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Publicité sur internet : Free frappe là où ça fait mal

Free créé la polémique en supprimant la publicité

Free créé la polémique en supprimant la publicité - -

Les internautes apprécieront peut-être le confort de ne plus avoir de publicités intrusives, mais les éditeurs du net s'insurgent. Enjeux économiques, contrôle du contenu... Free touche des points très sensibles. Premières réactions, stupéfaites.

Emoi sur internet. L’opérateur Free, qui a modifié jeudi 3 janvier sa Freebox en désactivant, par défaut, les publicités sur les sites internet, crée la polémique. Si certains internautes saluent cette fin des publicités intrusives, d’autres s’inquiètent.

> Pour Fleur Pellerin, ministre de l’Economie numérique, c'est l'occasion de réfléchir au problème des publicités intrusives.

La ministre de l'Economie numérique évite de trop prendre part au débat pour l'instant, en se contentant d'envoyer un message depuis son compte Twitter. Elle se dit "peu fan de la pub intrusive, mais favorable à une solution du type 'no opt out' par défaut" (que l'affichage des publicités soit une option, à activer volontairement, plutôt qu'installée par défaut, NDLR). Elle propose d’en discuter très rapidement avec les éditeurs de contenu et Free. Une rencontre pourrait d’ailleurs avoir lieu dès lundi 7 janvier.

> Pour les défenseurs d'un internet libre, cette intervention de l'opérateur est un danger pour la démocratie.

Le site spécialisé Numerama, explique que "Free montre le pouvoir extraordinaire des fournisseurs d'accès à internet sur l'information, qui peuvent décider d'altérer le contenu d'un site internet. Il a décidé de bloquer la publicité en ligne, mais il pourra décider demain de bloquer l'accès aux sites pornographiques, aux sites qui proposent des jeux vidéo violents, aux sites 'terroristes', aux sites de e-commerce étrangers qui ne respecteraient pas la législation française, aux sites qu'il considère diffamatoire, etc. Il pourra non seulement bloquer ces sites, mais aussi modifier ou bloquer une partie de leur contenu, sans que l'internaute le sache".

Il poursuit en soulignant que, pour les internautes les plus récalcitrants à la publicité, une possibilité existait déjà. "Il est faux de comparer le filtrage imposé par défaut par Free au plugin AdBlock. Ce dernier est choisi par l'internaute, ne s'applique que sur l'appareil où il est installé, et peut être configuré pour épargner tel ou tel site, ou telle régie publicitaire. L'internaute reste maître de son filtrage. Là, Free a décidé sans prévenir personne d'activer par défaut un filtrage qui n'est en rien paramétrable. Des millions d'abonnés seront concernés, et seule une toute petite poignée saura qu'il est possible de désactiver le filtrage".

> Pour les éditeurs de contenu, la publicité est parfois une question de survie économique

Des milliers de sites internet ne vivent que grâce à la publicité, comme le rappelle Franck Monsauret, Country Manager France d’Outbrain : "Le modèle économique de la très large majorité des sites des internautes repose sur la publicité. Ce modèle du ‘tout gratuit’ date des origines de l’internet et il est le garant d’une liberté d’accès à des ressources nombreuses, variées et indépendantes. Si un internaute veut installer un bloqueur de pub, c’est son choix, mais risquer de gripper tout un pan de l’économie numérique en bloquant les publicités pour cinq millions de personnes est à mon sens une erreur".

Dans une interview pour BFM Business, Alexandre Malsch, directeur général de Melty.fr, explique, quant à lui, que "la publicité finance un écosystème, celui des médias qui crée des contenus et des services. Les conséquences peuvent être dramatiques". Il relativise cependant cette initiative de Free: "On pense que c’est une maladresse technique qui a activé cette option par défaut". Une maladresse stratégique au minimum...

Le titre de l'encadré ici

|||Un coup de pression sur Google

Free aurait-il porté le premier coup dans la guerre contre Google? Le géant américain, dont le modèle repose sur la publicité, engrange toujours plus d'audience et de revenus. Les besoins en bande passante deviennent si croissants que les opérateurs du net sont entrés en discussion avec les plus gros éditeurs de contenus, comme Google donc, pour envisager un partage dans les investissements sur les infrastructures réseau. Dans ce contexte, l'opération anti-pub de Free, sonne comme un coup de force.

En outre, le site spécialisé, PCINpact, a remarqué que " les vidéos monétisées sur YouTube (propriété de Google, NDLR) n'affichent plus aucune publicité. Ce qui n'est pas le cas sur Dailymotion par exemple".

Diane Lacaze