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PSA-Opel, retour sur une négociation rondement menée

Mary Barra, PDG de General Motors, avec Carlos Tavares, président du directoire de PSA et Karl-Thomas Neumann, directeur général d'Opel, ce lundi 6 mars au siège de PSA à Paris.

Mary Barra, PDG de General Motors, avec Carlos Tavares, président du directoire de PSA et Karl-Thomas Neumann, directeur général d'Opel, ce lundi 6 mars au siège de PSA à Paris. - Eric Fererberg - AFP

C'est fait, PSA et General Motors ont conclu ce lundi 6 mars la vente d’Opel au groupe français. Retour sur six mois de négociations entre Français, Allemands et Américains.

Peugeot Citroën met fin à 90 ans de cohabitation américano-allemande chez Opel. Le directeur général de PSA, Carlos Tavares, et Mary Barra, la directrice générale de General Motors, ont en effet conclu ce lundi 06 mars la vente d’Opel et des activités européennes de l’américain au français, pour la somme totale de 2,3 milliards d’euros.

"La vente des activités européennes représente une nouvelle étape importante dans le processus de transformation de notre entreprise", a conclu Mary Barra, lors de la conférence de presse conjointe des 2 constructeurs à Paris. Cette conférence de presse clôt surtout un round de négociations rondement mené entre les deux groupes. Nom de code de tout le processus: "Magritte", rapporte Les Echos.

Les racines d’un rachat nées en 2012

Les prémices de toute l’opération remontent en fait à 2012. PSA et General Motors viennent alors de signer le 29 février une alliance qui se veut mondiale, et sera en fait surtout européenne. Les deux groupes divorcent fin 2013, mais Opel et PSA produiront tout de même en commun 3 nouveaux véhicules. Des liens industriels et personnels sont alors noués des deux côtés du Rhin. L’idée d’une vente définitive d’Opel à PSA remonte elle au printemps dernier, selon le Wall Street Journal. Début 2016, enfin sortis de la crise, les bons résultats de General Motors ne souffrent que d’une seule ombre: ses activités européennes, et donc Opel-Vauxhall.

Les finances de l'allemand vont mieux, mais Opel perd toujours de l’argent. General Motors est lui un constructeur en pleine renaissance, centré sur l’Amérique, le développement de la voiture électrique et ses opérations en Chine. Depuis son arrivée à la tête du groupe américain en 2013, Mary Barra a contribué au redressement aussi bien financier que stratégique de GM. Son mot d’ordre: se concentrer sur ce qui rapporte de l’argent, préparer l’avenir et assainir au maximum les finances. Les discussions se nouent réellement au Mondial de l’Automobile en octobre, à Paris.

Après une vente avortée d’Opel au canadien Magna en 2009, en pleine crise, Mary Barra est cette fois bien décidée à conclure cette vente. D’autant que les relations entre les équipes d’ingénieurs Opel et PSA se passent très bien. Le Crossland X, 1er modèle Opel sur base PSA, sortira cette année, tandis que l'usine de Sochaux (Doubs) a lancé en février la production des modèles de série du Grandland X, le grand SUV d'Opel produit sur base PSA. Des liens solides sont donc noués.

Picasso, Gauguin, Offenbach

Pendant tout l’automne, les deux banques mandatées par PSA et GM (Morgan Stanley et Citi) travaillent sur le projet de rachat d’"Offenbach" (le nom de code d’Opel) par "Picasso" (PSA) à "Gauguin" (GM). Impossible à cette période de déjeuner non plus avec les consultants de Roland Berger qui gèrent le volant industriel… jusqu’au 14 février. Le possible rachat sort alors dans la presse, le jour de la fête des amoureux.

"Il est évident qu'un partenariat important se prépare, nous expliquait alors Christian Lafaye, délégué syndical central Force Ouvrière. Il y a quelques temps, Carlos Tavares expliquait qu'il valait mieux être chasseur que chassé. PSA fait aujourd'hui partie des constructeurs les plus rentables. Nous sommes dans une position favorable". La piste Opel reste cependant une surprise. "Aucun indice n'a été donné sur un éventuel rapprochement ces dernier temps même si on se doutait bien, depuis l'arrivée de Carlos Tavares, que le but était d'aboutir à une alliance" avec un autre constructeur précisait alors Franck Don, délégué syndical central CFTC.

Un marathon à partir du 14 février

La course contre la montre s’engage alors, Opel vient de plus d’annoncer 257 millions d’euros de pertes en 2016 et outre-Atlantique, Mary Barra a promis 1 milliard de dollars d’investissement supplémentaire aux Etats-Unis à l’administration Trump. La faute au Brexit, a expliqué ce matin Mary Barra. PSA annonce lui le 23 février 2,3 milliards d’euros de bénéfices. Carlos Tavares lance l’opération séduction vis à vis d'Angela Merkel, Teresa May et les syndicats allemands et anglais. Jusqu’à ce vendredi 3 mars: le conseil de surveillance, et donc les trois principaux actionnaires de PSA (la famille Peugeot, l’Etat français et le chinois Dongfeng) ont validé le rachat.

Depuis ce matin, PSA dispose de 6 usines d’assemblage de véhicules et 5 sites de fabrication de composants supplémentaires, d’un nouveau centre de R&D, soit au total de 40.000 employés supplémentaires. Le timing est parfait. L’ouverture du salon automobile de Genève le 7 mars sera l’occasion pour le patron d’Opel, Karl-Thomas Neumann, et Carlos Tavares de célébrer l’opération.

Pauline Ducamp