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Pourquoi le logiciel français reste une proie pour les acteurs étrangers

Les introductions en bourse ne compensent plus les sorties, si bien que seuls 25 éditeurs de logiciel sont aujourd'hui cotés alors qu'ils étaient 33 en 2011, selon les auteurs du classement Truffle 100, des 100 premiers éditeurs français.

Les introductions en bourse ne compensent plus les sorties, si bien que seuls 25 éditeurs de logiciel sont aujourd'hui cotés alors qu'ils étaient 33 en 2011, selon les auteurs du classement Truffle 100, des 100 premiers éditeurs français. - Fred Dufour-AFP

"En 2015, l'activité des acteurs français du logiciel a crû de 9% à 12,8 milliards d'euros. Mais 25 éditeurs français étaient cotés en bourse contre 33 en 2011. Ils restent moins valorisés que leurs homologues anglo-saxons, ce qui en fait des proies aisées."

L'industrie française du logiciel est globalement en forme. Selon le classement établi par Truffle Capital, acteur du capital-risque européen, en partenariat avec CXP, cabinet d’analyse et de conseil, les 100 acteurs français recensés par ce palmarès ont vu leur chiffre d'affaires 2015 progresser de 8% à 12,8 milliards d’euros (contre 11,8 milliards d’euros en 2014). Le seul secteur de l'édition (conception et vente de logiciel hors prestations et services afférents) s'est élevé à 7,5 milliards d'euros contre 6,6 milliards en 2014.

Le résultat net cumulé des 100 éditeurs français de logiciels a même explosé, atteignant 1,186 milliard d’euros (contre 599 millions en 2014). Le secteur emploie 107.000 personnes, contre 103.600 un an plus tôt, avec -bonne nouvelle- une faible propension à la délocalisation.

Le secteur reste très concentré puisque les 5 premiers acteurs de ce classement représentaient, en 2015, 54% du chiffre d'affaires total. À lui seul, le numéro un Français, Dassault Systèmes, cumule 33,7% du chiffre d’affaires total réalisé par les 100 premiers éditeurs français de logiciel. La filiale informatique de l'avionneur est suivie par Sopra Steria qui monte à la seconde place, suivi par Murex à la 3ème place.

Et l'avenir immédiat se présente bien pour le secteur du logiciel. Le marché devrait toujours afficher une bonne santé en 2016, puisque 42% des éditeurs du Top 100 anticipent une croissance située entre 5% et 15%.

Le palmarès des éditeurs français de logiciels en 2015

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- © Dassault Systèmes représente à lui seul un tiers du chiffre d'affaires total cumulé des 100 premiers éditeurs français de logiciels. Source : Truffle 100

Le seule ombre à ce tableau qui serait presque idéal, au regard du reste de l'économie française, est lié au financement de ces entreprises. "Les introductions en bourse ne compensent plus les sorties, si bien que seuls 25 éditeurs sont aujourd'hui cotés alors qu'ils étaient 33 en 2011" remarque Bernard-Louis Roques, directeur général de Truffle Capital.

Résultat: la Bourse ne jouerait plus selon lui son rôle de fournisseur en capitaux et outils pour réaliser des acquisitions. Pour y remédier, il suggère de drainer une partie de l'épargne des contrats d'assurance-vie et autres PEA vers les sociétés innovantes.

Le corollaire de ces problèmes de financement a pour effet pervers une sous-valorisation des acteurs du logiciel. "Les éditeurs ne se voient pas gratifiés des valorisations et des levées de fonds qu'ils méritent" souligne Bernard-Louis Roques. En conséquence de quoi, les éditeurs français de logiciel sont des proies faciles pour les fonds étrangers. Il en veut pour preuve la récente annonce de l'OPA sur Cegid, 6ème du classement Truffle 100. La société de Jean-Michel Aulas a fait l'objet d'une offre de rachat conjointe de deux fonds anglais et américain.

En 2014, les numéro 15 et 23 du classement 2013 établi par Truffle 100, les éditeurs E-Front, racheté par Bridgepoint pour 300 millions d'euros et Orsyp acquis par Automic, sont passés respectivement sous pavillon britannique et autrichien.

Frédéric Bergé