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Pourquoi Wall Street torpille (à nouveau) Tesla ?

Tesla doit faire face à une nouvelle vague de défiance, face à une santé financière encore en question, et un manque de visibilité sur ses perspectives.

Tesla doit faire face à une nouvelle vague de défiance, face à une santé financière encore en question, et un manque de visibilité sur ses perspectives. - MARK RALSTON / AFP

Le constructeur automobile subit une nouvelle vague de défiance majeure à la bourse, avec des analystes particulièrement sévères dans leurs dernières notes.

« Autant partir escalader le Kilimandjaro » écrit Daniel Ives, analyste du courtier américain Wedbush, quand il estime les chances de Tesla de pouvoir atteindre ses objectifs de rentabilité au second semestre. Par conséquent, il a abaissé son objectif de cours sur l'action Tesla passant de 275 à 230 dollars. 

Mais il est loin d'être le seul. Ces derniers jours, la note la plus sévère a été émise par Morgan Stanley, qui a même révisé à la baisse ses objectifs de « Scénario du Pire (Bear Case) ». En cas de coup dur, la banque d'affaires estime que l'action Tesla pourrait descendre à 10 dollars pièce (contre un précédent objectif bas à 97 dollars) ! Ce qui reviendrait à ne plus valoriser Tesla qu'à hauteur de ses dettes, à peu de choses près.

La Model 3, un « pétard mouillé »?

Pourquoi cette nouvelle vague d'acharnement autour de Tesla? Certes Wall Street est prompt à déclencher la curée sur les stars de la cote qui connaissent des difficultés. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois que Tesla doit subir un tel mouvement. Le groupe a perdu quasiment la moitié de sa capitalisation depuis le début de l'année, passant de 65 milliards de dollars à 35 milliards environ ces derniers jours, avec même un repli de plus de 30% ces 3 derniers mois. Lundi soir, le titre est même passé légèrement sous les 200 dollars, pour la première fois depuis décembre 2016.

Mais c'est aussi sur le terrain fondamental qu'on se fait du souci. Malgré un lancement tonitruant et des succès spectaculaires notamment sur le marché européen, la Model 3, le premier modèle de production de masse de Tesla, n'arrive pas à voir ses ventes se stabiliser. « Au lieu d'une déferlante, on a plutôt l'impression d'un pétard mouillé pour le moment », commente un analyste. « On devait avoir une croissance progressive, on se retrouve avec des chiffres bien trop volatils pour être vraiment significatifs. L'effet des retards de livraison sans doute » ajoute-t-il, constatant que de toutes les façons Tesla au 1er trimestre a signé des chiffres de vente en-dessous de ses objectifs.

Cycle de hausse des dépenses

Elon Musk avait promis que cette déferlante de la Model 3 allait améliorer les comptes, au point de parier sur un retour aux profits sur le second semestre. Mais désormais plus personne n'y croit à Wall Street. Déjà parce qu'après une levée de fonds de 2,7 milliards de dollars il y a quelques semaines, la situation financière du groupe ne semble pas s'être améliorée. Au point où Elon Musk lui-même a invité par mail ses salariés à limiter leurs dépenses.

Un signal très négatif, alors que parallèlement le groupe investit en masse pour augmenter sa production dans son usine de Fremont, dans la construction de sa giga-factory chinoise à Shanghai, et dans le développement de son nouveau SUV Model Y qui doit sortir des chaînes l'année prochaine. Le tout pour des perspectives de ventes qui posent de plus en plus question, sur toutes les zones géographiques, avec l'émergence de concurrents sérieux pour les produits Tesla, chez Jaguar, Audi ou encore chez les coréens Hyundai et Kia.

« Alerte rouge »

On craint donc une nouvelle phase difficile pour Tesla, où le groupe va de nouveau consommer du cash de manière croissante et dangereuse pour son modèle économique. « Tesla est en situation d'alerte rouge », précise Daniel Ives, l'analyste de Wedbush. « Mais au lieu de s'en préoccuper, Elon Musk préfère investir dans l'assurance, les taxis autonomes et d'autres projets de science-fiction, alors que l'urgence c'est de maîtriser les dépenses ! » ajoute-t-il.

Un échec de Tesla à redevenir profitable au second semestre risque de compliquer la situation, de renchérir le coût de sa dette et de nouveau le forcer à lever des capitaux, auprès d'investisseurs qui seront de plus en plus difficiles à convaincre. Malgré son avance technologique pour le moment imbattable, Wall Street craint de nouveau de voir Tesla dépassé par un mauvais pilotage de son modèle économique. Les chiffres du 2ème trimestre auront donc une importance cruciale et vitale pour le constructeur.