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Pourquoi Sainte-Hélène reste une île (malheureusement) idéale pour l'exil

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- - Les quelque 4.100 habitants de l'île de Saint-Hélène attendent toujours le démarrage d'une liaison aérienne régulière avec le monde extérieur. www.sainthelena.gov.sh

Comme Napoléon il y a 200 ans, le seul moyen d'arriver à l'île anglaise de Sainte-Hélène, dans l'Atlantique sud, reste le bateau. Son nouvel aéroport, malgré 340 millions d'euros investis, n'est desservi par aucun vol commercial régulier à cause de turbulences liées à la météo locale.

L'isolement légendaire de l'île anglaise de Sainte-Hélène, où Napoléon mourut en exil en 1821, reste d'une surprenante actualité. Le bateau qui assure la seule liaison régulière (en 5 jours) avec l'extérieur, via Le Cap (Afrique du Sud), aurait pourtant dû être doublé par une liaison aérienne, le 21 mai 2016. Ce jour devait être inauguré le premier vol commercial régulier empruntant le nouvel aéroport construit à cet effet. Mais, il n'en a rien été et Sainte-Hélène reste l'une îles les plus isolées du monde au beau milieu de l'Atlantique sud.

Quelques jours avant la date prévue, les autorités de l'île avaient reporté à une date indéterminée l'ouverture officielle de l'aéroport. La raison ? De fortes turbulences gênent dangereusement les avions abordant l'unique piste d'atterrissage. En effet, le 18 avril 2016, le Boeing 737-800 exploité par la compagnie aérienne Comair (filiale de British Airways) dans le cadre d'un vol test inaugural, avait dû s'y prendre à trois reprises pour atterrir, en raison de fortes turbulences (comme le montre la vidéo YouTube ci-dessous). Celles-ci seraient provoquées par des conditions de vents surprenantes, déjà relevées par Charles Darwin lorsqu'il visita l'île en 1836. S'y ajoute la topographie particulière de l'aéroport, perché sur un petit plateau en altitude.

L'un des premiers motifs pour doter Sainte-Hélène d'un aéroport était de faciliter les évacuations pour raison médicale car l'île abrite 4.100 habitants. L'ouverture d'une ligne aérienne régulière aurait aussi dopé le tourisme sur cet île volcanique à la nature sauvage. Cet apport de voyageurs lui aurait assuré des revenus complémentaires pour moins dépendre des subsides du gouvernement. Et pourquoi pas développer le tourisme "napoléonien" ? La France dispose, sur ce confetti de l'ex-empire britannique, d'un domaine de 15 hectares regroupant des possessions en rapport avec l'exil de l'empereur.

L'île fait surtout partie des territoires d'outre-mer du Royaume-Uni et le gouvernement anglais a financé les 340 millions d'euros qu'a coûté l'aéroport. La chambre des Lords à Londres s'est même émue publiquement, mi-octobre 2016, de cet investissement public coûteux et (pour l'instant) inutile. Grâce à l'ouverture de vols réguliers, 30.000 touristes étaient attendus pour doper l'économie insulaire, sous perfusion du gouvernement britannique.

En réponse à une interpellation en séance publique, le gouvernement, par la voix du ministre d'État, Lord Bates, a déclaré: "Les vols commerciaux programmés commenceront lorsque les conditions seront considérées comme sûres pour le faire et lorsque le gouvernement de Sainte-Hélène sera en mesure de contracter avec une compagnie aérienne, avec le bon avion disposant de l'approbation réglementaire pour assurer ces vols".

De son côté, Atlantic Star l'une des deux compagnies aériennes (avec Comair) pressenties pour relier l'île avec Le Cap en Afrique du Sud, affirme travailler avec les autorités pour trouver une solution durable et assurer des vols commerciaux réguliers. Elle a même réussi à faire atterrir fin octobre un vol d'essai. La compagnie a eu recours à un avion Avro RJ 100 avec à son bord des pilotes chevronnés, rompus aux atterrissages par grand vent.

Quelques autres vols à vocation sanitaire ont eu lieu avec succès durant l'automne 2016 mais Sainte-Hélène continue d'attendre du ciel la vraie et définitive rupture de son splendide isolement...

Frédéric Bergé
https://twitter.com/BergeFrederic Frédéric Bergé Journaliste BFM Éco