et de ne pas vendre au plus offrant les brevet détenus par l'entreprise d'Osaka.

Mais le projet va plus loin. Toujours selon Reuters, l’idée est de rapprocher la division d'électroménager de Sharp avec celle de Toshiba pour créer un géant de l’électroménager connecté dont le leader reste le coréen Samsung qui détient aussi, notons le, 3% de Sharp.

Bref, le gouvernement de Shizo Abe fait son possible pour empêcher le mariage Sharp-Foxconn, perçu comme d'autant plus déshonorant que Taiwan est une ancienne "colonie". L'île a été japonaise entre 1895 et 1945.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco