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Pourquoi la Chine convoite tant la "glace inflammable"

La "glace combustible", constituée de méthane, se trouve sous le plancher océanique ou le permafrost des régions arctiques. (image d'illustration)

La "glace combustible", constituée de méthane, se trouve sous le plancher océanique ou le permafrost des régions arctiques. (image d'illustration) - Mario Tama - Getty Images North America - AFP

Souhaitant diversifier son mix énergétique, la Chine a décidé de multiplier les forages dans les fonds marins, à la recherche de "glace combustible". Une source d'énergie fossile prisée pour le méthane qu'elle contient.

La "glace inflammable", nouveau graal énergétique? Constituée de molécules de méthane piégées dans des molécules d'eau cristallisée, cette "glace" se trouve sous le plancher océanique, ou le permafrost (sol gelé) des régions arctiques. Mais son extraction est difficile et très coûteuse. Selon plusieurs spécialistes, son utilisation concrète, au niveau mondial, prendra encore une dizaine d'années. 

La Chine fait partie des quelques pays qui ambitionnent d'exploiter cette ressource pour répondre à une demande énergétique croissante. Or, Pékin a récemment annoncé une "avancée historique" suite à des forages réussis en mer de Chine méridionale, après presque deux décennies de recherche.

En six semaines, la Chine a extrait plus de 235.000 mètres cubes (m3) de ces "hydrates de méthane" depuis les eaux situées à environ 300 km au sud-est de la ville de Zhuhai (tout au sud du pays), selon les autorités géologiques nationales.

"La Chine a dépassé les attentes dans ses tests de recherche de glace combustible en utilisant des innovations nationales en matière de technologie", s'est félicité Ye Jianlong, chef du département de géologie marine de la ville de Canton (sud), l'organisme qui mène les forages.

La source d'énergie du futur?

Un mètre cube (1m3) d’hydrate de méthane (surnommé "glace combustible" car il peut brûler) peur générer 164m3 de gaz méthane, selon le Département américain de l’Énergie. L'estimation des réserves planétaires varie mais, selon les États-Unis, elles pourraient dépasser "la teneur énergétique de toutes les autres énergies fossiles connues".

Les analystes indépendants sont réticents à chiffrer l’étendue des gisements. Mais, pour eux, ils sont considérables et pourraient "changer la donne" pour les pays qui ont un accès limité aux énergies fossiles traditionnelles.

"Le Japon est le parfait exemple. Ils n’ont pas beaucoup de gaz classique et pour eux, cela pourrait constituer une importante réserve", explique Ingo Pecher, maître de conférences à la faculté des sciences de l’Université d’Auckland, en Australie. L’archipel nippon est lourdement tributaire des importants de gaz naturel liquéfié, car la plupart des réacteurs nucléaires du pays sont encore à l’arrêt six ans après la catastrophe de Fukushima. "L’équation est purement économique" souligne Ingo Pecher.

Si des réserves de "glace combustible" ont été détectées dans le monde entier, de la Nouvelle Zélande à l’Alaska, le principal défi est de trouver des gisements très concentrés et accessibles.

Une ressource qui intéresse de nombreux pays 

Plusieurs pays ambitionnent d'exploiter la "glace inflammable". Le Japon a fait état de succès dans ses travaux de forage au large de sa côte Est. Et les États-Unis ont obtenu des résultats positifs de tests menés dans le golfe du Mexique. Organiser une production viable économiquement mettra "encore 10 ans", nuance Paul Duerlo, directeur général du cabinet de conseil Boston Consulting Group, basé à Tokyo au Japon.

Les experts chinois de la glace combustible estiment qu'elle pourra devenir une source d'énergie rentable "autour de 2030". "On sait où sont les ressources, on a la technologie nécessaire, mais le niveau de la production qui sort des puits n'est pas viable commercialement au vu des prix actuels", poursuit Paul Duerloo.

Le méthane est extrait par chauffage, ou en réduisant la pression à l'intérieur du puits, afin de décomposer les hydrates en gaz et en eau. Autre défi majeur dans l'extraction: l'éventualité que du méthane -un gaz à effet de serre- ne se répande dans l'atmosphère, explique Yuan Xu, professeur au département de géographie et de gestion des ressources de l'Université chinoise de Hong Kong. Mais la glace combustible conserve cependant un "énorme potentiel" si les obstacles financiers et technologiques tombent, souligne-t-il.

A.M. avec AFP