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Négociations tendues avec les banques pour sauver Air France-KLM de la faillite

Air France-KLM

Air France-KLM - AFP

Le groupe cherche à emprunter 6 milliards d’euros pour éviter la faillite. Les discussions sont difficiles avec les banques qui demandent à l’Etat d’augmenter ses garanties des prêts. La compagnie laisse entrevoir une recapitalisation massive d’ici un an.

Difficile de sauver une entreprise en situation de faillite. Depuis le confinement mondial, il y a un mois, le groupe a perdu 90% de son chiffre d’affaires. Pour survivre, Air France-KLM s’est lancé dans le pari fou d’emprunter 6 milliards d’euros pour éviter le crash. Sans faire directement appel à l’Etat.

Toutes les parties espèrent parvenir à un accord dans les prochaines semaines alors que le conseil d’administration s’est réuni jeudi pour faire un point d’étape. Le groupe a engagé des discussions avec huit banques dont les cinq françaises BNP Paribas, Crédit Agricole, Natixis, Société Générale et HSBC France. Mais toutes rechignent à prêter. "Air France était déjà un dossier difficile avant la crise, relate le patron d’une grande banque internationale. Personne n’y voit clair sur son avenir". Selon plusieurs parties prenantes, les discussions sont "très difficiles".

Le poids de la dette

Le groupe est très endetté, notamment depuis qu’il a réintégré dans ses comptes, il y a un an, 7 milliards d’euros de dette correspondant aux loyers de ses avions en leasing. Selon une banque, Air France-KLM va brûler entre 800 millions et 1 milliard d’euros de cash par mois si la situation continue. "Quelques centaines de millions", nuance un cadre de la compagnie qui rappelle que les salaires et le pétrole sont autant de coûts en moins. Quoi qu’il en soit, les banques demandent plus d’assurances.

L’Etat, à travers BPI France, garantit 70% des prêts destinés à Air France, soit 4 milliards sur les 6 milliards empruntés. De son côté, l’Etat néerlandais couvrira les 2 milliards restant pour KLM. Ce niveau de garantie de 70% est insuffisant pour les banques pour qui "le risque de défaut est trop important alors qu’on nous demande de prêter pas cher" explique le dirigeant d’une grande banque étrangère. Pour résumer, les banques ne gagneront pas grand-chose et prennent le risque de perdre beaucoup.

Du coup, elles demandent à l’Etat d’augmenter le niveau de garanti sur les prêts, jusqu’à 80% ou 90%. Sur le principe, le gouvernement est prêt à soutenir davantage Air France. "Bercy a dit et répété que l’engagement de l’Etat était très fort" se dit confiant un dirigeant. Mais "faire une exception pour Air France-KLM risque de créer un précédent pour d’autres grands groupes qui pourrait aussi réclamer un traitement de faveur" tempère un cadre. Autre écueil, "il faut aussi s’assurer que l’Etat actionnaire néerlandais suive", précise un proche du groupe. Contacté, la direction d’Air France-KLM n’a pas souhaité commenter. De son côté, le ministère de l’Economie s’est limité à confirmer que ces points "sont discutés". Jeudi soir, le groupe aérien a confirmé avoir demandé un "soutien des deux gouvernements français et néerlandais" sans en préciser la nature exacte.

Mesures pour convaincre les banques

Mais pour rassurer les banques et s’assurer de leur soutien, "Air France-KLM promet dans son plan de financement une augmentation de capital future", explique un banquier. Un moyen de convaincre les banques que sa structure financière sera renforcée. Et qu’elles pourront mener cette recapitalisation massive pour rentabiliser leurs prêts. Les créanciers estiment que le groupe devra lever 3 à 4 milliards d’euros d’ici un an ou un an et demi. Avant la crise, ils estimaient déjà que le groupe avait besoin de quelques centaines de millions d’euros d’argent frais. Il y a deux ans, il avait déjà levé 750 millions d’euros en accueillant les compagnies américaine Delta Airlines et chinoise China Eastern à son capital.

C’est d’ailleurs toute la difficulté d’une telle opération: mettre d’accord les quatre grands actionnaires d’Air France KLM, les Etats français et néerlandais ainsi que Delta Airlines et China Eastern. Alors qu’avant se profilait l’idée que les deux Etats se retirent progressivement pour laisser plus de place aux deux autres compagnies, la crise rebat les cartes.