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Prison avec sursis requise contre l'ancien PDG de Vinci

Une peine de deux ans de prison avec sursis et 375.000 euros d'amende a été requise vendredi contre Antoine Zacharias, ex-PDG de Vinci, poursuivi pour des gains jugés abusifs de plusieurs dizaines de millions d'euros. /Photo d'archives/REUTERS/Charles Pla

Une peine de deux ans de prison avec sursis et 375.000 euros d'amende a été requise vendredi contre Antoine Zacharias, ex-PDG de Vinci, poursuivi pour des gains jugés abusifs de plusieurs dizaines de millions d'euros. /Photo d'archives/REUTERS/Charles Pla - -

par Thierry Lévêque NANTERRE, Hauts-de-Seine - Une peine de deux ans de prison avec sursis et 375.000 euros d'amende a été requise vendredi contre...

par Thierry Lévêque

NANTERRE, Hauts-de-Seine (Reuters) - Une peine de deux ans de prison avec sursis et 375.000 euros d'amende a été requise vendredi contre Antoine Zacharias, ex-PDG de Vinci, poursuivi pour des gains jugés abusifs de plusieurs dizaines de millions d'euros.

Ce procès concernant le géant des travaux publics est le premier du genre à viser une société française cotée en bourse. Si le parquet était suivi, le tribunal correctionnel de Nanterre (Hauts-de-Seine) créerait un précédent juridique sur les salaires des grands patrons.

Le jugement devait être rendu à 17h00.

Fustigeant un "abus de pouvoir", le procureur Marie-Aimée Gaspari a estimé que ce dossier d'abus de biens sociaux devait servir d'exemple, notamment parce qu'il contrevenait selon elle aux "règles de bonne conduite" édictées par le Medef.

"Au nom de la réussite, tout n'est pas permis, tout ne se justifie pas. Ce dossier est le contre-exemple de tout ce qui est prôné", a-t-elle dit, se posant en défenseur de "l'ordre public économique".

Me Hervé Temime, avocat d'Antoine Zacharias, a plaidé la relaxe et a répondu dans sa plaidoirie en ironisant sur la procédure, où son client est "cobaye" à ses yeux, et où il n'y aurait aucune dépense contraire à l'intérêt social de Vinci.

Ni Vinci, ni ses actionnaires, ni ses syndicats ne demandent rien à l'ancien patron, a-t-il souligné, faisant remarquer que l'ex-PDG de Vinci était crédité du quadruplement du résultat net de sa société de 2000 à 2006 et de l'explosion de sa valeur boursière.

"Zacharias est un faux puissant, n'a pas de protection, de réseaux. Ce ne sont jamais aux vrais puissants, aux énarques, à l'establishment, qui perçoit des rémunérations insensées et fait perdre de l'argent aux entreprises, qu'on demande des comptes", a-t-il dit.

UN ABUS DE POUVOIR ?

Vinci, partie civile, ne réclame pas à son ex-dirigeant le remboursement des sommes visées, que l'entreprise juge légales.

Sont en cause l'augmentation du salaire annuel d'Antoine Zacharias, de 2,9 à 4,2 millions entre 2003 et 2005, un "parachute doré" de 12,8 millions d'euros touché en 2006, une "retraite-chapeau" de 2,1 millions d'euros annuelle et près de deux millions de stock-options.

Pour cellss-ci, la plus-value potentielle était de 124 millions d'euros en 2006, mais Antoine Zacharias n'en a conservé qu'une petite partie, après un autre procès perdu contre Vinci.

Le tribunal peut en théorie ordonner la restitution à Vinci des sommes versées même si la société ne les réclame pas. Deux petits actionnaires, dont la recevabilité est douteuse, demandent 600 millions d'euros de réparations pour la société.

Le parquet se fonde sur les méthodes utilisées pour obtenir les avantages. "C'est un délit d'abus de biens sociaux assis sur un abus de pouvoir", a résumé le procureur.

Antoine Zacharias, pour écarter des personnalités hostiles, a selon elle suscité la nomination comme président du comité des rémunérations de Vinci du Britannique Quentin Davies, aujourd'hui secrétaire d'Etat à la Défense dans le gouvernement de Gordon Brown.

Me Temime s'étonne que le parquet ne l'ait pas fait auditionner par la police et ait renoncé à désigner un juge d'instruction indépendant pour l'enquête.

L'enquête a montré que Quentin Davies avait approuvé tout ce que ses prédécesseurs au comité refusaient au profit d'Antoine Zacharias, malgré l'avis contraire d'un cabinet de conseil travaillant pour Vinci.

Contredisant Antoine Zacharias, qui s'appuie sur le vote favorable du conseil d'administration, le parquet estime que l'instance avait les mains liées, du fait de la proximité de ses membres avec Vinci et Antoine Zacharias et parce que ce dernier concluait à l'époque une importante opération industrielle.

"Le processus de décision a été dévoyé car il fallait passer en force (...) Antoine Zacharias était en position dominante et il en a abusé", a dit Marie-Aimée Gaspari.

Edité par Gilles Trequesser