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Vie de bureau

Nuire à son entreprise quand on s'exprime en public peut coûter cher

Pour un salarié, à fortiori pour un cadre, la liberté d'expression n'est jamais totale dès lors qu'on s'exprime en public. Si vos propos peuvent porter préjudice à l'image ou au business de l'entreprise, vous risquez des sanctions.

Vous avez peut-être entendu parler de cette polémique en début de semaine. Kevin Roberts, le patron de Saatchi & Saatchi, une filiale de Publicis, a été mis à pied. Son tort: s’être un peu lâché dans une interview accordé à Business Insider.

Ce Britannique connu pour son franc-parler y explique notamment que, si très peu de femmes sont chefs dans la pub, c’est parce que “leur ambition n’est pas de grimper en haut de l’échelle pour obtenir pouvoir, richesse et célébrité, mais d’être heureuses”. Très en verve sur ce sujet, Kevin Roberts ajoute que le débat sur la parité au top management des entreprises est dépassé et poursuit avec encore d'autres déclarations aux relents tout aussi sexistes.

L'épée de Damoclès: le licenciement pour faute grave

À la parution de l'article, les internautes se sont indignés sur les réseaux sociaux. Pas seulement des femmes. Les patrons de Pepsi et de YouTube ont twitté qu’ils ne travailleraient plus avec l’agence. Las. En dépit de son talent reconnu par de multiples prix, Kevin Roberts a donc été mis à pied.

Pour en revenir à nous, quand bien même on ne donne aucune interview sur notre entreprise, on doit faire très attention à ce qu’on dit. Dans nos mails, au bureau, et n’importe où dès lors que des collaborateurs, des clients, peuvent rapporter nos propos à nos chefs. La vigilance est encore plus de mise sur les réseaux sociaux, parce qu’on y laisse une trace écrite, qui a valeur de preuve.

En somme, notre liberté d’expression s’arrête là où elle peut nuire à l’entreprise. Il faut donc éviter les insultes envers l’employeur, évidemment les propos racistes. Et même simplement “parler des difficultés économiques de l’entreprise ou de la mauvaise qualité de ses produits”, selon une avocate en droit du travail. Les sanctions peuvent aller jusqu’au licenciement pour faute grave.

La notion de "sexisme" apparaît dans le Code du Travail

La jurisprudence a également déjà confirmé des mises à pieds et des licenciements pour propos sexistes. Mais cela concernait surtout des cas où la victime était une subalterne, et où le comportement fautif s’apparentaient à du harcèlement. Aucun cas comparable à celui de Kevin Roberts.

Il faut dire que jusqu’à peu, la notion juridique de "sexisme" n’existait pas dans le Code du Travail. Mais depuis 2015, la loi Rebsamen condamne les agissements sexistes en entreprise. Un amendement précise que "nul ne doit subir d'agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant". Reste que les spécialistes du droit juge cette définition trop floue pour donner lieu à des condamnations.

Nina Godart