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Pourquoi les entreprises du médicament ne veulent pas entendre parler des pilules à l'unité

Un amendement déposé dans le cadre du projet de loi anti-gaspillage sur les médicaments est actuellement examiné par les parlementaires. Et il est loin de faire l'unanimité chez les professionnels.

C'était une promesse de campagne du candidat Macron. "Quand vous avez une pathologie, le pharmacien vous prescrira ce dont vous avez besoin" expliquait-il lors d'un meeting en janvier 2017. L'idée paraît de prime abord pleine de bon sens: pour éviter le gaspillage, autant prescrire la dose précise, plutôt que d'encombrer les armoires à pharmacies de boîtes à moitié pleines et qui finiront dans la poubelle.

Chose promise, chose due. Des députés LREM ont donc déposé un amendement dans le projet de loi anti-gaspillage pour contraindre les pharmaciens à délivrer les médicaments à l'unité dès le 1er janvier 2022. Rappelant l'engagement du président de la République pris pendant la campagne présidentielle, ils soulignent que les "médicaments non consommés finissent bien souvent jetés à la poubelle ou les toilettes".

Une mesure "dangereuse pour les patients"

Ils rappellent aussi qu'une expérimentation de trois ans de la dispensation à l’unité (DAU) des antibiotiques a été mise en place en 2014 et qu'elle "a bénéficié d’une forte acceptabilité" de la part des personnels de pharmacie et des patients. La mesure est d'ailleurs pleinement mise en place dans de nombreux pays, comme aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni.

Pour autant, la proposition est loin de satisfaire le Leem, l'organisation professionnelle des entreprises du médicament.

Premier argument, la fameuse expérimentation n'a pas fait une telle unanimité, notamment chez les pharmaciens qui sont vent debout contre sa généralisation. L'union des syndicats de pharmaciens d’officine explique ainsi que la dispensation à l’unité "n’améliore pas l’observance, y compris pour les personnes âgées, et est dangereuse pour les patients qui stockeraient des médicaments en vrac dans leur armoire à pharmacie."

Non-sens économique

En réalité, c'est la disparition de la boîte avec la posologie inscrite ou encore la date de péremption qui posent problème. Elle serait remplacée par des récipients uniformes et facilement confondus entre eux, plaident les opposants. Le Leem pointe ainsi le risque de "remettre en cause la qualité des médicaments, leur sécurité et leur traçabilité jusqu'aux patients." Et d'assurer que le gaspillage vient plutôt de "prescriptions inappropriées et d'une mauvaise observance des patients."

Mais la mesure est aussi un non-sens économique pour les industriels qui ont investi des millions d'euros pour permettre une meilleure traçabilité des médicaments, par boites et non plus par lots. Et pour les pharmaciens, la distribution à l'unité représentera un surcroît de travail de préparation et "fragilisera" les officines. 

Thomas Leroy