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Pourquoi le prix de la moutarde risque d'augmenter

Le Canada impacte directement celui de la Bourgogne car le prix est indexé sur le marché des oléagineux.

Le Canada impacte directement celui de la Bourgogne car le prix est indexé sur le marché des oléagineux. - SAMIRA BOUHIN / AFP

Baisse de la production des graines de moutarde au Canada, problème de production du verre, hausse du prix du carton, trois facteurs qui pourraient faire grimper de 5% le prix de la moutarde dès cette année.

Depuis quelques mois, les consommateurs français sont malmenés. Après une pénurie de beurre, puis du rosé et récemment des boissons gazeuses - alcoolisées ou pas - une nouvelle menace plane. Cette fois, c’est sur la moutarde. En période de barbecue, l’information peut avoir quelques conséquences et permettre aux producteurs de ketchup ou de sauce samouraï de profiter d’une belle fenêtre de tir ?

Selon le quotidien bourguignon Le Bien Public, le prix du pot de moutarde pourrait grimper. Le journal ne dit pas dans quelle proportion. Que se passe-t-il donc dans cette activité habituellement d’apparence plutôt tranquille ?

Le journal local explique que cette probable hausse des prix à plusieurs facteurs. D’abord le prix de la graine de moutarde en provenance du Canada dont la production est en baisse à cause de la météo. Ce pays est le principal producteur mondial de cet ingrédient qui est à la moutarde ce que l’iPhone est à Apple. Près de 60% de la moutarde produite en France l’utilise, le reste provenant des environs de Dijon. Les autres facteurs qui pourraient justifier une augmentation est la hausse des prix du verre et du carton d’emballage qui l’un et l’autre sont impactés par les coûts de l’énergie.

L'effet canadien sur la moutarde française

Pour Fabrice Genin, président de l'association des producteurs de graines de moutarde, il faut savoir raison garder. "Cette information revient chaque année à la même période, celle de la récolte des graines qui se fait pendant l’été", réagit ce spécialiste qui précise que lors d’une récente réunion avec les moutardiers, il n’a noté aucun signe d’inquiétude. "Ce sujet n’a même pas été abordé", signale Fabrice Genin à BFMBusiness.com.

"Quand bien même les canadiens ne pourraient pas produire autant que nécessaire, nous pourrions facilement répondre à la demande", ajoute l’agriculteur. En effet, cette production ne représente que 2% des terres cultivée. "S’il y avait réellement une pénurie, nous avons les moyens d’augmenter la production, à condition de le savoir lors des semences", indique Fabrice Genin.

Du côté des producteurs de moutarde, rien ne filtre pour le moment. Chez Maille et Amora, deux marques qui appartiennent l’une et l’autre au groupe Unilever, nos questions sur d’éventuelles hausse des prix sont restées sans réponse. Mais Marc Desarménien, dirigeant de la moutarderie Fallot, confirme qu’en effet, "les prix devraient augmenter de 5%" en 2018.

Le retour au 100% "made in France"

"Les surfaces de culture au Canada ont beaucoup baissé en 2017. De ce fait les prix ont augmenté. Nous nous approvisionnons en ce moment sur cette récolte même si le Canada représente de moins en moins de volume pour notre entreprise environ 40% de nos achats", explique le dirigeant qui espère que "les prix 2018 seront plus raisonnables, liés à une augmentation des surfaces de culture au Canada pour 2018". En attendant, cette moutarderie artisanale compte, dès l’an prochain, se fournir exclusivement en Bourgogne, un choix qui n’est pas lié au cours des graines de moutarde. "Le Canada impacte directement celui de la Bourgogne car le prix est indexé sur le marché des oléagineux. Nous privilégions aujourd'hui des approvisionnements locaux". 

Mais pour Marc Desarménien, le cours de cette matière première n’est pas le seul problème. "La situation des emballages en verre est plus préoccupante, car lié à une sous production en Europe" causé sur "la réfection de fours et les fermetures d'usines". Une analyse partagée par Fabrice Genin qui rappelle que la graine de moutarde ne pèse pas lourd dans le prix d’un pot de moutarde. "Si les prix augmentent, ce ne pourrait-être qu’à cause du verre ou des emballages carton qui déterminent vraiment les prix de détail".

Selon des chiffres d’Amora, leader du marché, la part du verre sur le marché de la moutarde s’élève à 34%. Mais même si le prix du verre augmente, ces pots n’atteindront pas le prix de la moutarde vendu dans des emballages plastique qui atteint 5,77 euros au kilo contre 3,80 euros. Mais, dans cette activité, le choix du verre est aussi une question d’élégance. "Il n’est pas de bonnes moutardes dans de vilains pots", comme le disait Raymond Sachot, patron d’Amora, lorsqu’il lança les pots en verre en 1934 pour remplacer ceux en grès.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco