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Pourquoi Apple se retire du marché de la publicité sur mobile

Apple abandonnera officiellement sa régie publicitaire iAd le 30 juin 2016, alors qu'elle avait été lancée en 2010.

Apple abandonnera officiellement sa régie publicitaire iAd le 30 juin 2016, alors qu'elle avait été lancée en 2010. - Chris Hondros-Getty Images North America-AFP

Apple fustige le commerce des données personnelles numériques, et le prouve en fermant sa régie de publicité dédiée aux applications de l'App Store. Google et Facebook ont gagné la bataille de la pub sur mobile.

Steve Jobs se serait-il trompé sur sa capacité à bouleverser la publicité en ligne sur mobile? Lorsqu'en 2010, il présenta la régie publicitaire iAd, le cofondateur d'Apple avait pour idée de commercialiser un service premium aux annonceurs attirés par le succès explosif des applications sur iPhone et iPad.

Son ambition était de faire naître des campagnes de publicités "immersives", inédites et moins rébarbatives. Insérées dans les applis téléchargées depuis son App Store, ces réclames offraient en outre un surcroît de monétisation aux auteurs de ces applis, Apple prélevant au passage 30% sur ces recettes publicitaires.

Mais la régie d'Apple cessera son activité au 30 juin 2016. D'ici cette échéance, elle va continuer à gérer les campagnes publicitaires déjà signées, mais elle ne prend plus aucun nouvel annonceur. Une centaine de salariés seraient licenciés dans la foulée, selon le quotidien The Wall Street Journal, un nombre qui n'a pas été confirmé par Apple. Ne vendant plus de campagnes publicitaires en tant que telles, la plate-forme technique iAd se contentera de permettre aux annonceurs de suivre des campagnes publicitaires.

Apple iAd n'a capté que 2,6% du marché américain

En cessant cette activité publicitaire qui n'a jamais été vitale pour le groupe, Apple referme une parenthèse qui fut loin d'être enchantée. Les tarifs initiaux présentés aux annonceurs étaient très élevés puisqu'une campagne de publicité pouvait être facturée jusqu'à 10 millions de dollars. Le constructeur avait dû réviser à la baisse ses prix pour élargir sa cible à une clientèle plus large.

En renonçant à l'activité de régie publicitaire, Apple reconnaît aussi la domination du tandem formé de Google et de Facebook sur le marché de la publicité pour mobile. Selon le cabinet d'études eMarketer, Apple ne représenterait que 2,6% du marché publicitaire américain sur les mobiles (smartphones et tablettes). Or, Apple engrange chaque année des sommes en très forte progression, rien que sur le téléchargement d'applications payantes elles-mêmes sur son App Store. 

Tim Cook fustige le commerce de données numériques personnelles

Mais Apple s'est surtout vu reprocher de ne pas jouer le jeu vis-à-vis des annonceurs. Au nom de la protection de la vie privée de ses acheteurs, le groupe ne leur communiquait pas toutes les données sur les utilisateurs d’iPhone et d’iPad, cibles privilégiées de ces campagnes publicitaires. Apple gardait notamment secrètes leurs données de géolocalisation.

Pas plus tard qu'en 2015, Tim Cook a tenu un discours particulièrement virulent sur Google et Facebook, dénigrant leur modèle économique basé sur l’exploitation des données personnelles. "Nous pensons que le client doit pouvoir contrôler ses propres informations. Vous allez peut-être aimer ces services soi-disant gratuits, mais nous ne pensons pas que cela justifie le fait d’analyser vos emails, votre historique de recherche et maintenant même vos photos de famille, tout cela pour Dieu seul ne sait quel but publicitaire" avait t-il déclaré.

Un tel discours s'accommodait mal d'une activité basée sur la vente même partielle des données collectées (nom, sexe, adresse) auprès des utilisateurs d'iPhone et d'iPad. Mettre en accord ses idées et ses actes, ce n'est pas forcément une mauvaise stratégie...

Frédéric Bergé