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Michel-Édouard Leclerc tacle Nestlé et se dit prêt à réduire ses marges

Michel-Édouard Leclerc invité de BFMTV-RMC

Michel-Édouard Leclerc invité de BFMTV-RMC - BFMTV-RMC

Michel-Édouard Leclerc était l'invité de BFMTV-RMC ce mercredi. Le président directeur général de l'enseigne de distribution E. Leclerc est notamment revenu sur le conflit qui l'oppose à Nestlé, mais aussi sur la place du bio dans les supermarchés et l'arrivée d'Amazon dans l'alimentaire.

Règlement de comptes sur le plateau de BFMTV-RMC. Michel-Édouard Leclerc, président directeur général de l'enseigne de distribution E. Leclerc, a raconté sa prise de bec avec Nestlé notamment lors des États généraux de l'alimentation. "Il y a un groupe d'industriels qui veut profiter de la détresse d'un certain nombre d'agriculteurs pour que les consommateurs français paient plus cher chez Leclerc, chez Intermarché, demain chez Amazon. Ils prétendent qu'en obligeant Leclerc à vendre plus cher de 10 ou 15%, on pourra le taxer et reverser aux agriculteurs. C'est du pipeau".

Et il ajoute: "Il y a un consensus qui se dégage entre certains industriels dont Nestlé, le président de l'industrie agroalimentaire française et même certains distributeurs puisque Système U, Monsieur Papin, est assez d'accord avec ça". D'après Michel-Édouard Leclerc, "ils pensent qu'en faisant payer plus cher le consommateur français, tout le monde sera obligé de vendre plus cher et on pourra donc donner plus aux agriculteurs". Michel-Édouard Leclerc "ne croit pas que ce système-là marchera" et s'inquiète de l'impact de cette augmentation des prix sur le pouvoir d'achat.

"Les errements d'une politique agricole"

Quelle est donc sa préconisation pour que les agriculteurs puissent vivre de leur travail? "J'ai rencontré Christiane Lambert, présidente de la FNSEA. Il faut qu'ensemble, on obtienne de la commission européenne que les agriculteurs, industriels, distributeurs puissent créer des interprofessions avec des prix de défense de l'agriculture". Ensuite, il préconise de combattre la volatilité des cours en signant des contrats à 3 ans et 4 ans. Et enfin, muter vers le bio et que les distributeurs et industriels puissent y participer à travers des fonds de solidarité.

Cela signifie-t-il donc que le consommateur ne paiera pas plus cher son produit et que Leclerc réduira ses marges? "Exactement", répond Michel-Édouard Leclerc. "Et que le transformateur et l'industriel réduisent leurs marges". "Je ne trouve pas bien de faire payer au consommateur les errements d'une politique agricole".

"Mon combat est de rendre le bio plus accessible"

Le bio est un enjeu important pour le président directeur général de l'enseigne de distribution E. Leclerc. "Mon combat est de rendre le bio plus accessible". Pourtant, une récente étude de l'UFC-Que Choisir affirme que les prix plus élevés des produits bio seraient notamment de la faute des grandes surfaces qui prendraient une plus grande marge que sur les produits conventionnels. "On ne gagne pas plus d'argent sur le bio que sur le reste", répond Michel-Édouard Leclerc. "Il faut que les producteurs de bio acceptent que le bio ne soit pas inaccessible".

Et il ajoute même: "Le produit est le double à l'achat et il y a plus de casse sur le produit bio puisqu'il n'y a pas de conservateurs, de pesticides, etc. Le produit a une durée de vie beaucoup plus courte".

Par ailleurs, Michel-Édouard Leclerc s'est voulu rassurant sur le Fipronil: "Tout ce qui était susceptible de contenir du Fipronil a été retiré. On allait en vendre. Je ne suis pas sûr qu'on en avait dans les rayons, mais on a tout enlevé". Néanmoins, l'homme d'affaires tire la sonnette d'alarme. Il estime que les fournisseurs ont prévenu trop tard de ce scandale.

Interrogé sur le code du travail, Michel-Édouard Leclerc a été succinct. Il trouve que "ce n'est pas mal fait". Et il précise: "Le processus accouche de quelque chose de lisible".

Leclerc n'a pas peur d'Amazon

Il a, en revanche, été plus bavard sur Amazon. Le président directeur général de E. Leclerc affirme qu'il se prépare depuis 3-4 ans à l'assaut d'Amazon sur les produits frais, même s'il avoue que Leclerc n'est pas encore capable de livrer un produit frais à domicile dans les deux heures. "Oui Amazon est plus fort que nous".

Mais le PDG de Leclerc fait une prédiction. "Au départ, Amazon aura la prime à l'innovation, à la nouveauté. Il va prendre son marché, il va faire très mal à Carrefour et aux distributeurs des grandes villes qui ont des coûts d'exploitation très élevés". Et il ajoute: "En plus Amazon a l'argent pour racheter Carrefour". Et il continue: "Par contre nous nous sommes prêts. Nous les ploucs de province, les épiciers de province, on a compris que ça allait nous arriver comme une tempête. On s'est mis en logistique, en rénovant nos magasins, en créant des emplois d'expertise. Par rapport à Amazon qui va être très produits standards - c'est Alibaba - nous en face on a investi sur la revitalisation de l'offre de nos hypermarchés, on a investi sur des circuits courts". Et puis le PDG espère que le gouvernement impose le géant américain sur son chiffre d'affaires. Un bon moyen de freiner ses ardeurs. "On paie 700 millions d'euros d'impôts de plus qu'Amazon".

Michel-Édouard Leclerc en est certain: "D'ici 2020, on fera 10% de chiffre d'affaires à partir du digital. On a créé 4500 emplois l'année dernière. 3500 en 2017 je pense. Et en 2018, je crois qu'on sera le premier employeur français avec 125, 130.000 personnes".

D. L.